Dédicace.
A tous les Tahitiens, et Maoris de toute la Polynésie, leurs ancêtres et leurs descendants.
« Celui qui a le contrôle du passé a le contrôle du futur, celui qui a le contrôle du présent a le contrôle du passé.
George Orwell, 1984 »
Préambule.
La Nuit « Po », les Etoiles « Feti ‘a », le Soleil « Mahama ou Raa », la Lune « Ava ‘e ou Marama », le Firmament « Ra’i », la Terre « Fenua »…Comment dire ce que la langue ancienne des Tangata Manu(humains) pouvait dire, même avec la langue actuelle des Maoris. Nous ne savons presque plus rien des anciennes coutumes, ceci ne doit pas nous empêcher d’en parler, nous irons alors vers la vérité, car même l’erreur avérée est source de jute connaissance, parce qu’ elle pose le plus souvent les bases d’une discussion positive et qu’elle approche ainsi progressivement la vérité. Et ceci est vrai pour la base de toutes les inepties. Dans le tahitien actuel le son k est absent remplacé par un blanc traduit par une apostrophe. La marque du pluriel le son nga n’existe plus vraiment . La langue maorie ancienne n’existe plus, bien sûr elle était parfaite même si de nombreux patois et dialectes subsistaient aussi, les initiés parlaient aussi entre eux une langue encore plus ancienne et savante et pouvaient comprendre tous les langages des autres îles. L’ancien parler polynésien s’approche singulièrement de la langue de Fenua Enata (les Marquises), de l’ancien pascuan, et des parlers actuels des Maoris de Nouvelle Zélande… Cette langue maorie fut commune à toutes les tribus à son origine, elle est de toutes les langues humaines existantes celle qui compte le moins de consonnes, en tout douze signes suffisent pour marquer les voyelles et les consonnes. Les différents parler austronésiens connus qui subsistent en sont fort proches. On recherchera pourquoi sans doute un jour et on trouvera qu’il y a vraiment une grande explication à cette simplification ; celle peut être que les sons qui n’ont pas été développés sont inconnus dans les lieux où cette langue s’est formée. Ou alors cette langue s’est apurée de ces sons qui n’avaient pas de signification profonde dans l’environnement des populations locutrices. Les sons du langage des humains semblent déduits généralement de l’environnement et imitent souvent les bruits de la Nature ; des animaux ; des éléments.
Nous devons étudier les mythes fondateurs des tribus maories pour comprendre quelque chose à cette civilisation extraordinaire.
La pire des choses n’est elle pas de décréter que toute vérité issue de croyances et même parfois de technologies bâties sur ces mythes est contestable. J’entends la vérité officielle, celle qui repose sur la foi plutôt que sur des preuves matérielles ou scientifiques indiscutables. Encore que les preuves ne prouvent généralement que fort peu de choses, et que leur authenticité n’est jamais très certaine.
La plupart des dirigeants politiques ont toujours fait fabriquer par leurs scribes une histoire destinée à les glorifier à leur convenance par exemple souvent même avec des documents authentiques ; soit partiels et maquillés ; soit fabriqués de toutes pièces.
On laisse encore des éducateurs sournois persécuter ceux qui nient des vérités révélées, et remplacer les religions anciennes par des prétendues vérités historiques forgées par les colonisateurs comme autant de chaînes. Encore faut il ne pas oublier que les preuves se fabriquent et que les faussaires de l’histoire existent et œuvrent toujours . Des référents plus sages et plus avisés que moi pourrons contrôler et modifier les inexactitudes qu’on trouvera sur les conquérants de l’Océan Pacifique. Ces hommes du néolithique, de l’âge de la pierre polie qui traversèrent cette immense étendue marine, peuplèrent toutes les îles habitables, allèrent sans aucun doute très vite , en quelques décennies jusqu’à l’Amérique et en revinrent. Comme le prouve la diffusion de la patate douce : le kumara, qui est une plante développée par les Amérindiens sans doute ceux du Pérou actuel. Quel est la civilisation qui a donné le signal de cette conquête du Pacifique par des populations très peu nombreuses qui ont sans doute traversé cet océan de part en part en quelques générations seulement ? Puis ces traversées ont cessé et les populations ont évolué en vase clos.
Il y a quelques indices qui peuvent déterminer que ceci s’est produit 3000 ans avant notre ère, sans doute dés que ces ancêtres mythiques quittèrent les côtes de Taïwan ou plutôt de Hawaïki, leur terre d’origine.
Cette première traversée de l’océan Pacifique n’a pas laissé de traces certaines, peut être que le kumara , la patate douce, a été déjà ramenée à cette occasion, et que les poules sans queues qui pondent des œufs bleus, trouvées par les Européens au Chili chez les Araucans notamment , ont été laissées là par les découvreurs. Il faudrait faire des fouilles archéologiques pour connaitre la période de leur arrivée en Amérique du sud. Il semble qu’ailleurs en Amérique centrale, et nord, il n’y a pas eu de poule domestique avant l’arrivée des Européens.
Les études documentées actuelles ne déduisent pas encore des éléments archéologiques trouvés que cette traversée a pu être faite à cette période très ancienne. Ils pensent que le peuplement est beaucoup plus récent et sans doute ont ils de bonnes raisons pour ça. Nous savons aujourd’hui que l’île de Pâques était autrefois couverte de forêts, de grands palmiers dont on retrouve des exemplaires semblables aujourd’hui au Chili, dont les petites graines ont pu y être transportées naturellement par les courants marins. Nous savons même quand cette forêt a disparu. Notre récit n’envisage pas clairement cette chronologie, mais c’est bien naturel, nous étudions et avançons vers la vérité. La vérité d’aujourd’hui s’appuie sur la réfutation des erreurs, des théories d’hier.
Lisons les textes qui ont été compilés, regardons les techniques, les outils, les œuvres d’art qui ont subsistés.
Il était une fois un Peuple de marins, d’arboriculteurs, d’éleveurs, le Peuple des Maoris, qui occupait le vaste territoire Polynésien. Ils descendaient des Austronésiens (la civilisation nommée lapita par les archéologues) qui s’étaient aventurés dans l’Océan Pacifique et là y avaient rencontré d’autres Peuples :les Australiens, les Papous, les Mélanésiens déjà installés dans ces contrées depuis des siècles (au moins 30 siècles d’après nos documents fossiles), ils étaient aussi allés vers l’Afrique s’installant à Madagascar, et jusqu’en Amérique. Ils partirent de plusieurs zones continentales de l’Asie, puis sans doute de Taïwan, et peut être aussi du Japon. Ils étaient de diverses origines ; mais possédaient en commun une culture particulière et s’exprimaient dans une langue commune le maori, qui a généré des patois locaux actuels de Polynésie, d’où provient le tahitien devenu langue littéraire avec la traduction de la Bible par les missionnaires, puis par les écrits des Polynésiens eux même dans leur langue. Qui étaient ils ? Quelles étaient leurs vies ? De leur histoire nous ne connaissons que les légendes et les généalogies transmises oralement, puis transcrites, ceci fut avéré lorsque l’écriture arriva dans ces contrées. Une saga transmise oralement par les Pascuans, recueillie par ceux qui étudièrent ce peuple sera la source principale de ce récit.
Le langage maori ancien était paradoxalement fort complexe, différent des langages actuels, il était magique par nature et les mots avaient souvent une signification sacrée. Ainsi les tabous mis sur les mots forgèrent principalement les différences qu’on peut observer. Nous savons aussi que les langues se forgent et divergent par les fautes de prononciations à partir d’une langue originelle. Il y a ainsi le « k » qui s’exprime en Marquisien et en Maori et qui est absent du Tahitien remplacé par une sorte d’apostrophe, car il s’agit d’une sorte de voyelle muette, ou de quelque chose d’intermédiaire. Mais tous les Maoris s’entendent facilement d’un bout à l’autre de cet immense domaine qui leur fut tellement longtemps réservé par la Providence. On peut penser qu’ils furent les seuls possesseurs de l’Océan Pacifique pendant presque trois millénaires, partageant cette possession avec les peuples d’origine du Pacifique moins attirés par la navigation, qui en se mêlant à eux formèrent les groupes appelés mélanésiens ou kanaks. Les maoris ont hérité des mélanésiens des caractères et des parties de leur culture, l’inverse est vrai aussi.
Mes mots sommaires maoris me viennent des nombreux écrits sur l’île de Pâques que j’ai lus depuis des dizaines d’années avec une grande attention. Cette île que les Polynésiens nomment Rapa Nui, (Rapa la lointaine, Rapa est une île des Australes françaises ;située à une latitude proche) Ces mots sont bien différents de ceux actuels du Tahitien, ce sont ceux de Teagi, fils aîné d’Hotu Matua un Ariki Nui (Grand Roi), obligé de quitter son domaine qui s’enfonçait dans la mer et qui devenait inhabitable. Hawaïki Mataïna (la terre d’origine appelée toujours Hawaïki, car à l’origine « Hawaï ki » est le domaine des Dieux nés de la nuit, un lieu mythologique, qu’on peut situer entre Fidji et la Nouvelle Guinée, ou peut être sur la côte nord est de cette dernière gigantesque île explorée, colonisée sur les côtes. Hotu Matua, qui devait devenir le roi de l’île la plus extrême de ce domaine polynésien ; située juste avant le continent Américain, mais à des milliers de kilomètres. Teagi fils aîné d’Hotu Matua était un homme oiseau « un tangatamanu » et la légende rapporte qu’il s’embarqua de l’île de Pâques un jour pour aller vers l’est c’est à dire vers l’Amérique, qui était son domaine voulu par Hotu Matua, et qu’il ne revint plus alors dans sa patrie. Son père ne lui donna aucune part de son royaume, contrairement à ses autres frères, alors même qu’il était l’aîné, et qu’il était un prêtre initié, il lui montra l’horizon à l’est au soleil levant et lui dit : « Au delà de cette mer est ton domaine ».
Les Maoris ont une classe de nobles qu’ils nomment Ariki. Ils sont plus grands, plus forts, plus savants, ce sont des chefs descendants des enfants que les Dieux Polynésiens eurent sur terre lors de leur descente parmi les Humains, ceci est souvent inscrit dans leur généalogie. Et ce n’est pas différent de ce que l’on trouve dans la Grèce ancienne, ou même à Rome, et encore dans les Sagas, et dans toutes les mythologies. Les Dieux polynésiens sont pour les religions monothéistes ce qu’on appelle des Anges, et pour ceux qui ne croient pas simplement des extraterrestres. Une chose semble établie c’est qu’ils sont immortels et doués de capacités de mutation en animaux et peuvent se transférer d’un endroit à un autre par leur simple volonté.
Les Arikis descendent des Dieux, et ont eu des contacts avec eux. C’est la thèse de cette étude sur leur histoire religieuse. Les grands Dieux issus de la nuit (Atua po) sont Takaroa (Ta’aroa) et son fils Oro, né à Raïatéa, la légende dit qu’il y descendit sur terre par amour de Vahinés locales, mais pour les Pascuans un autre Dieu essentiel est Makemake le premier homme créé par un Avatara de Takaroa (Avatara : un Dieu prend la forme humaine pour un temps).
Ailleurs encore le premier homme est appelé Tiki. Lui aussi est issu d’un Dieu et d’une humaine. Il sera l’ancêtre de toute la lignée humaine, avec Hina son épouse. L’immortalité n’a pas été donnée alors aux humains, mais il ne sera pas expliqué ici pourquoi. Et Maui lui même ; le Demi Dieu dont les Arikis se disent les descendants, mourut lorsqu’il essaya de voler ce secret en pénétrant dans le vagin de la géante qui le conservait en elle. Un oiseau moqueur fut dit-on à l’origine de cette catastrophe pour l’humanité. Makemake qu’on ne peut confondre avec Maui, ni avec Tiki est l’Adam polynésien, il était fils de Dieu, créé par lui avec de la boue, puis éveillé à la vie avec tout le mana du souffle de Takaroa et grâce à ceci sans doute primitivement immortel comme son créateur. Il subit toutefois lui aussi le déluge qui détruisit toute l’humanité primitive. Et c’est par lui que l’humanité fut recréée ensuite. Car il se sacrifia pour que le mana s’installe à nouveau dans le monde. Il n’y a pas de faute originelle dans le paradis maori. Juste une sorte de perdition du mana des humains dans le mélange désordonné des unions illégitimes avec les formes humaines existantes, et l’insulte que ces humains dégénérés font aux Dieux alors en ne respectant pas les tabous. Qui sont les Maoris actuels ? Leur génétique est complexe du fait des apports des Européens, des Chinois, des autres populations du Pacifique. Mais il semble bien que les Maoris viennent de la fusion des Austronésiens et des Papous de type négroïde qui vivaient en bordure de la mer. Les Mélanésiens étant eux aussi un des résultats de cette fusion.
Bien sûr les faits rapportés sont légendaires. Il s’agit d’une œuvre qui est presque toute d’imagination, les faits sont imaginaires, mais ils décrivent aussi en partie la réalité telle que la science l’a décortiquée à ce jour. L’Odyssée et l ‘Illiade eux aussi sont des récits mythiques qui rapportent la vérité connue sur les anciens Achéens en la magnifiant, même si ce que Homère décrit longtemps après les faits est loin de la réalité historique telle que nous la construisons actuellement à partir des documents fossilisés. L’archéologie du Pacifique est encore trop incertaine. Son développement permettra sans doute de relier entre eux tous les éléments disponibles et de donner un sens aux mythologies locales. Ce sont ces mythes qui nous ont interpellés et qui sont à l’origine de notre désir d’écrire cette histoire et de connaître mieux les Polynésiens, les Maoris actuels qui ont hérité de leurs ancêtres des qualités uniques.
Dans notre récit, il y a des Dieux comme dans ceux d’Homère. Or cette vérité humaine n’est plus bonne à dire, n’est plus crédible. Qui croit encore aux Dieux des Grecs d’Homère ? qui croit encore aux Dieux polynésiens ? Ils ont été gommés par les religions judéo-chrétiennes, qui les ont rangés dans les placards des mythologies, comme les coutumes anciennes magiques et religieuses de chez nous qui sont devenues des éléments folkloriques récupérés par la civilisation actuelle. D’anciens mensonges effacent d’autres mensonges. Voilà ce récit, je sais qu’il est en moi ; il m’obsède depuis des décennies, je l’ai rêvé bien avant d’être en mesure de l’écrire. Et les Dieux des Maoris je les ai vraiment rencontrés dans mes rêves, ils existent vraiment eux aussi. Leur existence qui peut en douter !
Il y a des Dieux partout, et pas vraiment de respect des vérités historiques. Mais qui peut douter que Achille, Hélène, Ulysse, et tous les autres, ainsi que les Dieux de la Grèce antique aient réellement existé, leur mémoire est immortelle. Et voilà Takaroa, Hina, Tiki et Maui sont présents dans cette histoire, et pas plus que les héros de la guerre de Troie, ils ne seront oubliés demain, car c’est pour ceci que cette histoire des tribulations de Teagi a été conçue et rêvée. Le nom de Teagi découle d’une source sûre, il était bien le fils aîné d’Hotu Matua. Tout est un entrelacement de fils rêvés et inventés et de faits véritables, et pas seulement cette histoire. Les lecteurs spécialistes et plus informés des faits rapportés voudront bien excuser les fautes qu’un Popaa a pu faire, il voulait faire cette fresque depuis longtemps, peut être n’a t’il pas vraiment eu tous les matériaux nécessaires à sa disposition.
CHAPITRE PREMIER
Le naufragé.
La forme divine nommée Tangata Manu, (l’homme oiseau) habitait depuis toujours l’esprit de Teagi et venait la nuit habiter ses rêves avec le cortège des fantômes des ancêtres. L’homme premier issu de la divinité qui s’identifia alors à un oiseau, et qui comme lui prit son envol dans l’espace diaphane du ciel bleu éternel.
Le premier homme oiseau fut le « demi » Dieu Make Make un être divin, créé par Takaroa (Takaroa est le Dieu créateur issu de la Nuit : un Atua faare Po) à partir de la glaise rouge, créateur de l’humanité . Ensuite Maui l’humain de la race royale, le père des Arikis, le merveilleux héro maori possédera aussi ce pouvoir, que lui donna sa naissance mystérieuse. Nous verrons plus loin qu’il a été jeté dans le lagon par sa mère sous forme de fœtus après un avortement et a été alors recueilli par un Dieu qui l’a élevé et lui a donné tous ses pouvoirs).
Or, cette nuit là, il ne parut que quelques instants seulement venant de l’horizon déchiré par les éclairs d’un orage. Il vint sous la forme d’une frégate mâle la gorge rouge éclatante gonflée tenant dans son bec une longue ligne au bout de la quelle un poisson volant se débattait furieusement, et se transformait soudain en un poisson épineux monstrueux. Cette vision réveilla Téagi. Le jour se levait…
Le cortège des esprits des morts, qui environnent les humains, les fantômes, les « Tupapau » familiers s’évanouissaient à présent aspirés dans le monde de l’au delà. Les ombres de la nuit s’enfuyaient vers leur séjour diurne. Les étoiles s’éteignaient. Un grand essaim de nuages se rassemblait à droite du soleil rougeoyant comme un tison; comme par magie la brume apparut alors sur la trame scintillante des flots; longtemps la mer fut grise, puis elle prit insensiblement une teinte outremer. Il y a toujours une respiration de l’océan lorsque le jour se lève, elle est faite de bruits indistincts provenant de la rupture des courants et des tourbillons que la nuit fait surgir des abîmes et descendre de l’espace infini qui nous entoure. Le jour s’installe en mer comme une symphonie joyeuse qui succède à un requiem tragique.
Le grand navire polynésien « Te Arawa », (un arawa est une espèce de requin, chaque navire à un nom en Polynésie) venant de Hiwa ,transportant le peuple du roi Hotu Matua vers l’est, pour un voyage sans retour, gémissait longuement, de toutes ses jointures et ses membrures cousues de cordages de niau (fibre tiré de l’enveloppe de la noix de coco). Ses deux longues voiles en forme d’ailes d’oiseau, tressées en fibres de pandanus et renforcée de tapa, claquaient au vent d’ouest, leurs câbles vibrant sourdement autour des mâts. Au sommet desquels les longues banderoles de plumes multicolores dessinaient la direction des sautes capricieuses de l’air, des tourbillons inconstants de l’aube, sautant d’un bord à l’autre, indiquant aussi dans un langage particulier connu des initiés les messages des Dieux marins portés par les embruns.
La direction du navire était assurée par deux puissants avirons, solidement amarrés aux poupes. L’embarcation filait vivement, fendant les vagues moutonnantes, sa plate-forme lourdement chargée recevait des gifles d’embruns, en gémissant elle traçait un sillage phosphorescent dans une mer sombre. Le grand catamaran mesurait une trentaine de mètres de longueur, sur dix de large. Il comprenait deux coques distinctes faites pour leur base de deux longues pirogues jumelles taillées dans le même type d’arbre géant multiséculaire kaori de Nouvelle Zélande . Une superstructure de planches, liteaux de bois en treillage et de nattes en protégeait les volumes internes des gros paquets de mer, occupés de place en place par des rameurs et d’autres chargés d’écoper régulièrement, ou d’effectuer des manœuvres avec leur rame. La poupe et la proue de chaque coque étaient relevées verticalement et comportaient une estrade permettant à une ou deux vigies de s’y tenir, le maître de navigation s’y trouvait lorsqu’il y avait un péril à surmonter, aidé d’un tambour, d’une conque, les chants donnaient les ordres et la cadence à chaque marin. Dans ces vastes flotteurs se trouvaient de grands coffres étanches en vannerie enduite de résine et de latex, chaque coque était reliée à l’autre par une succession de poutres arquées supportant une vaste plate-forme. Chaque élément était assemblé par des liens de cordes, des trous permettant une sorte de chevillage reliaient le squelette des coques composé de membrures fines et souples liées à des traverses et aux bordages, aux poutres de la plate-forme. L’ensemble étant souple, léger, décoré et sculpté, chaque élément était régulièrement enduit de résine puis brulé superficiellement, des peintures de sèves et d’argile y étaient déposées, et aussi des enduits de monoï servaient à le protéger des intempéries, ainsi que de poix obtenue avec la sève caoutchouteuse ou la résine des arbres, de sang aussi parfois pour en entretenir la résistance et y faire entrer la puissance du mana. Les liens étaient souvent contrôlés et mouillés, protégés par des pièces de vanneries sur les zones de frottement, renforcés, et changés chaque fois qu’il était indispensable de le faire. Conçus pour filer en surfant sur les vagues aux allures portantes, virer rapidement, prendre aussi le vent de travers leur allure la plus efficace et si nécessaire tirer des bords pour remonter au vent. Les grands navires polynésiens pouvaient alors rivaliser avec les embarcations les plus rapides actuelles. Seules les pirogues de guerre propulsées par des dizaines de rameurs émérites pouvaient échapper à leur poursuite ou les rejoindre pour les prendre d’assaut lorsqu’il n’y avait pas de vent porteur, ou que les lourdes voiles ne pouvaient agir sur un vent suffisant. Pour faire construire une embarcation de ce type, il fallait être un grand roi, avoir des arbres gigantesques dans son domaine, et disposer de constructeurs émérites des savants dans cet art. Les migrations étaient presque toujours le résultat de l’exil volontaire d’un peuple vaincu, ou d’une partie d’un peuple suite à une surpopulation ayant engendré un chaos économique et social, ceux qui restaient voyaient généralement d’un mauvais œil détruire les ressources essentielles, les arbres les plus sacrés, pour construire la flotte d’émigration.
Le départ d’Hotu Matua de Hiwa eut lieu pour des raisons magiques. Il fut précédé d’un voyage d’exploration fait par un groupe de sept initiés fils de roi, ( sept Ariki ) (Tahunga est le mot maori qui définit les maîtres dans les sciences techniques et magiques, et aussi les découvreurs de terres) six revinrent à Hiwa emportant avec eux les témoignages de l’île haute découverte à l’est, qui serait la destination ultime.
La légende rapporte ceci :
Hau-Maka le vieux conseiller du roi de Hiwa, eut un rêve dans lequel son esprit voyagea dans un pays lointain, pour aider à prendre de nouvelles terres pour le roi Hotu Matua. Dans le rêve, son esprit s’est rendu à la Mata ki te Rangi (Les yeux qui se tournent vers le ciel). L’île a également été appelé «Te pito o te Henua », qui signifie «le nombril , le centre de la Terre. » Pour nous il s’agit de l’île de Pâques (Pascua island) possession du Chili actuellement.
Lorsque Hau-Maka se réveilla, il rapporta son voyage astral au roi. Le roi ordonna alors à sept initiés de Hiwa (Hiwa ou Hawaï est une terre mythique de tous les Maoris) d’enquêter. Ils suivirent les instruction d’Hau-Maka et ont trouvé la terre décrite par le voyant, alors ils sont retournés à Hiwa. Ils se nommaient : Ira, Raparena, Ku’uku’u A’Huatava, Rinirini A’Huatava, Nonoma A’Huatava, Uure A’Huatava, Makoi Rinirini A’Huatava. Le septième mourut accidentellement, la légende précise qu’il fut blessé mortellement par une tortue marine géante qu’il essayait de retourner sur la plage d’Anakela, lieu de leur atterrissage et il fut enterré sous le premier ahu (esplanade sacrée appelée aussi marae à Tahiti) construit par ses compagnons sur cette plage qui devint l’ahu des Rois. Les explorateurs avaient aussi amené avec eux une pierre issue du marae royal ainsi qu’une statue (le premier moai) qui fut érigée sur ce premier sanctuaire de l’île. Ils plantèrent aussi des taros, des ignames, des cocotiers, des bananiers et bien d’autres plantes sacrées comme le santalier. Ils laissèrent aussi sur place les premiers coqs et poules. En ce temps là l’île était couverte de grands arbres d ‘après les études des pollens fossiles dont une majorité de palmiers sans doute venus par la voie maritime du continent Américain par les courants maritimes, mais aussi d’autres espèces plus singulières apportées par les oiseaux et les ouragans comme le toromiro. Il ne semble pas qu’il y ait eu plus qu’aujourd’hui alors des sources abondantes, malgré la végétation assez dense. Les envoyés ne découvrirent aucun cours d’eau, juste une réserve assez importante d’eau douce dans le cratère d’un volcan, et quelques sources à proximité de la mer. Sources qui existent toujours de nos jours et que les Pascuans anciens allaient exploiter jusqu’au rivage. Cette terre n’était pas un paradis pour l’agriculture comme peuvent l’être parfois les autres îles hautes, toutes d’origine volcanique. A Rapa nui, comme aux îles Marquises, il n’y a pas de barrière de corail, pas de lagon. Les courants environnants sont froids. Une vie marine riche qui en découle est présente sur la côte ou à peu de distance de celle ci. Le poisson y est abondant en toutes périodes. Il n’y a proche que deux petits îlots ou motus et l’île est isolée et ne fait pas partie d’un archipel.
Après plusieurs mois passés à découvrir les possibilités de cette terre, les explorateurs revinrent à Hiwa presque directement avec les vents portants constants des tropiques qui se dirigent vers l’ouest et ils firent leur rapport. De longues tractations s’en suivirent avec les autorités locales pour préparer l’exode.
Le grand roi (Ariki nui) avait fait préparer l’immigration d’une partie de sa population pour occuper cette terre lointaine, la plus lointaine du domaine maori.
Depuis des siècles les migrations humaines avaient progressivement pris possession de l’ensemble des îles habitables du Pacifique. D’autres avaient été occupées temporairement et abandonnées ensuite souvent lorsqu’il y avait des populations agressives qui survenaient. Les Maoris étaient allés jusqu’aux divers Continents et grandes terres de la zone se fondant parfois même dans les populations locales ce qui semble être le cas le plus souvent d’ailleurs, ou étant obligés de fuir devant la détermination des populations locales après quelques guerres sauvages. On a souvent opposé les Mélanésiens aux Polynésiens. Ils se sont parfois affrontés durement, mais ont vécu en symbiose le plus souvent. Les langues mélanésiennes, et les coutumes générales de ces Peuples différent énormément, mais ils vivent généralement des mêmes ressources, ils ont même fusionné généralement leurs cultures. Les maoris sont bien différents des Mélanésiens, des Papous, des indigènes de l’Australie, mais ils ont communiqué avec eux et se sont enrichis de techniques et de cultures diverses rencontrées dans leurs voyages innombrables. Leurs ancêtres les Matang étaient des asiatiques vivant des ressources maritimes.
Venant de Formose, ou du Japon vers 3000 avant J.C. ils arrivèrent par la mer après de très longues traversées qui ne leur posaient pas de problème alors, car ils avaient construit des grands navires à double coque. Ils apportèrent avec eux une poterie spécifique qui a rapidement disparu jusqu’à Samoa et Tonga. C’est de ce marqueur de leur passage qu’on a appris qu’ils avaient colonisé les Fidji avant d’en être sans doute chassés massivement par les Fidjiens mélanésiens qui sont survenus ensuite eux provenant de la zone des îles et des côtes de la Nouvelle Guinée . La poterie lapita a été trouvée partout où les ancêtres des Maoris qu’on nomme Austronésiens se sont installés, et notamment en Nouvelle Calédonie dont la localité de Lapita a donné son nom à cette culture et à ce Peuple. Ensuite tout ceci s’est délité et a subi la déchéance de la vie maritime dans des îles nombreuses riches de certaines ressources, mais pauvres de civilisation car difficiles à administrer et à faire fructifier. Ces populations utilisaient aussi à l’origine l’obsidienne provenant de zones mélanésiennes obtenues sans doute alors par des échanges commerciaux. Ils étaient devenus des nomades de la mer pour beaucoup de raisons, certaines sont faciles à imaginer d’autres sont plus complexes à définir.
Il s’agissait en fait d’une toute petite population arrivant dans un espace maritime déjà très peuplé. Ce peuple prit ses quartiers dans un sanctuaire qu’il nomma Hiwa, et de là il partit à la conquête de son vaste domaine tout l’océan Pacifique et ses poussières d’îles et d’îlots . Aujourd’hui on pense que Raiatea pourrait avoir été une Hawaiki, et que Hiwa pourrait être un autre nom de ce centre culturel maori. Ceci provient du culte d’Oro qui venant de Borabora (Pora est devenu Bora Bora prononcé par les Popaa) s’est établi à Raiatea avec l’érection du grand marae Taputapuatea qu’on dit encore aujourd’hui père de tous les maraes. Mais il est probable que le culte d’Oro ne s’est développé ainsi que vers le dix-septième siècle période de l’arrivée des Européens dans ces parages. Et que le marae primordial était sans doute à Hawaiki nui ou Hiwa bien plus loin hors du domaine actuel considéré comme maori. Difficile de définir ce lieu, il est mythique et seule une recherche dans les légendes et les textes sauvegardés pourrait permettre de le retrouver aujourd’hui, ce qui est certain c’est qu’il fut en dehors de la zone maorie actuelle.
Il y a toujours une phase dans chaque civilisation où une culture technique doublée d’ une efficacité économique, alliées à une organisation religieuse et politique efficace donne naissance à un peuple dynamique. Ceci nécessite toujours un isolement originel.
La base de toute nation suppose une organisation familiale cohérente et prolifique. Ce point était assez facile à obtenir dans les civilisations anciennes lorsque les ressources alimentaires étaient abondantes. La tribu est un lieu de sécurité et de cohérence. Notre civilisation actuelle occidentale a produit un type de famille désordonné, stérile, qui n’a plus de bases solides. Dans notre monde moderne les dirigeants ont délibérément détruit la prolificité des membres de la tribu en dévaluant gravement l’organisation sociale patriarcale, en instaurant stupidement l’égalitarisme homme femme, en mettant les femmes au travail, en faisant la promotion d’un système éducatif long bloquant l’entrée des jeunes adultes dans la vie et surtout en ne donnant pas aux jeunes adultes l’obligation d’avoir une famille à eux. Le planning familial a eu pour tâche et l’objectif de supprimer le plus d’enfants possibles. Il s’agissait de concevoir tous les moyens abortifs appelés préservatifs. L’organisation sociale saine doit avant tout organiser les mariages et permettre la sauvegarde des enfants. Le système polynésien de gouvernement, de contrôle des mariages, de castes : noble, sacerdotale, guerrière, et sans mana (gens du peuple) instituant le don et l’échange des enfants entre parents et alliés en est une des bases essentielles. Ceci permit de forger ce Peuple et de le conserver malgré la colonisation destructive qu’il subit depuis l’arrivée des Européens dans ces parages.
Les polynésiens étaient et sont d’ailleurs restés généralement très industrieux. Leurs jardins produisaient en abondance des fruits et des légumes. Les ressources de la pêche étaient importantes. Ils possédaient aussi du bétail :cochons, poules, chiens et même rats parfois. Les grandes famines qui sont inscrites dans la tradition orale de certaines îles proviennent plutôt des sécheresses, des cyclones, des raz de marée ou tsunamis, de la destruction par la nature et parfois même les forces volcaniques de leur environnement. La sauvegarde de la société reposait sur le système des tabous permettant généralement aux chefs et aux prêtres de limiter les atteintes graves à l’environnement. Ainsi toutes les tribus possédaient souvent des territoires interdits que personne ne devait défricher. Les arbres sacrés étaient aussi tabous, protégés très sévèrement qu’ils produisent des fruits comestibles ou seulement du bois d’œuvre ou de combustion. Les animaux tabous n’étaient pas rares, comme les oiseaux essentiels pour assister les pêcheurs. Les plantations étaient organisées et soigneusement protégées. L’île de Pâques n’a pas su ou pu conserver ses grands arbres, surtout les palmiers qui n’existaient plus lorsque les Européens y arrivèrent. Les archéologues trouvèrent bien récemment encore des graines de ces grands palmiers cocotiers produisant des noix miniatures dans les cimetières et les grottes secrètes. Leurs racines sont encore présentes dans les sédiments mais les autorités de l’île avaient été assez inconséquentes pour laisser couper les grands troncs existants sans prévoir au préalable leur renouvellement. Sans doute que les rats avaient aussi préalablement dévoré la grande majorité des graines produites. La reproduction de ces plantes est difficile et leur installation hasardeuse, tant qu’ils ne sont pas arrivés à développer leur système racinaire. Il s’agit du plus grand et du plus gros palmier existant ; dont des forêts existent encore dans les contrées assez froides de l’Amérique du sud. (espèce jubalea chilensis).
L’homme vit en symbiose avec son milieu, il est un élément de la Nature, s’il détruit son environnement il se détruit lui même. C’est le rôle essentiel du pouvoir politique d’assurer la préservation des ressources naturelles. Il doit le faire avec vigueur. Les réserves de biosphère sont indispensables à notre survie. La Nature n’est pas malthusienne, c’est en la rendant telle que l’homme détruit le plus sûrement sa propre source de vie.
Nous voyons bien que notre soi-disant civilisation supérieure a accouché dans les dernières décennies d’un n’importe quoi en détruisant la famille. L’individualisme sur lequel on a trop modelé les lois et les règles a détruit la base solide de la civilisation, la famille seule est éternelle, l’homme est destiné à mourir, et ceci est programmé. La famille est une construction civilisatrice, la force d’une Nation y réside. Chacun devait entretenir cette richesse essentielle.
La civilisation de la pierre polie nommée parfois néolithique était celle des polynésiens, elle a pratiquement disparu au contact de la culture européenne. Nos ancêtres d’Europe possédaient eux aussi primitivement cette culture jusqu’à l’arrivée de l’âge des métaux. Le bronze d’abord, puis l’acier s’imposèrent dans nos contrées. Seulement ceci s’est déroulé chez nous il y a plus de trois mille années.
La révolution industrielle nous a mis en danger d’extinction et obligés à des mutations étranges.
Et notre civilisation présente a aussi détruit notre culture en grande partie en éliminant les métiers et les productions artisanales locales. On ne trouve plus guère de forgeron par exemple dans nos campagnes. Et les principaux métiers techniques ont disparu subitement. Les Polynésiens firent cette révolution en un siècle seulement ils passèrent du néolithique à l’ère du moteur à explosion. Curieusement ils ne gardèrent pas les outils et les œuvres d’art anciens même en souvenir. Nous n’avons pas fait mieux d’ailleurs semble t’il.
Les outils d’acier remplacèrent ceux de pierre dures volcaniques, de nacre, dents de requin et d’obsidienne, les Dieux anciens furent éradiqués, effacés des mémoires, les objets des cultes anciens furent bannis, les « soi-disant » idoles religieuses furent détruites ou brûlées, les prêtres pourchassés, persécutés. A Tahiti ce fut sur l’ordre du Roi : Pomare II que cette stupidité eut lieu après que ce Prince non dénué de sens politique, se fit baptiser dans l’espoir chimérique de conforter son pouvoir et celui de la dynastie qu’il prétendait promouvoir.
Cette colonisation est critiquable. Si on se réfère aux idées assez dévoyées et déviantes colportées aujourd’hui par nos maîtres de philosophie et nos autorités diverses. Les principes des droits des humains que nous mettons en avant aujourd’hui démontrent surtout notre hypocrisie et notre incapacité à être fier de notre civilisation qui a quand même franchi une étape vers le sommet de la connaissance, ce qui a réduit notablement les guerres tribales, supprimé la consommation habituelle de chair humaine. Notre civilisation s’est imposée par la force militaire et par la religion qui sont supérieures à l’existant polynésien. Même si nous sommes très pauvres de culture authentique désormais parce que le fastfood intellectuel très partiel qu’on nous sert est une régression lamentable de notre propre identité.
Notre vie actuelle est une transition, une trahison assez sombre.
Le colonialisme s’est incrusté en nous, l’incertitude vient de mauvaises lois et de conditionnements voulus par nos autorités politiques. La séparation de l’Eglise et de l’Etat, le sinistre constant du socialisme sous toutes ses formes les plus stupides, l’immigration massive de populations allogènes inassimilables sur notre territoire tout ceci nous ronge , nous affaiblit et détruit notre identité. Car en vérité ce qui compte c’est la culture, c’est l’identité. On nous colle une identité qui nous est étrangère et qui ne correspond plus à rien, une identité de melting pot. Nous sommes les « Locaux » du Pays de France, colonisés par des envahisseurs, nos colons Arabes avec arrogance nous traitent même de Gaulois. Nous sommes en perte d’identité plus que les Maoris qui eux se raccrochent avec rage désormais aux bribes de leur culture qui ont été sauvegardées par les documents laissés par les explorateurs et quelques collectionneurs. Devons nous sauvegarder les savoirs néolithiques ici, en prendre exemple et nous aussi revenir à nos vraies valeurs ? Et nous aussi aspirer à l’indépendance ?
Il reste quelques ethnies Papous et quelques tribus d’Amazonie qui vivent encore au néolithique de nos jours, mais la fin de leur civilisation est programmée. Seule l’Inde semble t’il souhaite encore sauvegarder le dénuement heureux des indigènes nommé aborigènes ce qui est dérisoire, car nous qui sommes d’une longue généalogie occupant et faisant fructifier ce Pays nous sommes tous des aborigènes, et les colonialistes qu’il y a parmi nous ne le sont pas évidemment eux et le plus souvent ils nous traitent comme des indigènes c’est-à-dire avec mépris et rapacité, ils pillent nos biens et détruisent nos valeurs.
Eux ils se disent ironiquement citoyens du monde, bien sûr ils se fichent de nous, ils savent bien qui ils sont eux, les colonialistes…
Les Négritos des îles Adaman, et les aborigènes Veda pourront peut-être sauvegarder leur culture, mais j’en doute, l’Etat croyant faire bien, prendra leurs enfants et en fera de bons Indiens ou Indous modernes. Partout on suppose encore que les Indigènes que nous appelons et supposons primitifs doivent recevoir notre civilisation que nous supposons toujours bénéfique et que ces humains doivent s’adapter à notre culture. On en fait des clochards auxquels on réserve des terres les plus ingrates de leurs territoires ancestraux qu’ on leur attribue parfois avec un certain mépris. Des réserves pour des gens qu’on considère comme des humains inférieurs, ce qu’ils ne sont bien sûr jamais. Il est vrai que leur existence nous paraît misérable en comparaison de nos avantages actuels apportés par nos moyens techniques. Oui nous avons été injustes dans le passé envers nos frères des autres cultures. Ces hommes étaient intelligents, habiles, forts, pétris de principes moraux. Héritiers des civilisations millénaires que nous avons irrémédiablement et délibérément détruites. Ils étaient même parfois heureux dans leur existence si difficile, si précaire.
On parlera bien sûr de leur anthropophagie. Ils se mangeaient entre eux, et la chair humaine était même réservée aux nobles, tout comme l’était la chair des tortues, et les autres mets de choix.
Leur propension à manger habituellement la chair de leurs ennemis, nous semble bien condamnable, mais notre préjugé à ce sujet est idiot. Le cannibalisme est sans doute la meilleure manière de résoudre le problème de recyclage de la matière vivante que l’homme monopolise. Actuellement l’homme est le seul vrai prédateur de l’homme, comme il l’était de tout temps dans les îles. Dans la nature presque tout ce qui se mange sera détruit par et pour l’homme. Si nous voulons sauver la nature il faudra bien un jour arriver à limiter le nombre d’humains et manger la chair des humains n’est sans doute pas hors de notre portée. Pourquoi est ce les vers, les mouches et leurs asticots, les bactéries et les champignons qui mangent la chair des humains et la décomposent ? Pourquoi brûler sur des bûchés les bonnes protéines ? L’homme moderne est une vraie catastrophe pour la Nature même lorsqu’il recycle ses déchets innombrables, et il continue à contaminer la terre avec ses cadavres. Les Maoris laissaient les cadavres de leurs morts sur des estrades, souvent protégés des pontes d’insectes par de la fumée, protégés par des tapas à l’abri des éléments et du soleil se dessécher lentement. Puis lorsqu’il ne restait plus que les momies ou les os purifiés par le soleil et les fumées, ils les rangeaient soigneusement dans les cimetières familiaux, les ahus familiaux situés sur le marae, ou même dans une partie de la case familiale. Avec les os de leurs ancêtres ils fabriquaient aussi parfois des armes, des hameçons, des flûtes comme leur ancêtre le demi Dieu Maui qui fit son hameçon magique à partir de la mâchoire de sa grand-mère.
Les maoris mangeaient assez souvent leurs ennemis, et peu souvent semble t’il leurs proches décédés, coutume encore assez fréquente chez les Papous. Ces derniers s’ils étaient destinés à être soignés comme des divinités n’étaient pas enterrés, mais exposés sur des estrades dans des zones taboues de maraes puis remisés dans des lieux sacrés. Le cannibalisme en Polynésie ne fait pas de doute. Il était pratiqué surtout par la caste dominante masculine, et même certaines femmes de haute lignée y participaient parfois. Les victimes dégustées étaient le plus souvent des ennemis courageux et les consommer c’était assimiler leur force et leur mana. Souvent le nom des victimes devenait tout ou partie du nom de celui qui l’avait tué au combat. Mais souvent le Roi ou les Prêtres désignaient un homme du peuple, un manahune (dénué de mana) comme victime, et c’était le plus souvent celui qui avait insulté , fait du désordre ou qui avait transgressé un tabou, il était alors abattu par surprise sur le marae et mangé aussitôt, le plus souvent cuit dans un four, mais aussi dépecé et mangé cru. La chasse à l’homme dans les territoires ennemis ramenait plus souvent des enfants, des vieillards, des femmes que des guerriers qui eux savaient se défendre et étaient sur le qui vive. Il est difficile de savoir si ce cannibalisme existait primitivement chez les Lapita, ou s’il a été induit par le contact avec les Papous, les Mélanésiens qui semblent même le pratiquer depuis toujours. L’humain sacrifié est appelé partout « le cochon long » dans la terminologie ancienne, ou même le poisson (ika). Il y avait aussi le sacrifice des chiens « kuri » et les souris ou rats polynésiens « kiore » qui servaient de nourriture à l’occasion. Les chiens et les rats polynésiens sont originaires d’Asie. Le chien est proche des races de l’Inde et de l’Australie, qui ont donné le dingo actuel dans ce continent.
Le porc maori pourrait provenir de Nouvelle Guinée essentiellement, en fait il est commun à toutes les populations des îles. Sa génétique doit permettre de le définir car il reste encore des exemplaires redevenus sauvages qui n’ont pas été fortement croisés avec les porcs européens. Et qui sont chassés partout. Nous parlerons plus longuement du poulet polynésien qui lui vient d’Inde et qui était présent partout, redevenu sauvage dans presque toutes les îles hautes.
En ces temps anciens où Make Make était arrivé dans les îles, les hommes ne connaissaient que les radeaux de bambous et de troncs, ainsi que les canots à rames, et c’est le Dieu lui même qui leur montra comment assembler l’un sur l’autre, le doter de voilure et fortifier l’ensemble pour aller au delà de l’horizon. Make Make utilisa pour tracer sa voie dans l’infini de l’Océan Pacifique (Moana) les frégates apprivoisées qu’il nourrissait de sa pèche, lorsqu’il partait au large, il emportait toujours ses oiseaux qui nichaient même au sommet de son mât dans une sorte de nid. Lorsqu’elles montaient dans le ciel les frégates pouvaient repérer les terres bien longtemps avant que les hommes ne puissent les distinguer de la surface. Parasitant les autres oiseaux marins ces animaux foncent aussitôt qu’elles les aperçoivent vers les îles pour y voler le poisson pêché par les autres oiseaux marins. Les maoris utilisaient parfois cette habitude pour situer les îles et trouver la route à suivre. Le plus souvent les grandes frégates revenaient ensuite vers le navire pour nourrir leur progéniture qui y était restée.
Les découvreurs de terres maoris utilisèrent aussi d’autres espèces d’oiseaux comme les sternes, et les paille en queue pour leur prospection, ils en suivaient les migrations. Chaque grande tribu entretenait des initiés aux techniques de découverte et de survie pour avoir des explorateurs efficaces. Ils parcouraient l’océan tirant toutes leurs ressources de leur pèche et de leur chasse aux mammifères marins. Ils emportaient avec eux des fruits, des boutures d’arbres, et des exemplaires des plantes alimentaires qu’ils avaient trouvées dans leurs voyages. Et aussi et surtout des réserves importantes d’eau douce. Ils se dirigeaient en fonction des courants, de repères situés sur terre, mer et de la lecture des étoiles, de la lune et du soleil. Cette civilisation originale peupla facilement toutes les îles habitables souvent situées à des milliers de kilomètres de leur base de départ, elle survécut jusqu’à l’arrivée des européens. Au 16ème siècle arrivèrent d’abord les Portugais, puis les Espagnols. Au 17ème siècle les Anglais, les Hollandais, les Français. La confrontation des deux cultures (européenne d’une part, maorie d’autre part) amena très rapidement la destruction presque totale des bases sacrées de la société maorie. Le plus qui en est resté nous est connu par Tonga, la Nouvelle Zélande (Ao tea Roa) et surtout semble t’il par l’île de Pâques ; la terre colonisée par Hotu Matua qu’il nomma le nombril du monde en souvenir du mythe de Make Make. Hotu Matua venait de Hiwa, la terre de la création de l’homme ancien, qui n’est sans doute pas un continent, mais une grande île. Sa description ne ressemble pas à l’Australie, seule la Nouvelle Guinée semble correspondre à la terre de la tradition, mais les sources archéologiques n’incitent pas à penser à son occupation ancienne par les maoris, même si une présence constante semble observée depuis l’arrivée des Lapita. Si on se réfère aux animaux domestiques possédés par les immigrants, le coq bankiva qui est originaire du sud de l’Inde jusqu’en Malaisie est emblématique. Ce volatile a donné le nom des Celtes de France pour Jules César, galus est le nom du volatile, Galus celui de l’indigène celtique. Il faut croire que les Celtes sont allés jusqu’en Inde pour en rapporter cet animal domestique, qui semble les avoir caractérisé.
Le coq, longtemps avant notre ère était présent presque partout en Asie comme en Occident. Les Aryens détruisirent semble t’il la civilisation existante dans la zone de l’Indus vers deux mille ans avant notre ère lors de leur arrivée dans le sous-continent. Une tradition qui semble ancienne en Polynésie prétend qu’une partie de leurs ancêtres vécurent longtemps dans le delta d’un grand fleuve et que leurs voisins cultivateurs cultivaient une céréale poussant dans l’eau des lagunes, sans doute s’agit il du riz sauvage poussant dans les lagunes et les marais. Ce peuple fabriquait aussi des poteries.
On a prétendu parfois en étudiant l’ile de Pasques qu’Hotu Matua serait venu des îles proches Gambiers, ou Marquises, Mangareva s’attribue même la destruction de la tribu qui construisit les Moais, ceux qu’on nomme les « Longues Oreilles » dans les mythes pascuans. La probabilité serait plus forte pour les Marquises, dont une île porte d’ailleurs le nom de Hiwa Oa qui s’est conservé jusqu’à nos jours. L’archéologie semble indiquer que l’archipel des Marquises fut occupé vers 1500 avant notre ère chrétienne, soit bien avant l’archipel de la Société qui étant pauvre en matériel lapita ne paraît pas même avoir été colonisé lors des premières implantations. Ce serait bien sûr une grande surprise si c’était le cas, il est nécessaire de réaliser des fouilles permettant de retrouver les traces des installations des premiers arrivants. Les foyers de colonisation étaient sans doute nombreux lors de la colonisation, et on peut même penser que des pirogues à rames toutes simples ont pu faire les grande traversées nécessaires, longtemps avant l’invention des catamarans de haute mer progressant essentiellement par leur voilure. Personne ne croit plus que des Amérindiens vinrent s’établir à l’île de Pâques comme le pensait et voulait le démontrer Thor Heyerdahl avec son voyage du Kon Tiki. Ces explorations venant d’Amérique étaient bien sûr possibles, le fait qu’elles aient eu lieu n’a pas encore été démontré. Pourrait on trouver une différence entre les deux races mythiques de l’île ? simplement en analysant les pièces osseuses des squelettes disponibles ? c’est fort improbable mais l’ADN pourrait permettre cette étude.
Une étude des empreintes génétiques des deux populations anciennes si elle est encore possible à partir des ossements anciens qui se sont conservés dans les grottes et les ahus sacrés démontrerait sans doute l’origine commune de tous les Pascuans. Faire venir Hotu Matua de Nouvelle Guinée peut sembler aujourd’hui presque improbable. La traversée aurait duré de trop nombreux mois avec plusieurs escales nécessaires dans des îles situées tout au long du périple. Le régime des vents s’y oppose aussi. Il faut savoir que les vents d’est en ouest sont dominants presque toute l’année dans les zones traversées par les migrations et qu’il fallait de préférence utiliser des vents d’ouest en est pour effectuer le voyage de l’Asie vers les îles du centre de l’océan Pacifique. Les grandes pirogues doubles utilisées pour les migrations remonteraient assez mal au vent, d’après les spécialistes de navigation, ce qui est assez peu crédible ; car il semble bien qu’elles pouvaient utiliser correctement les vents de travers et louvoyer avec des vents d’est, leur marche aurait été trop lente pour atterrir à 10 000 kilomètres de leur point de départ, une étape de mille cinq cent kilomètres semble le maximum envisageable à couvrir pendant la courte période des vents favorables. Il n’est pas envisageable pour nous qu’une migration ai pu voyager sur la mer pendant trois ou quatre mois. Or l’exode d’Hotu Matua dura d’après la légende neuf mois, le temps d’un enfantement. Il voyagea avec quelques étapes intermédiaires dans des zones habitées, lui permettant de refaire ses provisions en eau et nourritures. La légende explique que lorsqu’il toucha terre, sa femme, mit au monde l’enfant conçu lors du départ. Comme on pense aussi sans doute à tort d’ailleurs qu’il n’y avait qu’un navire dans cette migration il est probable que le vaisseau était divisé en deux parties. La main droite était celle des hommes, l’autre partie celle des femmes et des enfants.
C’est donc ainsi que les choses se passèrent dans notre récit. Sans doute est ce une faiblesse de notre part de prétendre une chose qui semble si improbable pour nos spécialistes actuels des navires anciens de la Polynésie. Ceux ci ont une piètre idée des qualités nautiques des voiliers, et font des pronostics assez stupides sur la qualité des navigateurs maori. Malgré les démonstrations faites par les reconstitutions modernes de ces navires nous avons encore des doutes qui peuvent être légitimes à ce sujet. Les reconstitutions faites ne tiennent pourtant pas compte de la culture des anciens navigateurs, mais seulement de l’état de cette culture lors des découvertes européennes, alors même qu’il n’y avait plus de grandes migrations depuis des centaines d’années et donc que ces techniques étaient alors ignorées et en sommeil, comme l’usage des poteries qui avait disparu de toute la Polynésie.
Mais aucun doute n’existe pour ce qui concerne la capacité de cette civilisation à former des marins capables d’affronter la mer. Et ceci par une initiation que très jeune ils obtenaient de maîtres techniciens et de savants des étoiles et de la navigation, les Tahungas, qui étaient aussi le plus souvent des prêtres inspirés. Ils avaient des cartes du ciel et aussi celles des îles et ils apprenaient par cœur leurs données.
Je prétends et démontre dans ce texte qu’un adolescent polynésien naufragé qui aboutit dans une île déserte possède la culture nécessaire pour construire de ses mains en quelques semaines de travail une embarcation qui lui permettra ensuite de traverser l’océan Pacifique, de visiter plusieurs îles sur son chemin et d’atteindre l’île du bout du monde dont il ne connaît la situation que par le récit des aventuriers qui ont été l’explorer. Je ne pense pas d’ailleurs qu’il s’agisse d’un grand exploit, et je crois même que n’importe quel Ariki initié savait alors faire ces travaux.
Nous avons tous en mémoire nous autres Européens civilisés, le livre de Robinson Crusoé. Avec tout le matériel moderne dont il dispose, Robinson est bien incapable de construire un bateau utilisable en plusieurs années pour rejoindre une terre habitée, il ne s’y essaye même pas d’ailleurs, s’il avait été charpentier de marine, il aurait pu facilement en construire un, mais aurait-il su alors naviguer avec précision et trouver son chemin. Un Maori qui ne disposait que des outils les plus simples qu’il fabrique d’ailleurs très facilement avec les matériaux disponibles dans la nature en employant des technologies néolithiques disposait lui des connaissances techniques qui lui permettaient de le faire facilement. Bien sûr l’immensité de la mer fait peur, aux non initiés surtout et la solitude semble toujours une chose affreuse à vivre, tant qu’on n’a pas acquis les connaissances permettant de s’en accommoder. Et Teagi lors de son naufrage n’y échappera pas. S’il n’avait pas disposé des connaissances techniques de son peuple, il n’aurait pu réussir cette épreuve. En perdant ces connaissances nous avons aussi détruit nos coutumes et notre rationalité est atteinte dans sa base. L’humain est une partie de la Nature, et la seule chose qui vaille est de rester dans cette liaison. Nos ancêtres traités parfois de barbares avaient aussi des connaissances extraordinaires, même lorsqu’ils ne vivaient de la chasse, ils savaient survivre fort agréablement dans des environnements dans lesquels nous serions bien incapables de survivre quelques jours actuellement avec nos connaissances. Cette culture ancienne détruite par la civilisation moderne est notre identité véritable, elle repose sur des compétences et des exercices matériels qui ont disparu, mais qui sont sacrés car il s’agit de nos secrets d’humains vivant en harmonie avec le milieu naturel. Sachons donc les conserver et retourner à l’état de nature. La culture polynésienne peut nous y aider bien sûr, elle aussi est universelle.
Ce n’est pas d’aujourd’hui que les peuples migrants viennent des extrémités du monde pour coloniser la frontière ultime.
La civilisation maorie permettait facilement à un peuple entier de plusieurs centaines d’immigrants de se déplacer dans toute la Polynésie en une seule migration. D’aller de Hawaï jusqu’en Nouvelle Zélande aller et retour sur leurs grands vaisseaux utilisés presque exclusivement pour les migrations capables d’emporter chacun plus de cent personnes avec leurs biens essentiels. Des flottes de plusieurs navires progressaient de conserve pour pouvoir se porter secours en cas d’avarie. Mais ceci n’a pas été retenu par la tradition. Même lorsqu’il s’agit de coloniser la Nouvelle Zélande bien qu’on parle de la grande flotte et que chaque tribu maorie de Nouvelle Zélande a pris le nom d’une embarcation de cette armada.
Traverser tout le Pacifique, ils pouvaient l’accomplir en une seule étape ou en plusieurs si ceci était souhaitable notamment pour refaire les provisions de vivres frais. Mais ils savaient aussi tirer les ressources nécessaires du grand large, y vivre en pêchant, en recueillant l’eau douce des averses. Souvent nous oublions que nos ancêtres pratiquaient quotidiennement sans effort ce que nous apprenons seulement à faire avec grandes difficultés pendant nos stages de survie militaires. Notre civilisation est d’une autre nature. Nous sommes devenus des hommes incapables de vivre dans la nature sans nos outils techniques actuels, et nous sommes bien en peine de créer les outils dits primitifs avec les moyens disponibles sur le terrain, retrouver les techniques nécessaires ne serait pas si facile.
Nous savons que les explorations systématiques se faisaient avant toute émigration, comme ce fut le cas pour l’exploration de l’île de Pasques.
Des navires bien plus petits, mais tout aussi sûr et même sans doute beaucoup plus rapides permettaient aux explorateurs de découvrir les terres éloignées. La rapidité de ces embarcations était telle d’ailleurs que les escadres européennes lors de la découverte étaient distancées à presque toutes les allures par elles malgré la faible surface relative de leurs voilures en pandanus tressé. L’utilisation de catamarans nous est familière aujourd’hui, leur vitesse et leur stabilité supérieure nous sont démontrées tous les jours par les courses sportives autour du monde. Les polynésiens utilisaient plusieurs types différents de navires. Presque tous se composaient pour l’essentiel de coques construites à partir de pirogues taillées dans un tronc, et de planches reliées entre elles par des liens de fibres de cocotier, calfatés avec diverses gommes d’arbres, le plus souvent par la sève de l’arbre à pain (uru) et même par divers ciments tirés de la chaux produite à partir du corail. Les fibres enduites de poix utilisées étaient forcées, introduites entre les planches. Le tout très solide et très marin. On utilisait les coques profilées pour réaliser les principaux flotteurs. Ces coques étaient renforcées par des armatures et des membrures chevillées. Lorsqu’on manquait de grands arbres ces coques étaient même surtout construites à partir de planches comme on le voit sur les gravures des pirogues qui subsistaient dans les îles qui ne disposaient pas des grands arbres nécessaires. Ces esquifs étaient alors bien plus fragiles. Les très grandes pirogues étaient souvent construites de deux morceaux reliés au centre par des menuiseries très fortes ou une partie de pirogue bien chevillée aux deux coques.
Pour produire les planches les peuples du néolithique commençaient généralement à brûler le bout d’une bille de bois choisie sans nœud important. Il faut que l’espèce d’arbre s’y prête. Puis ils inséraient des coins de bois dur ou de toutes sortes de cales qu’ils frappaient régulièrement de chaque côté pour fendre une face de la planche, et de la même manière ils fendaient ensuite ou en même temps l’autre face. De grande planches d’une dizaine de mètres de long, jusqu’à plus de trente centimètres de large pouvaient être ainsi produites. Cette technique est connue dans les civilisation néolithiques comme on a pu le constater dans les vestiges des villages établis dans les marais ou les lacs. Les planches ainsi produites étaient ensuite planifiées et rectifiées à l’herminette pour être fixées et aboutées aux éléments des pirogues. Les architectes navals maoris n’étaient pas démunis, ils avaient des éléments solides, légers, flexibles, et ils savaient les ajuster avec précision.
Le clou de métal étant inconnu était remplacé parfois par le chevillage d’éléments réunis par tenons et mortaises soit avec du bois dur lorsqu’il n’y avait pas de forces de cisaillement en jeu, complété le plus souvent lorsque c’était le cas par des liens en fortes cordelettes tressées. Les assemblages ainsi obtenus n’étaient pas souvent très étanches. Malgré les joints toujours réalisés par des fibres diverses enduites de liants divers disponibles souvent tirés de la sève des arbres. D’autre part étant bas sur l’eau ces navires embarquaient beaucoup lorsque les vagues se brisaient de travers malgré les pontages des pirogues de pleine mer qui souvent ne résistaient pas à ces coups de boutoir. Ces navires étaient souvent conçus pour que les rameurs puissent participer à la propulsion, installés sur des bancs situés dans les flotteurs. C’est pour cette raison principale que l’écopage était une des tâche essentielle, assurée en plusieurs postes prévus dans les plans de construction sur les grands navires, qui avaient généralement l’essentiel de la quille taillée dans un tronc unique, évidé, ou plusieurs parties de troncs mis bout à bout. La principale faiblesse de ces pirogues provenait de la faible épaisseur du bois, l’épaisseur d’un doigt tout au plus, même lorsqu’il y avait des sortes de membrures sculptées pour renforcer les bords, cette faible épaisseur les faisait éclater même lors de leur construction qui devait se faire à l’abri du soleil, le bois étant constamment aussi mouillé pour éviter ces catastrophes, éviter le plein soleil était aussi nécessaire lorsque la coque était tirée sur le sable, il fallait impérativement protéger les coques du soleil par la création de hangars.
La finition se faisait par le passage d’un feu sur toute la surface ce qui permettait de rectifier la forme et de terminer l’ouvrage. Ces navires n’étaient pas pour autant fragiles et difficiles à conduire.
Leur grande souplesse les faisaient coller à la vague et même si ceci finissait par démembrer et user les composants, la sauvegarde des éléments essentiels pouvait être assurée lors du voyage. La poupe et la proue étaient généralement constituées des éléments rapportés, sculptés de motifs mythologiques, encastrés solidement sur les pirogues.
Les navires polynésiens nous semblent fragiles, d’après nos normes. Or l’étude expérimentale prouvera lorsqu’elle sera faite sérieusement que ce n’était pas le cas. Ces navires pouvaient généralement sans grand dommage subir des pires tempêtes et même des tornades en pleine mer, les mats étaient alors descendus, les flotteurs se remplissaient d’eau, chacun des passagers s’étant amarré, ainsi que chaque élément de la cargaison étant solidement fixée, il suffisait d’attendre que la tempête passe. Aucune tempête ne dure infiniment , d’autre part il est certain que ces esquifs pouvaient aussi traverser des zones de tempête sans problème en utilisant les ancres flottantes qui maintiennent la poupe dans la direction des rouleaux des vagues et donc limitent la casse.
La pire des chose pouvait arriver lorsque la coque se brisait souvent à une liaison , mais même dans ce cas là elle était généralement réparable, et elle n’allait pas au fond étant plus légère que l’eau. Examinons ce qui se passait lorsque la tempête se déclenchait.
La voile principale était souvent mise en panne, puis enroulée et fixée solidement. Il existe deux sortes principalement de voiles. La première a une forme d’aile d’oiseau, longue elle est difficile à manœuvrer contre un vent violent, la mettre dans le vent permet de conserver fermement une direction. La seconde est triangulaire, ou trapézoïdale, établie entre deux vergues basse, elle doit être repliée au maximum.
Une ou deux ancres flottantes étaient alors jetées à l’arrière du navire pour le maintenir face aux vagues. Enfin les rameurs pouvaient diriger le navire si c’était nécessaire dans le mauvais temps. Alourdi d’eau le navire pouvait aussi difficilement se retourner. Démembré quelque fois il restait unis par ses câbles et pouvait être réparé sans problème une fois le calme revenu.
Cet assemblage de radeau et de pirogue permit il y a six mille ans aux ancêtres des polynésiens de découvrir les terres isolées de l’océan. Les navires radeaux utilisés pour les migrations dans les sagas portaient un clan d’une centaine de personnes, et se regroupaient souvent à plusieurs formant généralement une escadre. La migration d’Hotu Matua ne comportait pas une flotte importante et se limitait semble t’il au maximum à deux navires. Lorsque les conditions étaient favorables ils naviguaient souvent de conserve et même côte à côte même amarrés l’un à l’autre. Par mauvais temps ils se séparaient, lorsqu’un banc de poisson était rencontré ils jetaient des filets ou des lignes. Au centre était dressée la demeure faite d’un assemblage de fines poutrelles et de vanneries tressées pour le roi et sa famille. Des immenses paniers étaient solidement amarrés dans des filets de cordages tout à l’ alentour, leur contenu hétéroclite allant des provisions de bouche, aux indispensables noix de coco, aux principales réserves d’eau, de grandes outres de peaux cousues, tannées, enduites de colle végétale ou même de goudrons provenant de la sève caoutchouteuse de plusieurs arbres dont celui de l’arbre à pain (uru), contenues dans des citernes en vannerie, ou en bois. La migration d’Hotu Matua comportait deux divisions, qui représentent aussi la division de la société à cette époque. L’un emportait le roi et ses fils, l’autre l’épouse du roi et la famille alliée. Cette division se conformait aux usages sacrés et à la division de la société lors des migrations. Le navire de la reine était sans doute identique à celui d’Hotu Matua, nous reviendrons sur cette division des expéditions de conquête, car une grande pirogue pouvait comporter aussi cette division. Et il est peu probable que les navigateurs se privaient des relations sexuelles pendant ces migrations, mais aucune source disponible ne le précise. Lorsqu’il abordèrent à l’île de Pâques la reine mit au monde le futur héritier du royaume. On sait que le titre de Roi (Ariki nui) était transféré au fils du Roi lorsqu’il naissait, ou le plus souvent qu’il était entré dans la catégorie des hommes. Son père devenait alors son conseiller et gouvernait pour lui en son nom. Le mana du Roi passait à son fils. Tout était signe provenant des Dieux immortels alors, et ceci prouvait que le mana du roi fonctionnait. La maison des hommes était alors toujours différente de celle de leurs femmes. Lorsqu’il n’y avait qu’une habitation pour tout un clan mais elle était divisée généralement dans le sens de la longueur, les femmes et les petits enfants se trouvaient à une entrée, les hommes avaient eux une entrée qui leur était réservée. Et pendant les périodes où ils vivaient ensemble sur un bateau ils ne devaient pas plus cohabiter, une place était réservé pour chacun selon son rang et son sexe. Il y avait des lieux réservés au roi et à son entourage fait de serviteurs, généralement guerriers de sa garde, d’un conseiller porte parole et des techniciens et savants : les tahungas. Une case établie au centre du navire comportait toutes les images et les objets sacrés dans leurs coffres pirogues. Un européen nota que la grande case du principal chef de l’île de Pâques avait prés de cent mètres de long, sur trois mètres de large. La division de l’espace fut aussi remarqué. Il y avait aussi une case réservée aux femmes qui avaient leurs règles ce qui était peu fréquent pour les femmes mariées qui soient allaitaient, soit étaient enceintes le plus souvent. Mais ceci était le lot commun des filles des nobles surveillées jalousement par les matrones du clan, souvent elles restaient enfermées dans des cases ou des grottes à l’abri du soleil jusqu’à leur mariage, pour conserver leur teint clair, jusqu’à ce que l’homme à qui elles étaient destinées les emmène dans sa tribu.
A l’entour se trouvaient les familles de la tribu, femmes et enfants, endormis sur des nattes, à leurs côté s’étalaient dans des filets de corde attachés aux poutres du plancher toutes leurs affaires personnelles, des calebasses, des grands paniers de vannerie contenant des taros, des régimes de banane, des ignames, des noix de coco, des plants de bananiers, des boutures de canne à sucre, des plants de l’arbre à pain, de santal, de tiare. On voyait aussi des poules et des coqs dans des cages. Après dix jours de navigation sur la ligne du soleil vers l’est, le pilote inspiré des Dieux, Ira avait pris la direction d’une étoile particulière parue sur l’horizon pour rejoindre un courant marin se dirigeant vers de petits îlots coralliens inhabitables.. Il prendrait ensuite un autre cap qu’il avait consigné sur son tapa et ses cordelettes mémoires semblables aux kipus trouvés en Amérique.
Teagi le fils aîné du roi se tenait assis sur le pont appuyé aux montants de la case royale. Le fiu, (prononcez fiou) ce cafard caractéristique des océaniens habitait le jeune maori. Son cœur se serrait ,il aspirait avec difficulté l’air chargé d’embruns ,une sorte de nausée l’emplissait, faisait blêmir son teint sombre ocré naturellement luisant de la fine onction de l’huile de coco et du bois de santal réduit en poudre. Le monoï indispensable sous ces climats où l’action du soleil est redoutable. Ses tatouages faciaux bleutés se révulsaient légèrement, le regard mélancolique sombrait dans un sorte d’ivresse triste pendant que la poussée des larmes contenues apportait une douceur étrange sur le visage de l’adolescent . Prince du sang, guerrier et initié par les prêtres et savants à la magie et aux sciences secrètes de la communication avec les Dieux, il possédait le mana transmis à toute sa famille par les Dieux. L’adolescent avait quinze ans, mais était déjà d’une taille élevée et d’une stature imposante comme tous les membres de sa famille. Il était assis près de l’autel de la case royale devant les poteaux portant les effigies des Tikis , peints en rouge et ceints de feuillages et de plumes rouges. S’y trouvait aussi une pierre provenant du sanctuaire (marae taputapuatua de Hawaïki) d’origine de sa famille et des os des ancêtres dans des sacs de vanneries et les grands umete taillés comme des barques miniatures dans un tronc de miro. Un vaste manteau de fibres tressées, décoré de plumes vertes et rouges couvrait ses larges épaules .
Ses cheveux de jais étaient relevés en un chignon volumineux .Le fils du roi ne pouvait couper ses cheveux avant de devenir roi lui même, chose qui arrivait lorsqu’il atteignait l’âge adulte, se mariait et héritait alors du pouvoir royal. Teagi n’était pas devenu Ariki nui à sa naissance et ne le deviendrait sans doute pas dans la nouvelle patrie. Son mariage n’avait pas été décidé par le Roi, les Dieux étaient restés muets à ce sujet…
Il était destiné à acquérir la magistrature magique, celle de l’homme oiseau faisant le pont entre les hommes et les Dieux immortels.
L’esprit embué des souvenirs de sa jeune vie, le prince maori songeait à cette future promotion qui lui reviendrait une fois le peuple d’Hotu Matua débarqué sur cette île prédite par le voyant, que sept initiés avaient reconnues et qu’il faudrait peut être conquérir par la guerre, si d’autres hommes s’y étaient installés depuis l’exploration.
A son cou pendait un ornement de jade taillé venant de la terre de naissance de son père Ao Tea Roa, (le grand nuage :la Nouvelle Zélande actuelle) ,l’île que découvrit Kupe le hardi navigateur, ou vivaient des gigantesques oiseaux, les moas, des ratides, oiseaux gigantesques plus grands que des hommes. Les Maoris avaient peu à peu conquis le sol, repoussant et domestiquant les indigènes nommés Moriotis littéralement les gens du pays arrivés dans ces parages depuis des siècles, essentiellement des chasseurs, ne sachant pas cultiver la terre, venus là depuis des générations et vivant dans un dénuement presque complet.
Dans ces terres australes ne poussaient ni le taro, ni l’arbre à pain, à l’extrême sud seulement survivaient quelques cocotiers. Les cultures étaient très difficiles jusqu’à ce que le kumara (patate douce provenant avec certitude d’Amérique du sud) y fut acclimatée. La canne à sucre et les bananiers n’y poussaient pas facilement. La chasse des mammifères marins, la pèche, le gibier local constitué de plusieurs espèces de volatiles gigantesques les moas, (c’est le même nom qui est employé pour définir les poulets) fournissaient l’essentiel de la nourriture. Il y faisait souvent froid surtout pendant la période hivernale. La vie y était très rude par rapport à celle des îles d’origine comme Hawaïki (Raiatea, Huahine) le centre du Pacifique ou se trouvait le centre culturel du peuple maori dans l’île actuellement nommée Raiatea (ciel lumineux) surtout ou se trouve encore le marae le plus sacré celui qui serait même à l’origine de tous les marae. Le père de Hotu Matua venait de Hawaïki et il alla vers Ao Tea Roa avec une migration de peuplement et d’échange. Il y devint par ses exploits et son mariage un grand chef d’une tribu et y mourut dans une des guerres de clans qui ravageaient cette contrée. Les historiens pensent que la Nouvelle Zélande a été colonisée à partir de Tahiti vers le 12 -ème siècle seulement, ce qui contredit aussi la chronologie de ce récit. Il semble bien que ceci ait eu lieu au moins deux siècles plus tôt, il y avait aussi une population plus ancienne à leur arrivée. En Polynésie française une énigme aussi fait de Tahiti une des dernière terre colonisée. On suppose même qu’elle le fut à partir des Marquises.
Des fragments de poteries ont été découvertes sur les sites archéologiques des Marquises (fenua enata : la terre des hommes) or la poterie a disparu avant le 8ème siècles de toute la Polynésie, et elle ne fut jamais très abondante dans les îles hautes, on doute même qu’elle était produite aux Marquises, elle ne s’est conservée qu’en Nouvelle Guinée dans la vallée du Sepik semble t’il. Il est possible d’ailleurs qu’elle y était déjà présente avant l’arrivée des Austronésiens et des éléments du peuple maori qui emportaient la céramique dite Lapita. Des archéologues qui ont commencé le vaste travail d’études des restes fossiles des îles du Pacifique, pensent que les populations négroïdes papous ( installées depuis plus de vingt mille ans en Nouvelle Guinée et dans les îles situées à proximité furent aussi une composante du peuple maori au moins dans la première vague, qui ne comportait pas semble t’il les Arikis , qui seraient arrivés ensuite se prétendant les descendants des Dieux, primitivement de Tangaroa, puis ensuite de Hiro et finalement de Oro. Les découvreur de la Nouvelle Zélande appelaient Moriori (les gens du pays) les indigènes. Ils les repoussèrent et ces groupes humains finirent par s’ exiler d’eux même aux îles Chatham (vers l’an 1000) . Ces Polynésiens anciens étaient selon la légende des non violents qui refusaient de se battre et préféraient s’exiler que de résister les armes à la main pour défendre leur territoire. Il existe toujours semble t’il des descendants de ces extraordinaires Moriori , ils étaient 2000 à l’arrivée des Européens, ils ne seraient plus que moins de 100.
Hotu Matua avait quitté son île natale avec son oncle qui l’avait adopté peut être à la mort de son père, ou par affinité comme c’est souvent le cas chez les Maoris, pour se rendre à Hiwa Mataina sur la côte de la Nouvelle Guinée. Là les maoris avaient acquis par les armes et par le commerce Marua une île proche de terres côtières habitées par des peuples constitués de guerriers et de cultivateurs mélanésiens.
Des échanges , puis des guerres sortirent plusieurs tribus alliées qui tenaient un vaste territoire, régulièrement soumis aux expéditions d’autres hommes plus sauvages et sanguinaires provenant de l’intérieur des terres, des immenses montagnes ou encore des expéditions de pirates venus par la mer ou des s fleuves sur leurs pirogues.
Ces indigènes cultivaient dans des jardins établis sur brûlis, avec des ruisseaux canalisés pour l’irrigation, entre les mangroves et les forêts denses couvrant les montagnes proches abruptes. La mise en valeur de ces territoires et les échanges commerciaux, permirent à l’origine aux Maoris de posséder des richesses importantes en troupeaux de porcs, armes, oiseaux casoars, plumes de paradisiers fournis par les différentes tribus de cultivateurs Papous habitants de l’intérieur des terres.
La coutume de ces hommes était de recevoir l’étranger à coup de flèches, de réaliser des expéditions nocturnes dans le but de couper des têtes et d’ enlever les jeunes femmes et les jeunes hommes isolés pour les sacrifier ou en faire des esclaves. Ils ne connaissaient pas la division de la société en classes nobles et communes, leurs conseils se réunissaient pour désigner un ancien comme chef de guerre pendant une période limitée. Les anciens monopolisaient la richesse et les femmes. La coutume instituait bien l’échange des femmes entre les différentes tribus apparentées, non belligérantes, et établissait les règles de la division du travail, l’homme jardinant et chassant dans les hautes terres, les femmes et les enfants s’occupant des tâches de collecte de fruits sauvages, de petits animaux, comme les grenouilles, les poissons des rivières, les larves d’insectes comestibles, les racines de taro sauvage…..La source principale de nourriture était toutefois le sagou, provenant d’un arbre dont la moelle traitée fournit une pâte alimentaire qui peut être conservée longtemps.
Ces hommes ne s’occupaient pas de la mer, ils ne s’y aventuraient jamais. Ils vivaient des ressources de la terre et des cours d’eau, péchant aussi parfois des crevettes d’eau douce; les chevrettes au bord des ruisseaux, tuant des crocodiles surtout à l’occasion des banquets rituels. Les rencontres étaient rarement pacifiques entre les agriculteurs et les nomades de la brousse et des plateaux qui poussaient leurs expéditions vers les plaines côtières pour se mesurer aux guerriers maoris dans des escarmouches incessantes , ou pour commercer des différents objets de luxe conquis sur les autres tribus. Ces tribus connaissaient, comme les polynésiens primitifs qui vinrent d’Asie (la civilisation Lapita) le secret des vases en terre cuite, capables de contenir les aliments lors de leur cuisson. Ils s’en servaient parfois pour contenir la farine des sagoutiers et aussi pour faire des conserves. Fragiles et lourds ces ustensiles étaient pourtant peu recherchés. Dans les forêts de la montagne se trouvaient les meilleurs plants de kawa, les ignames les plus gros, les taros les plus succulents, les bananiers sauvages (fei) et les arbres à pain (uru). Les porcs étaient la richesse principale des cultivateurs souvent troqués contre les colliers de coquillage et les nacres.
Teagi voulu voyager vers son pays natal. Il se servit de la substance magique issue du kawa et d’autres plantes hallucinogènes qu’il conservait comme tous les initiés aux voyages magiques. Il la mâcha longuement et bientôt son esprit quittant son enveloppe terrestre s’envola vers Hiwa. Il survolait en pensée les mangroves des marais de l’ouest, leurs fouillis de racines aériennes, domaine de la vase, des crabes de terre, des rats, des crocodiles, où nichaient les oiseaux de paradis. Plus à l’ouest, sur la montagne se trouvait la forêt de gigantesques bambous occupant toute la ceinture d’un volcan, un vaste cône volcanique de tufs et de basaltes. Ses pentes portaient quelques îlots de broussailles au milieu du ravinement général dû aux pluies torrentielles sur des pentes trop abruptes. Les rochers de lave soufflée et les blocs de basalte se recouvraient de grands lichens et de fougères arborescentes dans les zones où la terre se formait coincée entre les roches. Quelques hommes solitaires habitaient dans des grottes, des initiés, des sorciers. Leur nourriture était surtout composée de fruits sauvages, de pousses de bambou, de batraciens et d’insectes. Leur regard et leur activité étaient tournés vers le service des Dieux, mais aussi vers la magie et la connaissance du fonctionnement intime du corps.
Quelques disciples du savoir de cette montagne étaient choisis pour devenir les maîtres de l’ initiation. Là vivait autrefois le maître de Teagi le savant Tuhuke Faaeke.. Le jeune homme salua longuement la dépouille du vieillard étendue sur une estrade faite d’une claie de feuillages suspendue sur des pieux. Une fumée éloignait les insectes, sur les pierres du marae des victimes animales sacrifiées pourrissaient. Les os se mirent à bouger dans le suaire de tapa peint recouvert de motifs de l’homme oiseau, la tête du squelette glissa en arrière et sa bouche s’ouvrit.. « Prend garde à toi Teagi ! » murmura le spectre…
« Le roi Hotu Matua ton père venant de Marae Ranga va te perdre pour toujours, remémore toi les leçons de survie et de science autrefois apprises. Si tu survis à cette épreuve prochaine, tu verras les frontières de la grande mer profonde Moana, et tu y reproduiras le pacte ancien des Arikis avec leurs Dieux, dont ils sont les héritiers et les descendants»
Le silence se fit , Teagi leva les yeux vers le soleil et celui ci ne lui brûlait pas le regard. Il vit l’homme oiseau de Marae Renga qui le regardait de ses yeux en soucoupes, fixement, tout en montrant des dents aiguës comme celles des requins makos.
Alors sa peau se hérissa de pointes, un frisson secoua sa nuque, il se retourna vers l’océan sans limite, une longue ligne d’argent et d’azur mêlé partant de son ventre fuyait à l’horizon, en volant parmi les nuées. Il traversait des bandes d’oiseaux s’élevant dans le ciel, et bientôt il rejoignit la flotte d’Hotu Matua. Alors arrivé au dessus de son corps, au lieu de plonger en lui et de s’éveiller, il eut envie de monter très haut pour voir les terres loin devant, il monta à la verticale, dans la fraîcheur du matin, la brise de nord est le caressait de son âcre saveur marine, il monta très haut en chantant les paroles magiques des hommes oiseaux. Il vit un tout petit îlot, un atoll de sable blanc couvert de cocotiers et au loin arrivant à grande vitesse une forme connue, redoutable, une tempête gigantesque qui arrivait précédée d’une meute de noirs nuages chargés de pluie, d’orages et d’éclairs. Pourtant il ne s’éveilla pas alors. Transportant son corps au dessus de l’océan le jeune homme reprit la route vers sa terre natale.
Hiva Mataina est une longue plaine côtière en bordure de la mer, actuellement nommée Anamarua ou poussaient alors en abondance surtout des cocotiers et des bananiers. Cette terre avait été jadis un lagon d’un récif corallien, puis reliée à la terre proprement dite par les riches alluvions apportée par les grands fleuves descendant des grandes montagnes volcaniques, elle était devenue palmeraie. Tandis que le fleuve avait creusé une sortie nouvelle dans les plages de sable volcaniques créant une vaste zone de marais en front de mer, colonisée par les palétuviers où toute la vase empêchait la vie des coraux en engluant tout. L’eau douce de la palmeraie provenait de canaux creusés de main d’homme distribuant les eaux de la rivière lointaine. Cette région souffrait parfois de périodes de sécheresse, car elle était abritée des vents porteurs de pluies par les grandes montagnes auxquels elle était adossée.
Les villages de pécheurs se trouvaient à la limite des marées près des récifs frangeants, face à la barrière du récif corallien qui entoure toute terre tropicale à quelques centaines de mètres de la plage. Les cases « fare » étaient construites là le plus souvent sur pilotis, les grands pieux enfoncés verticalement dans la terre provenaient des cocotiers ou des arbres de la mangrove, souvent des miolis imputrescibles, des totaras aux longues feuilles pendantes, constituées de petites écailles vertes superposées. Il y avait aussi des uru (arbres à pain) et des manguiers.
Ces arbres se nommaient selon qu’ils étaient semblables à ceux de Hiwa ou plutôt à ceux des côtes et de l’intérieur du pays indigène, car les plants des premiers furent semble t’il amenés ici à partir de Hiwa. Ces arbres avaient un feuillage sombre et funèbre et n’atteignaient leur plein développement que lorsqu’ils émergeaient enfin de l’enchevêtrement des broussailles, et pénétraient loin dans le sol volcanique de tuf rouge, ou de terre basaltique, lorsque l’eau et le soleil étaient captés avec abondance, les grand totaras atteignaient la taille de quarante mètre et étaient vieux de bien des générations humaines. D’autres habitations étaient construites sur des terrasses constituées d’un amoncellement de blocs de corail ou de laves, comme les marae qui y étaient annexés.
Sur la terre de corail le climat était plus sain, les vents réguliers, les eaux stagnantes étaient rares, près de la rivière le marais de mangroves entretenait souvent les fièvres et les pourritures infectes. Se protéger des insectes piqueurs oblige a entretenir des feux de feuillage sur terre, dans les îlots, dans le lagon c’est encore plus facile. La zone fertile était divisée en jardins irrigués par des canaux et entretenus par les gens du pays (les manahune) surtout constitués des descendants des vaincus des guerres, qui ne furent pas mangés et devinrent des serviteurs des clans vainqueurs, qui travaillaient pour l’aristocratie (les Arikis) et assuraient ainsi leur protection.
Deux villages principaux rassemblaient l’essentiel des populations de cultivateurs, établis sur les deux seules collines. Le roi et les nobles habitaient le plus souvent dans un îlot fortifié «le motu » situé à quelques distance du rivage sur le récif barrière qui se trouve à la limite du lagon, face à la principale passe d’accès. Régulièrement ils venaient prélever les récoltes, visiter leurs domaines et rencontrer les chefs du peuple (les matai). Cette visite crainte qui s’apparentait parfois à une vaste razzia donnait aussi l’occasion de faire des fêtes fastueuses agrémentée des dons faits à la royauté. Le roi venait ainsi razzier les ressources de ses sujets. Un vaste centre cérémoniel (marae) établis sur la plage de sable située face aux résidences royales voyait alors des réjouissances continuelles faites de festins collectifs, de danses, et de cérémonies religieuses.
La caste de privilégiés qui possédaient de droit les commandements et les propriétés de la tribu descendaient tous des héros légendaires divinisés par la tradition, et la plus part de Hiro, qui est, dans la mythologie maori , le seigneur de l’obscurité, le dieu des voleurs, et celui par lequel les malheurs arrivent ., et d’Oro le Dieu de la guerre, eux même nés de la Nuit (Atua fare Po). Certains provenaient de la prêtrise, qui venant de la caste Ariki étudiaient et développaient leurs connaissances pour être des chamans inspirés, des sorciers qui pouvaient être soit bénéfiques, soit maléfiques. Et qui généralement conseillaient le grand roi l’Ariki Nui ou Rahi dans ses affaires publiques et privées, car ils avaient connaissance intime des manifestations de la divinité et savaient lire les signes ténus que ces entités font parvenir aux humains qui les intéressent. Seuls les Ariki étaient dépositaires du mana nécessaire et avaient des généalogies remontant aux Dieux qui se récitaient sur les ahus, les autels des ancêtres divinisés. Le mana leur était attribué magiquement par la divinité, par héritage, à leur naissance ; puis par initiation, insensiblement lorsque le mérite de leurs actions le justifiait. Le siège du mana était situé dans le crâne. Cette puissance magique mobilisée par les cérémonies religieuses, les offrandes, les sacrifices animaux et humains, la parole inspirée et les actes sacrés ; le mana formait la base des tabous et des interdits que les Arikis établissaient souvent par l’intermédiaire de leurs Prêtres (Tahunga) habilités à traduire les pensées et les directives de leurs Maîtres. Par cette puissance absolue, magique, inimaginable, ils pouvaient décréter les tabous qui s’imposaient. Hotu Matua qui était un membre de la famille du roi principal (Atua Rahi ou Matua) avait décidé de quitter cette terre après avoir fait un rêve lui ordonnant ce départ. Son conseiller Ao Maka vit la terre qui convenait dans un rêve. Hotu Matua fit construire les navires nécessaires et aussi il avait envoyé aussitôt sept explorateurs pour préparer le voyage de colonisation. Au bout d’une année les explorateurs rentrèrent et firent leur compte rendu. Les navires étaient prêts pour la migration, ceux qui allaient partir s’étaient déclarés et avaient fait des préparatifs.
Lorsque tout fut prêt, il y eut une grande fête, les cadeaux de toutes les tribus furent reçus en compensation des terres libérées par les immigrants.
Chacun rassembla tout ce qui lui paraissait nécessaire, le roi fit embarquer les réserves d’eau, les provisions, les plants et les boutures, les animaux et après une grande cérémonie coutumière qui réunit toutes les tribus alliées, la flotte se mit en route à la tombée de la nuit, abandonnant cette contrée pour toujours. Teagi revit en songe tous les préparatifs de ce départ qui eut lieu lorsque le vent d’ouest se leva subitement , à la tombée de la nuit dans cette merveille absolue indescriptible et totalement renouvelée chaque fois qu’est un coucher de soleil sur le lagon.
Une gifle d’embrun s’abattit sur le dormeur Teagi, et le réveilla. Le soleil était haut au dessus de l’horizon. Au sud est une barre noire cyclonique s’était constituée et avançait vers les émigrants. Le maître navigateur Ira qui dirigeait les manœuvres de la poupe où il était suspendu sur une plate-forme se mit à donner des ordres pour la sécurité du navire. Les tambours se mirent à battre. Après un grand calme, la tempête, ses éclairs, ses averses diluviennes, ses vents terrifiants atteignit les eaux proches qui se soulevèrent. Un grand vol d’oiseaux marins fuyait vers le nord et Ira fit prendre la même direction au navire se fiant à l’instinct et aux signes. Bientôt les premières rafales de vents atteignirent le navire fuyant, les vagues se mirent à déferler par dessus bord. Tous les passagers s’étaient amarrés à des cordes, les mâts avaient été descendus et étaient arrimés, les lourdes voiles de pandanus tressé étaient pliées et attachées solidement aux poutres du plancher central, une ancre flottante faite d’une petite voile avait été lancée à l’arrière pour maintenir autant que possible le navire face aux déferlantes. Les coques se remplissaient d’eau par toutes les ouvertures noyant tout ce qui s’y trouvait, les hommes s’étaient munis de leurs rames et s’étant glissés chacun à leur place dans les coques arrimés aux flotteurs, ils pagayaient selon les ordres donnés par le pilote en chantant.
Le grand tambour sacré leur donnait la cadence. Malgré la violence des vents et le déferlement des vagues au dessus du navire, tout résistait étant construit solidement. La case du roi fut détruite en partie par les rafales de vent, et les vagues qui passèrent par dessus, un panneau céda et fut emportés par les flots. Mais le tressage serré des fibres de coco tint bon sur les poutrelles de bois malgré les bourrasques de vent et le choc des vagues.
Des porcs hurlaient à demi noyés dans leurs caisses de vanneries et sautaient affolés dans tous les sens. La cage d’un jeune verrat s’ouvrit soudain défoncée et le porcelet détaché subitement de ses liens qui le maintenaient au plancher se précipita dans la mer. Teagi poussa un cri, puis il quitta sa place où il était en sécurité et s’élança pour le rattraper. Une vague immense passant par dessus le bateau le prit dans ses filets ruisselants, il ne put se rattraper aux cordes formant bordage, ni aux filets serrés contre. Il fut entraîné au loin et lorsqu’il surnagea enfin après un instant qui lui parut interminable, il vit apparaître à l’arrière du vaisseau le roi Hotu qui jeta vers lui sa rame comme une lance, attachée à une ligne de pèche, son bras se tendit pour la saisir alors qu’elle passait à sa portée, mais une puissante déferlante l’entraîna encore sur sa crête avant qu’il ait pu plonger. Il fut porté en quelques instants à trente ou quarante mètres du bateau. Lorsqu’il remonta sur la crête d’une vague il aperçut le grand navire, loin déjà et entendit les chants s’éloigner, une conque se fit entendre, il fit quelque temps de gros efforts désespérés pour nager vers cette direction, il hurla aussi autant qu’il le put . Mais il devait lutter contre les éléments déchaînés, porté de crête en crête par des vagues déferlantes, il filait s’éloignant rapidement du navire maintenu lui par son ancre flottante. Lorsqu’il fut trop loin pour entendre les chants et les tambours, il remit son âme dans les mains de ses maîtres spirituels et résolut de nager avec économie luttant contre les battements désordonnés de son cœur et la fatigue de vivre qui apparut alors en lui. Quand la tempête se calma il faisait nuit depuis longtemps, il tourna sur les crêtes des vagues espérant voir les feux du grand navire, mais rien, aucune lueur à l’horizon. Alors il sut qu’il devrait lutter contre le froid et le désespoir qui montaient en lui. La lune se montra enfin. La peur est là parfois lorsqu’on est dans ces circonstances à la merci des éléments, et qu’il n’y a pas d’espoir visible, mais une fois surmontée ; elle ne revient plus. Il entendit un souffle caractéristique et tournant la tête dans cette direction. Il vit émerger une baleine. L’immense bête le contempla de son petit œil, puis subitement sonda en découvrant sa vaste queue et disparut. Les mugissements proches prouvaient qu’il était au milieu d’un banc de cétacés qui faisaient route dans la direction d’un courant de dérive qui le portait. Ce courant était chaud et ceci lui permit de survivre.
La direction de sa dérive observée grâce aux nuages passant devant la lune semblait être le sud ouest. Il nageait à peine se coulant dans l’eau tiède, évitant toute hâte et tout effort. Pour observer l’étendue des flots il attendait d’être porté au sommet des ondulations de la houle. Il était perdu, aussi loin que son regard portait vers l’horizon, il ne voyait que des surfaces scintillantes et vides, alors il désespéra et faillit mourir. Il demanda au dieu Hiro de lui envoyer un signe, et alors qu’il observait l’espace maritime devant lui, il aperçu une épave noirâtre, tout un fouillis de branchages surnageait loin devant. Il nagea désormais vers ce but et arrivé à quelques mètres vit qu’il s’agissait d’un ensemble de débris provenant d’une terre dévastée par un cyclone, un arbre assez important avait été déraciné, puis était allé à la mer et là entraîné par les courants avait pris la même direction que lui porté par le courant de l’océan . Cette chance inespérée lui fit voir la magnanimité de la divinité. Après avoir rallié l’épave il s’installa dans une fourche qui surnageait. L’arbre était un arbre à pain énorme (uru Artocarpus altilis) encore couvert d’une partie de son feuillage. Ses branches énormes s’enchevêtraient, quelques fruits immatures y tenaient encore. La lune pleine jetait sur ce tableau une lumière fantomatique, et le vent bruissait magiquement.
Il se hissa donc sur cette place providentielle hors de l’océan et y sombra dans le sommeil. A son réveil, il sut qu’il survivrait, car il remarqua bientôt les ronds faits par toute une flottille de poissons qui suivaient l’épave et qui en avaient fait leur refuge. Il avait dormi en plein soleil et lorsqu’il il se réveilla il eut conscience du danger mortel de déshydratation , il but alors un peu d’eau de mer à petites gorgées. Il portait autour du cou une pierre de jade provenant de Nouvelle Zélande , primitivement pierre d’ herminette de son grand père, elle était devenue bijou par la sculpture de ses faces qui représentaient l’homme oiseau à la langue pointue. Il se servit de son manteau de fibres tressées pour construire une ligne, il avait aussi sa ceinture qui était constituée de dizaines de mètres de cordelettes. Le tout ne lui prit que quelques heures. Puis il choisit une branche fourchue et une racine qu’il coupa et avec laquelle il construisit un hameçon simple aiguisé des deux côtés et une sorte d’épuisette. Après bien des essais infructueux il finit par attraper au vol un poisson volant. Avec ce poisson il attrapa une grosse dorade. Elle lui fournit avec l’os de ses ouïes une sorte d’hameçon plus efficace qu’il attacha à la ligne. Alors la nuit tomba et il se lia à l’arbre. Il songea qu’il devrait établir une plate forme plus tard pour être plus à l’aise . Il avait sucé l’eau contenue dans la chair sucrée et fade de la dorade et mangé un peu de chair crue, il se servit du poison volant pour attraper les autres gros poissons qui entouraient l’épave. Ceux ci étaient affamés et sans méfiance. Il eut bientôt six poissons dont il but la lymphe, sans cette eau douce, il n’aurait sans doute pas survécu étant pratiquement déshydraté . La nourriture ne devait plus lui manquer pendant les dix jours de sa dérive sur ce radeau de fortune. Il pécha jusqu’à vingt poissons par journée. Le septième jour il avait fini par établir une sorte de plate forme de branches liées par des cordes d’écorce et des branches entrecroisées. Il avait aussi tressé un parasol pour protéger sa peau nue du soleil et une grande provision de poisson était enfermée dans une nasse plongée dans l’eau. C’est cette nasse qui attira le premier squale. Un gigantesque requin tigre faisant près de quatre mètre de long émergea subitement en se jetant sur la bourriche de poissons et l’eut sans doute détruite. Si Teagi n’avait pas senti en voyant les poissons qui accompagnaient son esquif dérivant fuir subitement venir l’attaque et pu sauver sa pèche précipitamment.
Le squale s’acharna ensuite dans les branchages à fourrager, pendant de longues minutes chassant sans doute les derniers poissons de l’épave. Le jeune maori essayait de le frapper de son épuisette à chaque passage. Le requin finit par s’éloigner tout en tournant lentement autour de l’arbre. Il revint au cours de la journée et Teagi résolut alors de le tuer. Il construisit son piège. Il ne possédait aucune pointe pouvant équiper un harpon, il était résolu à accrocher le squale au niveau des fentes branchiales par un nœud coulant, puis à le faire mourir par asphyxie et finalement par l’exécuter .L’attaque fut rapide le grand fuseau tigré se jeta sur la dorade présentée au milieu du nœud coulant et l’avala d’un coup. Le nœud coulant se referma sur lui, et lorsqu’il voulut replonger il était pris. Téagi le hissa et attacha la corde solidement. Il lui laissa perdre ses forces dans ses agitations. Et lorsque cessa cette danse frénétique il lui passa un autre nœud coulant autour de la queue. Puis il le mit à mort. Le bois épointé de sa lance s’enfonça jusque dans la peau dure. Puis le jeune maori plongea sur le squale , il enfonça ses mains dans les fentes en chevauchant le grand corps puis saisissant son herminette emmanchée d’un manche souple il frappa sur les centres vitaux les vertèbres cartilagineuses et le cerveau avec une telle force et une telle précision que tout fut écrasé et réduit littéralement en bouillie, ce combat dura sans doute plus d’une minute, lorsque Teagi fit surface le grand poisson avait cessé de vivre.
La première chose que fit Teagi fut de hisser l’énorme bête à la surface, pour récupérer les dents et la peau . La tâche fut éprouvante, mais il acquit alors ce qui représentait une grande richesse avec ces dents coupantes, et la peau dure râpeuse qui pouvait aussi servir d’outre lorsqu’elle serait bien nettoyée, tannée par tous les moyens disponibles.
Et Teagi se souvint de la coutume. Dans une vaste zone du lagon les pécheurs avaient construit une vaste piscine avec des blocs de basalte et de corail, là ils avaient mis des squales pointes noires et pointes blanches attrapés vivants dans des filets ou pris dans le ventre de leur mère et les avaient laissé grandir. Les jeunes enfants devaient aller dans cette piscine où ils avaient pied généralement pour acquérir la pratique des squales et savoir comment les affronter valablement. Cette initiation n’était pas très dangereuse et jamais un requin n’avait eu le dessus. Enfin un jour l’adolescent devait combattre avec un couteau de bois sertie de dents de requin le plus gros squale et le tuer. Les squales retenus en captivité ainsi ne mesuraient que deux mètres environ mais ils n’en étaient pas moins dangereux pour autant. Sans cette initiation jamais un homme nu muni d’un outil primitif n’eut pu venir à bout de cette imposante masse de chair faite pour tuer et dévorer. De la chair Teagi fit des fines lanières qu’il mit à sécher au soleil.
La peau lui permit de se protéger mieux encore du soleil cuisant. Pour se forger un moral à toutes épreuves comme il savait qu’il devait être en forme pour survivre, tous les jours il consacrait plusieurs heures au lever du soleil à faire une gymnastique soutenue en chantant les pantomimes (haka) guerrières, constituée de mouvements de danse de guerre pour assouplir et entretenir ses muscles. Puis il mangeait lentement en mâchant lentement. Il ne manquait pas d’eau douce car il put recueillir finalement la pluie qui tomba en abondance aussi avec la peau du requin, et même il pu finalement la stocker dans une outre sommaire. Il savait qu’il pourrait tenir un grand nombre de jours sur son arbre flottant et le désespoir n’existe pas pour un maori confronté à l’adversité la plus rude. C’est lorsqu’il n’est pas dans la lutte que l’océanien a le fiu (raz le bol général sans motivation précise). A présent il avait toujours quelque chose à faire de ses mains. Transformant les matériaux disponibles avec ses outils. Artisan perfectionniste, il construisit deux harpons, dont les pointes étaient faite de dents de squale soigneusement serties et collées dans le bois. Il vécut de sa pèche. Il eut même envie de faire du feu mais ne disposant pas d’une baguette de bois dur et dans un environnement si humide il n’y parvint pas avec le bois disponible. Le courant se dirigeait vers le nord est à présent. Il savait qu’il y avait de nombreuses terres dans cette direction et comme il vit à plusieurs reprises des oiseaux de mer longer les vagues, il savait qu’il n’était pas loin d’une terre et qu’il accosterait prochainement à un rivage.
DEUXIEME CHAPITRE
MOTUITI ; l’îlot.
Le dernier jour de sa dérive, il captura un requin mako . Le soir vint , la mer se fit sombre et violette, le soleil se couchait dans un embrasement éclatant au milieu des nuages floconneux. Comme il scrutait aussi l’horizon à l’est son cœur bondit, une simple ligne bleutée soulignée par une langue de nuées annonçait la présence d’une terre et ceci dans la direction ou le poussait le courant de dérive. Puis il vit distinctement un vol d’oiseaux, confirmant dans son cœur la vision magique. La nuit se fit, la lune se leva. L’immobilisation du squale avait , été réalisée par un nœud coulant bloquant la tête, qu’il avait fixé très vite. Il avait ensuite pu passer un autre nœud coulant autour de la queue, amarré à ces deux liens le requin devait encore mettre plusieurs heures à mourir, se débattant violemment par moment. La corde qui l’immobilisait par la tête finit alors par se rompre.
Le requin pirouetta sur lui-même et projetant sa mâchoire hors de sa gueule s’éleva hors de l’eau, ses deux ailerons latéraux sortirent de l’eau, son oeil glauque semblait phosphorescent, et les dents aiguës et recourbées brillaient comme un collier, par chance une branche coriace arrêta l’attaque du monstre qui déséquilibré, retomba lourdement en faisant jaillir un gerbe d’écume, aussitôt il attaqua à nouveau. Sa gueule ressortit de l’eau si prés que Teagi aurait pu la toucher de la main, après avoir esquivé en reculant, il frappa de son harpon le museau pointu. Ce coup incita le requin à plonger mais le filin qui le retenait à la queue avait résisté, la corde et les nœuds étaient solides, ce fut la fin, le grand requin se débattit longuement. Lorsque le poisson ne donna plus signe de vie, Teagi hissa la queue hors de l’eau, puis il lui ouvrit méthodiquement le ventre avec son couteau dont le tranchant fait de dents de requin coupait et déchirait les chairs comme la lame d’un rasoir. Lorsqu’il abandonna le cadavre du poisson et sortit de l’eau pour se réfugier sur la plate forme ou il avait établi sa couche, un magnifique clair de lune éclairait la nappe scintillantes des flots. Il remercia Takaroa le maître des makos, de lui avoir envoyé un signe de sa présence et d’avoir permis qu’il prenne la vie de cet être magique, il devait rituellement honorer la dépouille de sa proie, car l’animal qu’il venait de tuer était considéré comme un être magique qui n’était pas l’ennemi des hommes et qui était vraiment le serviteur et le messager du Dieu. Si un homme se faisait attaquer et blesser par un requin, c’était parce qu’il avait offensé la divinité, brisé un tabou, ou réalisé une action méprisable. Il eut une vision une sorte de brume légère entoura le cadavre du poisson mort qui se mit luire étrangement, d’étranges sifflements semblables à ceux des orques et des dauphins se firent entendre, tout autour s’élevaient des poissons volants, plusieurs vinrent même heurter son radeau improvisé. Ceci ne pouvait être que la réponse favorable du Dieu. Aucun chasseur ne devrait oublier d’honorer sa victime, et à travers elle le maître de ces créatures, dont une partie constitua une partie du premier homme qui conquit l’océan, et dont une autre partie vient elle même de l’homme. L’homme requin est ainsi considéré comme l’initiateur des sorciers dans tous les domaines des lagons et des côtes où il intervient dans les affaires des hommes. Le squale est un Dieu. Le tuer est un acte religieux. Seul l’initié peut réaliser cette action sans danger, car si l’esprit collectif qui dirige les squales se sent lésé par un homme qui ne respecte pas la divinité protectrice des requins, il se vengera cruellement ensuite.
Le ciel était constellé d’étoiles à présent, vers le lointain là où il avait entrevu les indices de la terre la réverbération du ciel était différente, il constata qu’il se dirigeait insensiblement vers cette direction, comme si le courant avait obliqué. Il dormit profondément ensuite. Au lever du jour, il vit nettement, une courte frange de verdure surmontant la ligne blanche des vagues et de la plage de sable.
Il ne voyait encore distinctement que la cime des plus hauts cocotiers.
Le courant l’entraînait au large à quelques kilomètres et lorsqu’il vit qu’il allait s’éloigner il décida d’abandonner l’arbre dérivant et de construire une sorte d’embarcation avec les peaux des squales gonflées d’air liées l’une à l’autre.
Ceci lui permit de sauvegarder l’essentiel des outils qu’il avait fabriqué. Il forma très rapidement un boudin allongé qu’il lia avec les cordages confectionnés avec des bandes de peaux, et les viscères des squales, tressés. Industrie qui avait méticuleusement réalisée pendant les longues journées de son voyage, précaution qui lui permit de réussir cette traversée qu’il aurait difficilement réalisée sans ce radeau improvisé. Cette activité technique efficace lui avait été enseignée par des maîtres artisans jadis lorsqu’il fut éduqué dans son enfance. Il savait produire des liens avec toutes les ressources de son environnement, il connaissait la nécessité de posséder des cordes et des liens, des lignes et des filets. Les peaux des animaux tués devaient aussi être soigneusement dépecées pour fournir des récipients étanches formant flotteurs ou des outres pouvant contenir de l’eau. Il savait les traiter pour les empêcher de pourrir, les faire sécher au soleil, soigneusement les écorcher pour enlever toute graisse et les battre pour les assouplir.
Il savait construire des filets, des nattes et des tissus solides, des sacs avec n’importe quelle matière assez résistante, coudre des peaux et des nattes, construire au besoin une embarcation pouvant être dirigée sans bois.
Il se souvenait d’une histoire racontée d’un lointain ancêtre ; un ancêtre nommé lui aussi Maui. Celui ci fut abandonné un jour par ses frères qui le jalousaient sur un îlot désertique et froid au large de la Nouvelle Zélande dans lequel il n’y avait ni bois, ni autre végétation que des lichens et des herbes. Après avoir vécu quelque temps en mangeant les oiseaux et leurs œufs, les coquillages, les crustacés et les poissons qu’il péchait, il tua des otaries et construisit un navire avec leurs peaux et leurs os. Pour construire le mat il utilisa les gros os qu’il assembla, il se fit aussi des lignes de pèche, un filet à lancer (épervier), des rames et des harpons sans aucun morceau de bois, car il ne poussait pas d’arbres dans cette contrée, et il ne trouva jamais aucun tronc échoué. Teagi se souvint d’avoir vu dans le temps une embarcation faite de cette manière avec des os et des outres de peaux. Il se souvenait même des bottes d’herbes et de roseaux qui servaient aussi à construire des embarcations sans bois. L’ancêtre de Teagi rejoignit sa patrie située à plusieurs journées de navigation avec cette embarcation, qui faite d’un simple radeau de peaux gonflées, avec un mat d’os, filait presque aussi vite qu’une pirogue double. Teagi se souvenait de ce mat fait d’ossements assemblés, résistant et magique, sculpté de toutes les formes de Tikis, conservé dans la case du marae familial, L’enceinte sacrée comprenant les effigies symboliques des Dieux et des grands ancêtres. Ce cimetière ; était aussi la demeure des « Tupapau » (fantômes). Ces esprits, le plus souvent issus des mânes de sorciers et de sorcières qui ayant transgressé les tabous les plus sacrés étaient condamnés à errer sans fin dans l’immensité et l’éternité, si les ancêtres étaient maltraités ou oubliés par leurs héritiers ; si un de leurs héritiers les appelait, ils pouvaient revenir sur terre pour le venger. Celui qui brisait délibérément ou même par accident un tabou était frappé par eux aussi. Tout ceci il l’avait connu et vu lors d’un voyage à Ao tea Roa Hokianga, sur l’île du nord de la Nouvelle Zélande.
Etant prêt à quitter son radeau improvisé qui lui avait sauvé la vie il entreprit de dépouiller le requin mort de sa peau. Il vit qu’il n’y arriverait pas, il le prit donc en remorque en attachant la ligne qui le maintenait par la queue. Il se mit à l’eau, nagea pour s’éloigner un peu. Après s’être hissé à califourchon sur l’ embarcation qu’il avait construite, il se mit à pagayer avec la rame qu’il avait bricolée en tressant dans une fourche d’une branche de son esquif.
Le plus dur fut de trouver une passe dans la barrière de corail qui ceinturait l’île. Mais comme un flux entrait dans la passe il fut aspiré dans le courant et passant au milieu des coraux qui affleuraient à cet endroit il pu se diriger vers la ligne blanche de sable située à quelques centaines de mètres.
Il put débarquer sur la plage, y tirer ses possessions. Puis il examina la situation de l’île où il venait d’aborder. Plusieurs types d’arbres y prospéraient. Quelques plants de miolis (plante qui ressemble au tamaris) aux branches tordues, venaient ensuite une ligne compacte de pandanus (pandanus tectorius) avec leurs racines en échasse ils étaient fort vieux et leur masse était presque impénétrable. Ailleurs ce n’était que des palmiers cocotiers (nucifera) qui s’élançaient couvrant une prairie aux longues herbes jaunies. Le bord du lagon était environné presque exclusivement de cocotiers de toutes les tailles.
Des centaines de noix jonchaient le sol, ouvertes et vidées pour la plus part. Les crabes des cocotiers abondaient. En se nourrissant de ces cocos, ils défaisaient l’enveloppe de leurs pinces aiguisées et enlevaient méthodiquement la fibre de coco qu’ils abandonnaient tout autour bien alignée.
Teagi se cueillit quelques noix vertes contenant de l’eau de coco. Il se fit une ceinture d’écorce pour bloquer ses pieds sur le tronc nécessaire pour grimper facilement en alternant prise de mains et sauts, il s’éleva ainsi jusqu’à la cime du plus haut cocotier, avec son herminette il fit tomber les noix. Il admira ensuite la situation de l’île recherchant une terre proche. L’îlot était désert, aucune présence humaine n’y était perceptible, il mesurait quelques kilomètres de diamètre et était pratiquement circulaire avec une seule passe. La frange de terre était très régulière et ne dépassait pas cent mètres. Aucune terre n’était visible à l’horizon, ce qui expliquait sans doute l’absence d’habitants humains. Peut-être que des hommes étaient passés ici mais ils n’avaient laissé aucune trace évidente de leur passage. Il redescendit et but largement l’eau de coco contenue dans les noix de coco immatures après les avoir ouvertes avec son herminette.
Des petits cocotiers voisins il coupa les plus belles palmes qu’il tressa et qu’il utilisa pour réaliser un campement sommaire, il se reposa. Le lendemain il fit le tour de l’île pour observer l’étendue de son domaine et choisir un endroit propice, le lieu ou il devrait habiter désormais. Il rechercha un signe, qui ne lui fut pas donné ce jour là.
La nuit le surprit de l’autre côté de l’atoll. Après s’être baigné dans le lagon il s’endormit couché sur le sable de la plage.
Le lendemain il choisit le site de son installation.
Il construisit son fare. La première chose qu’il eut à construire fut une hutte . Il rassembla les matériaux nécessaires. Un assemblage de branches liées entre elles, le tout recouvert de panneaux de palmes de cocotier tressées, et le toit à une seule pente fait d’une couche de feuillage de pandanus repliés sur des baguettes. Une gouttière en écorce lui permettant de recueillir l’eau de pluie était fixée sous ce toit, calée par du sable et des blocs de corail. Plus tard il construisit aussi une petite case sur pilotis sur le lagon, comme il l’avait vu faire dans les villages de son enfance, pour fuir les inconvénients de la terre, surtout la présence des crabes de terre et des insectes rampants. Les scolopendres appelés cent pieds sont fréquents dans ces îles, ils sont très venimeux. Une fois son habitation et son approvisionnement en eau douce assurés, il entreprit de construire l’ embarcation, dont il aurait besoin pour rejoindre les siens et quitter l’île.
Près de la passe se dressait les plus majestueux cocotiers de l’île. Il choisit le plus beau pour construire l’embarcation qui devait lui permettre de quitter cette terre.
Les peaux des requin sans doute nombreux dans les eaux proches de la passe devraient lui fournir les matériaux pour une partie des voiles. Ainsi que les pandanus nombreux qui fourniraient aussi des nattes solides. Les fibres des cocotiers serviraient à tresser des cordes solides et imputrescibles, former des sacs, des filets. Les pandadus et les miolis fourniraient le bois pour les liaisons des coques et la plate-forme.
Quand aux creusements de la pirogue ils seraient effectués dans le tronc de l’arbre choisi avec le feu. Par le tranchant de son herminette il lui faudrait tout d’abord l’abattre puis le tailler et le protéger du soleil qui sinon le ferait éclater en séchant. Il devrait ensuite le creuser pour obtenir deux pirogues car il souhaitait construire un catamaran très léger soigneusement ponté et surmonté d’une plate forme. Cette embarcation devait être à la fois facile à manœuvrer pour un homme seul, rapide, capable de remonter au vent ce qui est très difficile sans quille ou sans dérive qui puisse prendre appui de manière importante sur l’eau. Mais il formerait des dérives solides sous forme de grandes rames.
Sur tout le récif ne se trouvait aucune source d’ eau douce, il dut se contenter de l’eau contenue dans les noix jeunes. Nommées omoto, les noix mures fournirent leur amande blanche sucrée, produisant aussi de l’ huile nécessaire pour protéger la peau et traiter les bois. Les fruits en germination fournirent eux une pulpe plus légère comme soufflée au goût assez sucré de fromage blanc ou de chantilly. Avant de détruire l’arbre qu’il avait choisi il devait préalablement offrir un sacrifice au Dieu Tane, le père des arbres , maître des constructeurs de pirogues.
Fils de Tama-nui-to-ra le dieu soleil de la mythologie māori et de Hine-raumati, la dame de l’été. Il fut crédité de l’origine de la danse haka. Tane-rore est le tremblement de l’air vu lors des journées chaudes de l’été et est représenté par le tremblement des mains lors de la danse haka. Hiro et Tane sont considérés comme frères, tous deux issus du couple primordial. En Nouvelle-Zélande enfin, Whiro est un dieu, qui a joué un rôle majeur dans la Création, en s’opposant violemment à son frère Tane, lorsque celui-ci voulu séparer leurs parents, Rangi, leur père le Ciel, et Papa, leur mère la Terre. La plupart de leurs frères suivirent Tane, et une terrible bataille s’ensuivit, connue sous le nom de Te Paeranti. Ce fut Whiro qui sortit finalement vaincu de la lutte ; Tane et ses alliés durent alors se réfugier sous terre, et demeurer dans le monde souterrain.
Whiro, ou Whiro Te Tupua, est le dieu de la mort.
Parmi les dieux majeurs qui dépendent de Whiro, on compte Tau-te-ariki, d’où émane la lèpre.(ma principale source mythologique est wikipédia)
C’est dans les légendes de l’archipel des Tuamotu que le mythe d’Hiro est le plus élaboré. Selon cette version, « Hiro » est un puissant guerrier qui, pour obtenir la main de Tiaki-Tau, la fille du roi, participe à un concours de danse, qu’il remporte. Mais le roi exige de lui une nouvelle épreuve, en l’envoyant chercher la calebasse emplie d’huile parfumée appartenant à l’ogresse Nona. Hiro en vient à bout. À son retour, alors que les festivités du mariage battaient leur plein, la princesse est entraînée au fond des océans par un démon. Hiro poursuit le démon, le défait, et ramène avec lui la princesse. Hiro — qui a eu deux enfants avec elle — tue celle-ci lorsqu’elle tourne en dérision la petite taille de son pénis. S’ensuivent alors de nombreuses années d’aventures, de trahisons et de meurtres. Puis un jour, pour aller voir sa sœur Hina, Hiro prend la mer, où son équipage tue un oiseau sacré appartenant au dieu Tane. Celui-ci, furieux, coule le navire de Hiro, qui peut cependant se sauver et regagner la terre.
Pour accomplir ce sacrifice et réaliser un acte religieux convenable ,qui puisse réjouir le coeur de Tane le dieu des arbres, il lui fallait prier et réaliser des rites sacrés. L’intercession de ses ancêtres et les formules magiques apprises sur les chantiers auxquels il avait participé étaient nécessaires. Tane est un ancêtre lointain des Ariki qui a été divinisé.
Teagi construisit un autel, délimita une enceinte sacrée, il offrit de son sang et du lait de coco en promettant un sacrifice exemplaire pour que le Dieu ne s’oppose pas à la mort de l’arbre, et assure la solidité et la bonne exécution des procédures de construction. Alors il fit son premier feu depuis son naufrage. Tout feu est sacré, le maître du feu est un Dieu très important, que Maui l’ancêtre civilisateur défia longtemps avant de trouver son secret.
Teagi connaissait plusieurs moyens d’obtenir du feu à partir de morceaux de bois. Le principe bien connu de tous est simple. Mais qui l’a jamais accompli sans être initié par un maître ? car sa réalisation nécessite une technique accomplie et sans doute des jours d’essais et d’erreurs pour ceux qui voudraient arriver à ce résultat sans avoir été initié. La méthode la plus simple consiste à frotter avec un bout de bois une rainure d’un bois assez dur jusqu’à ce que les copeaux réalisés par ce frottement s’enflamment. Le perçoir néolithique constitué d’un petit arc d’un disque de pierre, d’un bâton de bois dur, d’une pièce tenue par la bouche dans lequel ce bâton va tourner permet d’obtenir plus facilement le même résultat. Cet outil est connu depuis que l’on perce les perles des colliers de perles réalisées avec des coquillages avec son usage. Ces colliers forment la monnaie principale des échanges de la Kula, jusqu’à aujourd’hui ils sont sacrés. Leur usage date de la période des chasseurs les plus anciens . On le sait par les disques de pierre creux trouvés dans les sites préhistoriques, et par les trous finement réalisés dans l’os, l’ivoire, la pierre et la nacre.
Une branche dure bien droite soigneusement polie et taillée, lestée d’un poids bien centré, mise en rotation rapide dans une sorte de petit fourneau de pipe taillé dans un tronc d’un bois un peu tendre bien sec. Une préparation de poudre végétale très sèche se mit bientôt à fumer, mélangée aux brindilles prévues à cet effet elle les enflammera.
Cet outil dont il connaissait précisément toutes les mensurations et les principes demanda peu de travail. (prévoir un plan de cet instrument en annexe)
Il mit alors le feu à ses offrandes. La fumée s’élevait dans le ciel apportant son sacrifice aux entités cosmiques, tant que durerait la construction il ne devrait pas laisser éteindre cette flamme, il ne devrait pas plus souiller l’enceinte sacrée, et devrait purifier son corps par des ablutions rituelles. Avant de porter la hache sur le tronc , il s’approcha de l’autel et s’ouvrant une veine du dessus de la main gauche il en fit couler le sang sur le brasier. L’odeur âcre s’éleva dans l’air, les signes perceptibles étaient bons, les Dieux permettaient la mise à mort de l’arbre. Mais celle ci devait intervenir aussitôt. Après une heure de travail à l’herminette, constamment réaffûtée, il utilisa le feu. Il construisit un muret de blocs de corail autour du pied de l’arbre, laissant des ouvertures pour activer la flamme , puis il rassembla le combustible qui jonchait le sol des troncs, des branches sèches . Une quantité importante de combustible bien sec sera nécessaire pour couper l’arbre, le tailler et le creuser.
Quelques heures suffirent pour venir à bout du pied volumineux du palmier, malgré le fait qu’il soit vivant et donc que son bois vert ne brûle pas facilement. Il tomba suivant le plan décidé. Deux foyer creusés à une distance de six mètres sous la bille de bois lui permirent de tailler deux coques jumelles, lesquelles furent d’abord décapées et lissées à l’extérieur puis ensuite évidées par de petits feux soigneusement entretenus, attisés, et surveillés, les parties brûlées étant martelées et grattées au fur et à mesure que le bois se calcinait. Pour cet usage il utilisait une provision de charbons de bois de petite dimension et maniait un éventail fait de pandanus tressé, lorsque le vent soufflait dans l’axe des billes ceci lui facilitait la tâche. Lorsqu’il devait interrompre son travail il éteignait les petits feux qui lui servaient à creuser les billes en les mouillant et recouvrait son travail de nattes de feuilles de cocotier tressées destinées à le protéger du dessèchement du soleil. De fins trous réalisés avec le foret à archet lui permirent aussi de régler précisément l’épaisseur définitive très minime qu’il donna à ses pirogues, à peine plus d’un centimètre. Malgré cette faible épaisseur les deux coques étaient très solides et le tout restait très lourd à déplacer. Après quoi il les immergea dans l’eau du lagon en les remplissant de pierres, pour imbiber les fibres de sel, puis il brûla superficiellement toute leur surface. Une fumigation d’algues fournit ce calaminage qui protège la coque et la rend plus résistante. Brûler en surface une pièce de bois la rend presque imputrescible, cette opération diminue fortement la porosité du bois, et augmente la légèreté. Réaliser une embarcation de haute mer était une activité que tout maori savait alors réaliser dés sa plus tendre enfance, ayant vu comment les chantiers procédaient, bien sûr il y avait aussi des maîtres artisans qui eux seuls étaient capables de diriger la construction des grands navires. Ils transmettaient leur savoir aux jeunes hommes doués de la caste royale. Teagi avait été initié, il savait manier et fabriquer tous les outils nécessaires. Le palmier n’est pas vraiment un arbre. Son bois sans nœud est pourtant solide et durable, presque imputrescible lorsqu’il est correctement traité.
Pour assurer l’étanchéité il avait besoin de colle et d’une sorte de goudron. Pour obtenir il récolta et fit sécher puis cuire la sève des pandanus dans des coquilles de bénitiers géants (pahua). Ayant découvert une colonie de ces coquillages de grande taille dans le lagon à quelques mètres de fond. Généralement ces mollusques sont incrustés dans les coraux, dont il faut les dégager pour pouvoir les récolter. Pour en capturer il prit un câble tressé avec des filasses de bourre des noix de cocotier. Il lui suffisait de l’introduire en une boucle dans le tridacne choisi qui n’était plus enfiché dans le corail. Celui ci se refermait aussitôt autour du lien et pouvait être hissé jusqu’au rivage, se gardant bien de relâcher son étreinte. Cuits ces mollusques s’ouvrent, leur coquilles supportent assez longtemps la calcination sur des braises et permettent donc de cuire des liquides. Une autre casserole naturelle fut fournie par la carapace de tortues marines beaucoup plus fragiles puisqu’elles brûlent étant composées essentiellement d’os, la technique consiste à les remplir d’eau et des matières à cuire puis à y introduire des pierres brûlantes prélevées dans le foyer. On peut aussi faire la même chose avec une peau d’animaux ou avec tout contenant un peu étanche. De cette manière on peut obtenir aussi avec des peaux, des os et cartilages une colle, faite de gélatine animale. A défaut de carapace il aurait pu aussi utiliser un récipient fait de corail mais ceci aurait nécessité de trouver le bon bloc de corail dense à proximité et il n’y en avait pas localement. Cette colle de gélatine est assez forte mais elle se délite dans l’eau et dans l’humidité elle doit être imperméabilisée par des couches de goudrons ou de résines.
L’autre technique consiste à utiliser la chaux produite en calcinant du corail. La bourre de coco est un excellent combustible pour cette opération. Il faut construire un four pour concentrer la chaleur et établir une bonne ventilation. Ceci produit une chaux qu’il faut éteindre, devenant une sorte de poudre ciment qui durcit fortement après quelques jours au contact de l’air. Bien sûr ce liant doit être aussi protégé ensuite par des graisses ou des matériaux divers imperméables et collants disponibles des attaques de l’eau de mer.
Les principes collants sont très répandus dans la nature mais bien peu résistent à une immersion longue dans l’eau de mer. Les différentes résines et caoutchoucs naturels y pourvoient. De nombreux arbres des zones tropicales forment une résine, ou des gommes lorsqu’on recueille leur sève. Cette substance récoltée par incision des miolis, des pandanus, et des autres arbres disponibles dans différents récipients, coquilles de coquillages ou de noix de coco, peut être ensuite concentrée. L’arbre à pain lorsqu’il est disponible est de loin le plus grand producteur de sève caoutchouteuse, mais il n’y en avait pas là. Après avoir formé une épaisse purée gluante toute sève mise à cuire se transforme en goudron poisseux qui épuré plusieurs fois finit par prendre une consistance solide une fois refroidi. Rendu élastique ou liquide par chauffage. Teagi se servit de cette colle et de ce mastic pour étancher les liens permettant de relier les différents éléments de l’embarcation cousus l’un à l’autre par des cordelettes de fibres de coco. Cette poix permettait aussi de rendre étanche des outres de peau et de vannerie. Des compartiments étanches pouvaient ainsi être réalisés dans chaque flotteur.
Le cocotier n’est pas un arbre son tronc ne grossit pas chaque année, du moins dés qu’il a obtenu son tronc de base, il ne grossira plus ensuite, ce tronc se prolonge simplement d’un nœud chaque fois qu’un niveau de palmes et de fruits tombe, son fut dépasse rarement plus de trente centimètres de diamètre, surtout dans les attols. Et comme il faut éliminer tout l’extérieur qui est bosselé et de faible résistance, planifier l’ensemble, il reste donc peu de place pour en faire une coque qu’on puisse utiliser en se glissant dedans comme dans un canoë. Sauf à écarter les bords de la coque une fois qu’elle est creusée.
Préalablement les coques une fois creusées subirent la mise en forme destinée à les ouvrir et à relever la poupe et la proue simultanément. Enterrées dans le sable, imbibées d’eau de mer par un trempage de plusieurs jours, elles furent remplies ensuite de bourre de coco et de bottes d’herbes sèches. Après combustion les bords latéraux des pirogues furent écartés très progressivement par de nombreuses cales frappées de travers ce qui eut pour conséquence de redresser la poupe et la proue et d’ouvrir la coque. Car l’évidemment par le feu avait été conduit par une fente de la largeur d’une main au plus. Il fallait aussi maintenir les deux extrémités par des liens solides serrés par torsion pour éviter l’éclatement de l’ensemble.
Le chauffage préalable étant destiné à permettre aux fibres du bois d’être élastiques et de garder ensuite la torsion. L’ensemble fut rempli de sable et mouillé régulièrement pendant que les poupes et proues étaient prolongées d’une étrave relevée destinée à couper les vagues. Cette pièce étant taillée dans une portion de tronc tordue, l’ensemble étant ajusté par un assemblage en tenons et mortaises, le tout collé, lié et chevillé transversalement.
Quelques membrures en fins liteaux permettant alors de réaliser les compartiments et les supports du pontage… Les liaisons les deux coques furent réalisées avec deux poutres principales de miolis soigneusement équarries, polies et sculptées. L’ensemble une fois fixé était bien trop pesant pour être déplacé facilement par un homme seul. Il fallait être un athlète comme Teagi pour le hisser et le tirer sur le sable. Le tout pesait plus de deux cents kilogrammes à vide une fois terminé avec le mât principal qu’on pouvait établir à l’avant ou à l’arrière. Celui ci mesurait environ cinq mètres et permettait de hisser la voile faite de nattes de pandanus, cousues entre elles, renforcées par des tresses cousues, enroulée sur une verge souple. Elle était fixée sur une vergue souple plus haute que le mât. Pour la monter ou la descendre il fallait abattre le mât, la border était pratiquement impossible, sa forme ressemblait à une aile d’oiseau. Teagi savait tresser les matériaux les plus divers disponibles. Il tira partie du travail des crabes des cocotiers locaux, qu’on appelle kaveu en rassemblant toutes les bourres décortiquées par ces auxiliaires bénévoles il put se constituer rapidement un stock de cordages solides. Le crabe de cocotier (Birgus latro) est le plus grand arthropode terrestre. De la famille des bernard l’hermite, il est connu pour sa capacité à casser des noix de coco grâce à ses fortes pinces, pour en manger le contenu. Il se répartit dans des îles et îlots de l’océan Pacifique et de l’océan Indien. Il peut peser jusqu’à 15 kg et vivre 30 ans. Produire des cordes à partir des fibres de coco est assez semblable à ce qui se fait avec les autres fibres naturelles. Comme le chanvre ou la laine.
Le moyen à employer consiste à établir des sortes de nappes continues de fibres, de manière que les recouvrements soient toujours de même force, ensuite il faut tordre ces torons en les frottant sur la cuisse ou toute autre surface appropriée, une fois le toron réalisé on peut soit en tresser plusieurs ensemble, trois torons à la fois généralement, soit encore continuer de les tordre sur de grande distance, les rejoindre, puis les mêler. C’est cette technique qu’il utilisa pour obtenir ses cordages de mâts et d’écoute. La corde issue était alors soigneusement traitée pour que les fibres se collent les unes aux autres et qu’elles ne s’usent pas facilement par frottement. Plusieurs colles naturelles sont utilisables pour cet usage, celles d’os et de peau sont détruites par l’eau et l’humidité, les résines et les goudrons permettent de protéger ce traitement, enfin les cordes doivent être graissées de préférence avec de la graisse animale, mais l’huile de coco peut aussi être employée. Il convient aussi de les mouiller lorsqu’elles sont en tension, car sèches elles sont plus cassantes et moins souples.
Sachant d’avance la difficulté qu’il aurait à utiliser couramment ce navire imposant qu’il destinait à son voyage lointain, il construisit parallèlement une petite pirogue de pèche pour explorer le lagon et pécher avec facilité. Simple pirogue à balancier (vaka) de quatre mètres relié à un flotteur par deux balanciers l’un solidement fixé l’autre établi souplement pour la compensation de la houle. En maori vaka tovere
Appelées également « vaka paiere », ces pirogues de petites tailles étaient et sont toujours utilisées essentiellement pour pêcher dans le lagon ou juste au-delà du récif. Celles-ci comportent également un balancier dénommé « ama ». Ce canot en partie ponté lui servit à pécher habituellement dans le lagon, et même dans l’océan à quelque distance de l’île. Il eut vite fait de capturer tous les grands squales de récifs qui hantaient les abords de la passe. Il tua successivement plusieurs requins tigres qui venaient régulièrement aux même heures s’offrir un festin des proies tentées par l’espace calme et chaud offert devant eux par l’ouverture du lagon. Que mes lecteurs se rassurent les requins tigres de grande taille sont depuis devenus très rares en Polynésie. Du fait de l’homme qui leur fait une chasse assez systématique. Mais dans ces temps anciens ils étaient fort nombreux et leur destruction était nécessaire même si comme on l’a dit précédemment le requin était un dieu, représentant d’un grand Dieu. Il y a peu d’attaque de requin en Polynésie parce que tous les usagers de la mer savent s’en accommoder, dans le lagon seul les petits requins sont présents, lorsqu’ils deviennent plus grands ils gagnent la haute mer. Mais qu’advienne l’échouage d’un grand cétacé et les voilà bientôt attirés qui fourmillent bientôt autour du cadavre. Il y a aussi les colonies de phoques et d’otaries qui les attirent immanquablement. L’îlot de Teagi était sur la route des baleines , son lagon était poissonneux. Des bancs de caranques s’y aventuraient. Des bancs d’ature s’y promenaient constamment. Les requins gardaient les passes. Les attraper était facile il suffisait de leur présenter des morceaux de murènes piqués sur des hameçons.
Ces combats n’étaient pas sans danger. Le monstrueux poisson se jetait sur l’appât présenté au moment opportun. Le nœud coulant se refermait le poisson sondait emportant la pirogue. En haute mer il fallait attendre que le fauve se fatigue, progressivement. Puis une fois mort Teagi le halait contre son esquif, contre lequel il l’attachait, de manière à l’immobiliser et finalement lui maintenir la tête hors de l’eau. Après la longue agonie du monstre qui finissait par mourir d’asphyxie Teagi regagnait à la rame le lagon et dépeçait sa prise. Il disposait à présent de rames très efficaces. Le lecteur moderne pense sans doute que les outils produits par un artisan océanien étaient de médiocre qualité, fort longs à réaliser avec des outils primitifs. Prenons l’exemple de l’outil essentiel permettant la propulsion du canoë polynésien, la rame, elle mesure un mètre cinquante à deux mètres au maximum, pèse deux à trois kilos, souvent moins, elle doit permettre une utilisation facile assise, comme debout. Taillée dans un seul morceau de bois, elle comporte un manche de section circulaire, la bonne taille est celle qui permet au pouce de se refermer sur l’index. La pale a la largeur d’une main, pointue et arrondie, elle est amincie au maximum, elle a généralement la longueur du bras prolongé de la main. Le manche se termine par une forme en forme de champignon empêchant la rame de sortir facilement de l’attache à laquelle elle est généralement fixée, car perdre sa rame sur la mer peut entraîner la mort. La rame sert aussi à l’occasion d’arme et de massue, elle est généralement taillée dans le bois le plus résistant disponible, ornée de gravures et de sculptures.
Pour un artisan formé aux techniques du bois, même avec les instruments primitifs disponibles sur un atoll, la confection d’une rame nécessitait à peine une journée de travail à partir d’ une planche de bois. Ces planches étaient produites généralement en grand nombre, soigneusement stockées pour que le bois puisse sécher lentement, le plus souvent après avoir été conservés dans l’eau de mer quelque temps, opération qui augmente leur résistance. Les troncs écorcés et taillés en billots de la longueur finale souhaitée étaient donc débités en planches de trois centimètres d’épaisseur. Le plus souvent il s’agissait de troncs ou de branches bien droites d’arbres très solides, ayant une section d’un diamètre de quatorze à seize centimètres. Qu’il suffisait de fendre progressivement suivant le fil du bois en frappant alternativement une lame de bois dur servant de ciseau de taille. Ces ébauches étaient ensuite réduites par la taille à l’herminette et différents autres procédés pour donner une forme proche de l’instrument terminé qu’il suffisait d’affiner, pour en faire un outils efficace, léger, solide, bien équilibré.
Teagi réalisa plusieurs rames, comme il avait appris à en construire par les charpentiers et les sculpteurs. Ces rames solides et fines dont il prenait soin pendant le séchage pour qu’elles ne se fendent pas. Il en perça aussi le bois et le sculpta pour réduire au maximum cet inconvénient, il y fit même ensuite des incrustations de nacres. Il construisit ainsi les rames qui devaient servir de gouvernail et de dérive à son grand navire. Cent jours s’étaient écoulés depuis son arrivée sur l’île. Son départ était maintenant possible, mais il savait qu’il serait déraisonnable de partir sans avoir préparé soigneusement son navire. La première chose qu’il résolut fut d’établir une deuxième voile, en forme triangulaire tressée en fibre de pandanus et de coco, lourde mais résistante, pouvant être déployée dans le gros temps et par vent arrière. Un deuxième mât qui permettrait de la hisser fut établi sur la deuxième poutre de la plate forme. Il pouvait aussi servir de mât de rechange au cas d’avarie sur le premier.
Plusieurs grandes nattes de pandanus fourniraient le couchage, et couvriraient le toit lui permettant de s’abriter du soleil. Les pandanus fournissaient aussi les paniers avec lesquels il avait réalisé des outres étanches pour stocker même de l’eau douce. Il avait aussi établi des réserves d’eau douce dans des flotteurs, ayant aménagé de nombreuses noix de coco vidées soigneusement de leur amande par les yeux, et fermées ensuite par un bouchon bien étanche.
Teagi avait réalisé un modèle réduit de Vaka purua.
Appelée également « vaka turua », il s’agit d’une pirogue double ou catamaran. Ces pirogues qui étaient généralement utilisées pour les longues traversées inter îles, pouvaient mesurer pour les plus grandes jusqu’à 25 mètres de longueur et embarquer selon la tradition une cinquantaine de personnes ainsi que des provisions pour plusieurs semaines.
Le navire de haute mer terminé il décida de faire les essais en mer en sortant pour la première fois au large. Il fit facilement un tour complet de l’île avec un faible vent, le bateau se comporta bien aux différentes allures dés le début. Après avoir navigué trois jours en vue de l’île pour rechercher plus de vent et pour effectuer les mises au point, il explora les environs allant jusqu’à deux journées au nord, puis une journée à l’est, enfin deux journées vers le sud est. Il revint à son point de départ sans avoir aperçu le signe d’ aucune terre. Son nouveau mât d’arrière supportant une voile de fibres de pandanus tressée avec des fibres de coco qui surplombait le navire de six mètres résistait aux vents violent, mais il déchira rapidement ses voiles plus légères même cousues sur des tresses et des lattis. Pour diriger son esquif il se tenait sur un filet de corde entre les deux coques, la hutte basse située au milieu fait d’un treillage léger en arc de cercle le protégeait du soleil. Il y dormait la nuit sur des nattes. L’ensemble était très marin et remontait assez bien au vent sans risque de chavirer. Deux longues rames servaient de gouvernail et de dérive fixées aux poutres et à la coque par des cordages. La direction du navire pouvait facilement être réglée en fonction du vent et du courant il suffisait de déplacer ces rames pour les mettre en travers dans la direction recherchée . La voile latine à l’avant pouvait être établie pour mieux équilibrer la dérive face au vent, une ancre flottante permettait de maintenir le navire face aux déferlantes lorsque la mer était mauvaise.
Les deux flotteurs furent entièrement pontés et hermétiquement fermés par des peaux tendues sur un lattis. A l’intérieur fut chargé et soigneusement amarrée une réserve de noix de coco mures dans des filets, les outres d’eau douce furent remplies et embarquées. Pour vérifier que tout était prêt il fit encore un voyage vers le sud et un demi cercle vers l’est. Il revint alors à son île et attendit le signal qui signifierait son départ. Le renversement annuel des vents, l’arrivée des vents d’est.
Il y eut alors une tempête, l’île fut submergée et il faillit perdre presque tout. Son bateau amarré solidement à des arbres, rempli de blocs de corail, fut préservé. Il avait eu la chance de délivrer peu de temps avant tous les cocotiers voisins de leurs noix. Des jeunes otaries vinrent s’ébattre sur la plage. Il en blessa une à partir de son bateau, après avoir récupéré son harpon, comme il suivait la ligne terminée par une bouée qu’il avait laissé se dérouler, l’otarie fut subitement lancée en l’air et un grand requin blanc émergea. Ce monstre il le tua après l’avoir capturé au lazzo selon sa méthode puis achevé à la lance et au casse tête. Lorsque le fauve se sentit pris par la corde qui le retenait prisonnier il devint comme fou et attaqua le bateau, de son premier harpon à tête plate et barbelée, Teagi visa l’oeil gauche situé presque à la limite du blanc qui remontait sous le cône du nez monstrueux, la bouche était ouverte en cercle, montrant les dents en triangle équilatéral, espacées d’un espace identique servant à laisser la place pour celles de l’autre mâchoire. L’oeil éclata touché dans le blanc injecté de sang et le harpon pénétra , cette attaque rendit le fauve furieux, il se jeta sur la coque et referma ses mâchoires mais le casse tête s’abattit avec précision sur l’autre oeil qui éclata, le squale se dégagea puis après avoir sorti son museau jusqu’aux fentes branchiales replongea laissant émerger quelques instants sa dorsale gris sale et sa large queue. La ligne se tendit presque verticalement et la pirogue prit bientôt une vitesse importante. Le squale prit la direction du soleil couchant. Teagi jeta une ancre flottante faite de pandanus tressé. Le requin ne ralentit pas. Le jeune maori s’encorda plus serré pour passer la nuit sur la plate forme, confiant dans la protection offerte par les grand filets tendus entre les deux coques. Il sommeillait dans la nuit étoilée, fortement éclairée par la pleine lune lorsque la ligne se relâcha. Le grand squale avait décidé d’attaquer de toute sa puissance. La ligne se tendit vers la droite, le poisson fit un demi cercle sous la pirogue qui continuait sa trajectoire, il prit la coque droite à quelques centimètres de la poupe, la tira à lui dans l’eau et se mit à secouer violemment l’esquif de droite à gauche, cette manœuvre constituait un danger certain pour l’esquif qui risquait de se démembrer sous cette violence, s’étant assuré d’une main à une corde, Teagi fixa sa lance à la corde qui le retenait au niveau de la ceinture. Il put avancer assez pour planter l’arme dans le mufle pointu, il imprima alors des mouvements de va-et-vient pour déchiqueter les chairs, les pointes de dents de requin mako incrustées dans la hampe, taillaient et arrachaient des parcelles de chair, le requin devint comme fou sous la douleur et sous l’ivresse de son propre sang qui dégoulinait sur la peau blanche et grise. La lame oblongue avait percé et agrandi la narine. Après vingt secondes environ le squale desserra son étreinte, tout en continuant à gigoter dans l’eau phosphorescente, la lance toujours dans la narine. Puis il prit appui sur ses vastes ailerons latéraux et disparut dans les profondeurs au bout de ses vingt mètres de ligne, à présent il faisait route vers le soleil levant en se dandinant d’un côté, puis de l’autre, avec une vitesse accrue. Lorsque le soleil fut haut dans le ciel il se rapprocha toutefois de l’îlot et là , tenta sa dernière attaque; il passa sous les deux coques et attendit quelques minutes, puis il émergea presque verticalement, accrochant le filet de grosse corde de la mâchoire. La coque protégée par les renforts des caissons établis tous les trente centimètres et soigneusement répartis n’avait pas cédé à la puissance formidable d’une mâchoire énorme prolongeant près d’une tonne de muscles à l’agonie. La corde tint bon et la bête monstrueuse finit par mourir et couler à pic. Le jeune homme la hissa à la surface et regagna le rivage de l’île en hissant sa voile, il entra dans le lagon et arrivé dans une crique sableuse il put la dépecer. Il écorcha tout d’abord l’immense peau épaisse et solide avec un couteau muni d’une dent de requin unique coupante comme un rasoir. Il tira cette grande peau sur le sable et la mit à l’ombre. Il coupa alors la tête qu’il traîna sur le sable ,avec des burins il détacha les dents qu’il mit dans un sachet de peau, cinquante cinq dents au total sur deux rangées au moins d’un blanc translucide étincelant une fortune pour tous les peuples océaniens qui en font des armes et des outils. Lorsqu’ il ouvrit le ventre une surprise l’attendait, une tortue verte d’une trentaine de kilo s’y trouvait presque intacte, et il y avait aussi une jambe d’homme dont il ne restait plus que les os et les tendons. Le monstre venait d’une terre ou vivaient des hommes et en avait fait son gibier.
Le lendemain il traîna l’ensemble des chairs du mangeur d’homme au large et attendit vainement l’arrivée des requins qui viendraient se repaître de cette carcasse, seuls les oiseaux de l’île se jetaient sur cette provende. Il déchiqueta autant qu’il put toute cette viande et regagna la rive. L’otarie morte s’était échouée pendant la nuit. Il en récupéra la peau et la chair qu’il fit cuire et fumer après l’avoir détaillée en fines tranches et enfilée sur des baguettes. Il plut énormément et fit gros temps pendant toute une semaine, et lorsqu’il reprit la mer il ne vit plus de requins, des dauphins autour de lui s’amusaient à suivre son navire et à tourner autour de lui. Il en blessa un d’un coup de harpon, mais il ne put le capturer.
La mer était si riche aux alentours du grand courant qu’il n’avait besoin de pécher qu’une heure au maximum pour prendre des bonites ou des maïmaï (dorades coryphènes) ou tout autre poisson qui passaient continuellement au large à la limite du grand courant qui l’avait entraîné ici. Il vit souvent des baleines avec leurs souffles doubles pendant l’hiver austral, puis des troupes de cachalots qui passaient toujours dans la même direction faisant entendre un concert de mugissements. Quatre heures de mer par jour, lorsque le vent était bon, aller au large, trouver le poisson et revenir au rivage, tel était son programme. Ensuite il cuisait son poisson dans son four et cueillait quelques cocos. Souvent il observait les tortues qui accostaient. Après avoir creusé le sable il découvrait alors leur ponte. Il prélevait toujours moins de la moitié des œufs pour les manger. Il ne tuait que rarement les tortues elles même.
Cette vie d’artisan, de pêcheur et de tueur ne réclamait pas une grande dépense d’énergie. Il recherchait l’ombre et se baignait souvent pour se rafraîchir, ses travaux manuels étaient à présent peu intenses. Aussi serait il devenu obèse comme son hérédité l’y prédisposait sans une frénésie de dépense physique qui le prenait à la tombée de la nuit. Il se dépensait sans compter comme lors de son initiation faisant fonctionner chaque muscle et développant son endurance, son adresse sa résistance et sa puissance. Après environ deux heures d’entraînement physique quotidien, il se baignait dans le lagon et nageait dans les eaux chaudes , puis il s’endormait sur sa plate forme couverte d’un toit de pandanus. Le jour le réveillait avec sa féerie de couleurs chatoyantes. Il admirait ce spectacle avec recueillement et commençait par se baigner dans le lagon puis buvait un peu d’eau douce, fabriquait des cordes et des objets pendant que le soleil montait au zénith, lorsque le soleil baissait, il partait à la pèche. Il pécha les requins de récif, bouledogues, courtauds et agressifs qu’il avait trouvés au nord dans le talus qui longeait le court platier de l’atoll. Ces squales de taille modeste lui donnèrent un cuir excellent, et une grande provision de dents de petite dimension. Lors de ses explorations dans le lagon il s’était rendu maître de deux jeunes frégates, une femelle et un mâle qu’il avait apprivoisées, puis rendues à leur vie sauvage. Il pouvait les appeler très haut dans le ciel, elles venaient aussitôt tourner en voletant autour de lui pour attraper au vol les poissons qu’il leurs lançaient.
Les dizaines de frégates qui habitaient l’îlot nichaient dans les branches des tamanu on ati curieux arbre du lagon qui trempait ses branches tortueuses jusque dans les eaux salées alors que ses racines s’accrochaient au sol de sable corallien. C’est vers ces aires que Teagi chassait à la lance et à l’aide de son filet de fines cordelettes de coco, les caranques, les poissons perroquets, les poissons chirurgiens et les autres espèces qui abondaient. Une année s’était presque écoulée depuis son naufrage lorsqu’ il eut une vision de Make Make qui lui ordonna de quitter cette terre et de rejoindre son père vers l’est.
Cette vision lui montra son père qui débarquait sur Mataki Terani, le nombril du monde, sur la plage d’Anakena. Là ou les explorateurs avaient dressé le premier ahu. Il vit à quelque distance les pirogues démontées et retournées pour formant les premiers abris du peuple. Tout autour des plantations de taro, d’igname, des bananiers prospéraient.
Le vent d’ouest se leva quelques heures après cette vision. Le matin suivant il entassa tous ses biens dans sa pirogue de haute mer et détruisit par le feu toute trace de son passage, il sacrifia aux Dieux Tane, Takaroa, et Hiro.
Après quoi il prit le vent au large de son île lorsque le soleil était déjà très bas sur l’horizon. Le vent le poussa vers l’est, et très peu de temps après il rejoignit le courant de dérive qui l’avait conduit en ce lieu. Il se retourna alors et vit pour la dernière fois son îlot, le motu fantastique, le havre enchanté où l’attachaient tant de souvenirs disparaître dans le flamboiement des nuages empourprés. Puis dans le crépuscule violet. Le vent se leva cette nuit là sans excès et il filait bientôt sur une houle modérée qui soulevait les deux coques jumelles dans une danse harmonieuse. Il mit longtemps à s’endormir, la lune s’étant levée et les flots scintillants formaient une route argentée qui rejoignait la terre où brûlait encore le bûcher sacré chargé de rendre la terre vierge des constructions qu’il avait réalisées. Il soupira en humant l’air à présent vide des effluves merveilleuses de la terre. Il pensa aux autres hommes qu’il ne manquerait pas de rencontrer dans les îles où il débarquerait bientôt, ainsi qu’aux femmes auxquelles il ferait l’amour, aux danses et à la joie d’être à nouveau un homme puissant et admiré, un Ariki , un prince de sang héritier d’un roi. Il avait augmenté dans cette épreuve la force vitale qui était en lui, son corps et son âme s’étaient développés. Il avait augmenté le mana qu’il avait reçu à sa naissance de sa lignée remontant à Maui, et qu’il avait fait croître primitivement pendant la période de son initiation.
La puissance physique supplémentaire, l’habileté qu’il avait déployé comme artisan, la force magique qu’il avaient acquise en établissant son domaine sur cet îlot, toutes ces forces pourraient être transmises désormais à sa lignée future, qui en hériterait comme lui avait hérité des forces magiques, du mana qui l’habitait. Ceci comportait aussi le souvenir des techniques mises en œuvre par ses ancêtres. Pour que ceci devienne réalité, il devait maintenant rejoindre les siens.
TROISIEME CHAPITRE
MOTU ATUA TIKI (l’îlot du Dieu Tiki)
Après avoir fait naufrage sur un îlot désert, et avoir construit un navire de haute mer, Teagi prit la direction qu’avait suivi la migration d’Hotu Matua. L’est vers le groupe d’étoiles de lui connues par leur agencement. Il observait aussi la course de la lune et la croix du sud qui se trouvaient être sur des diagonales fixes. L’une marquait le cheminement de l’écliptique, le partage du grand océan (moana) l’autre le sud, qui devait rester à sa droite le plus possible.
Le ciel était pour lui comme une carte. Il avait été initié aux techniques de repérage et de navigation des ancêtres. Il savait lire la carte du ciel d’après les études reçues des maîtres navigateurs, des contes mnémotechniques, des chants, des cartes apprises par cœur, mais aussi avec sa science magique.
La technique est simple, la lune ou les étoiles de la croix du sud fournissent les deux lignes, l’étoile située au dessus de la tête au début de la nuit est le repère, mais ceci change avec les saisons bien sûr, à partir de cette étoile une fois repérée on lève la main en pointant vers l’est, les doigts forment un guide , si l’étoile reste à la même place jour après jour c’est qu’on ne dévie pas de la route, si cette étoile n’est pas la bonne il faut en trouver une plus vers le sud ou vers le nord. Et il y a aussi bien sûr une connaissance d’une carte qui est inscrite dans la mémoire
Il connaissait les différentes formes de houles, les courants et les différents vents. Il pouvait lire la météo dans le lever ou le coucher du soleil. La lune traçait elle aussi sa navigation dans le ciel étoilé. Vénus était là souvent comme un point d’ancrage. Et il y avait autour d’eux une foule d’étoiles arrangées en dessins plus ou moins reportés sur des tapas par les savants maîtres de navigation (les Tahunga) qu’il connaissait par cœur comme autant de tatouages indélébiles dans sa mémoire. La carte du ciel permet de lire la longitude et la latitude avec beaucoup de précision, encore faut il avoir acquis les connaissances nécessaires, savoir empirique entièrement inscrit dans la mémoire des initiés.
Cette connaissance est immémoriale, l’humanité la détient depuis que l’homme est apparu sur cette terre. Si aujourd’hui il l’a en partie perdue, c’est que des instruments lui donnent l’heure et le cap. S’il n’avait pas ces instruments il lui suffirait comme avant de lire le ciel, et les différents indices naturels. La carte des étoiles est une des plus belles constructions de la Nature visible de notre position relative dans l’Univers. La force de gravité donne notre azimut, au dessus de notre tête se trouve à l’heure propice du milieu de la nuit notre étoile de référence. Bien sûr ce n’est pas la même lorsque les saisons se succèdent et que la terre se déplace autour du soleil, mais à chaque passage particulier, le même cadre apparaît. Aussi est il facile pour celui qui connaît les 4 saisons de placer les étoiles et de connaître la route vers l’île éloignée.
Le jour elle est souvent inutilisable car toute la partie du ciel se trouvant vers le soleil ne nous est alors connue que lorsque la terre tourne autour de cet astre donc une demi année plus tard. Mais même le jour il y a parfois la lune, et surtout le soleil est là pour définir la direction essentielle. La lune et ses différentes phases donne aussi un rythme à ces changements. Chaque lune nous nous déplaçons d’un angle identique par rapport à la carte du ciel et nous voyons donc au cours de l’année un panorama qui se déplace, mais qui revient sans cesse à la même place l’année suivante. Les saisons sont ainsi connues même dans les zones proches de l’équateur, marquées par des signes stellaires pertinents. Des repères sont pris sur des montagnes lorsque le soleil se lève ou qu’il se couche, il y a aussi le lever des pléiades qui sont la marque d’une césure, d’un instant « T ». Mais ces signes ne sont évidemment pas les mêmes de chaque terre, ou de chaque point de l’océan. L’équinoxe de printemps de l’hémisphère sud, correspond à notre automne et l’inverse est vrai aussi. La constellation qui marque cette date à un endroit de la terre est connue. Comme l’est alors la carte du ciel qui varie peu, seules les planètes se déplacent par rapport à ces repères. Pour observer et décrire ces images il est nécessaire de construire un observatoire dans un cadre naturel et de dessiner les cartes du ciel en passant de longues nuits à observer et analyser les mouvements des planètes et la dérive des étoiles. Des montagnes du paysage, ou des blocs de pierre peuvent servir comme serviront aussi des cordes tendues par la pesanteur, ou encore des tubes ou des puits.
Le maître dessine ses cartes ainsi en segmentant le ciel qu’il voit par des lignes imaginaires. Une fois chaque quartier établi, il divise ce quartier généralement par trois, le centre, et les deux bordures, et il tourne comme le soleil dans cette direction. Alors il est simple de s’y reconnaître il suffit de savoir les chiffres qui conduirent au repère voulu à partir d’un point particulier. L’étoile d’Hiva était ce point pour Teagi. Il avait situé la position de son îlot. Il savait la position du lieu où ses parents allaient s’établir à l’est. Il savait ainsi repérer toutes les terres, celle ou il se trouverait et celles des autres îles. Ceci peut nous paraître magique, mais il n’y a là aucune magie. La carte de la Polynésie des maoris était fort précise, établie sur une feuille de tapa, elle représentait prés de 100 groupes d’ îles et îlots, ce qui surpasse
la mémoire de beaucoup d’êtres humains de notre temps, car ils sont peu habitués à mémoriser des cartes du ciel. Mais comme il s’agissait d’un dessin mnémotechnique presque tous les enfants en savaient les directions et les places, il leur suffisait de se rappeler de l’histoire contée et de dessiner les formes ainsi révélées. Chaque terre a une étoile particulière qui passe à son zénith à un moment donné de l’année, au milieu de la nuit, qui se repère par la course de la lune ou des planètes mais comme on connaît par avance cette course il est simple de faire une translation, et si le ciel demeure couvert presque toute la nuit apercevoir une partie seulement suffit à localiser sa situation il suffit de connaître ou d’apprécier l’heure nocturne. Vers l’équateur le jour et la nuit varient peu en durée ce qui simplifie aussi l’estime, le milieu de la nuit est aussi donné par des signes et des rythmes qu’il suffit de mémoriser. Ainsi pour savoir son chemin il suffit de suivre la carte du ciel vers l’étoile de la terre qu’on veut atteindre. Ceci doit naturellement dériver avec les différentes saisons, et il faut connaître au moins deux cartes du ciel pour arriver à adapter la course nécessaire vers la terre qui se trouve dans l’océan sans limite (Moana). Il n’y a aucune magie intuitive et religieuse dans cette science des astres, même si souvent elle est plus une affaire de formule fixant un périmètre que formalisée par des équations. Les instruments de visée des navigateurs polynésiens étaient généralement la main tenue ouverte ou un simple bâton tenu à bout de bras. Des encoches ou des repères pouvaient aussi être mis, et codés sur un tatouage ou sur une rame. Une histoire construite pour cet usage mnémotechnique permettait généralement de fixer le souvenir des terres connues en fonction des différentes personnalités qui s’y trouvaient représentées. Dans toutes les civilisations pratiquement la carte du ciel a donné ce type de légende. Les prêtres ont eu toujours la science des étoiles en dépôt, ils y lisaient l’avenir, y reconnaissaient le passé, et marquaient aussi les territoires avec ces signes sur lesquels l’humain n’a aucune maîtrise. Teagi pouvait par la lecture du ciel savoir où il se trouvait, il allait vers les îles dont il avait connaissance sans les avoir abordées jamais, il ne pouvait se tromper car sa route lui était connue parfaitement. Il connaissait même la situation de son étape ultime révélée par le Dieu Hiro. Les Arikis et les Prêtres utilisaient pour correspondre le langage parlé jadis au temps des premières longues traversées, devenu depuis un langage magique et religieux qui était inconnu des autres parties de la société, et pratiquement incompréhensible pour eux. Ce langage des prêtres qui reprenait sans cesse ces considérations sur les constellations stellaires rapportées aux tabous et aux différents rites exigés par les Dieux. Teagi se trouvait alors dans ce qui est aujourd’hui le groupe des îles Tonga. L’île dont il est question maintenant doit encore s’y trouver. Peut être est ce aussi dans un groupe voisin toutefois.
Lorsqu’il eut navigué pendant sept journées, ayant rejoint le grand courant équatorial, il aperçut une fumée noire sur sa droite (tribord), mais sans voir aucune terre. Toute la nuit il gouverna vers cette direction en lisant sa route dans le ciel, au matin il était en vue d’ un îlot éruptif situé à droite du soleil levant. Un panache de fumée s’en élevait poussé par le vent vers le nord est. La brume de la nuit se dissipa rapidement, la mer se mit à clapoter en longues ondulations qui se brisaient en gerbes scintillantes sur les étraves. La voile tendue et ventrue comme une coquille d’ huître couvrait de son ombre le plancher séparant le flotteur de la coque principale. Assis dans la position du lotus, des lignes déroulées et mises en fuseau à ses pieds, il attachait les appâts disponibles. Le matin était alors le meilleur moment pour la pêche journalière, la nuit le plancton montait à la surface et était suivi par les bancs de petits poissons que pourchassaient les maquereaux et les thons. Ces appâts étaient des poissons volant, des exocets qui s’abattaient contre la voile pendant la nuit et tombaient dans le filet tissé à partir de cordelettes en fibres de coco tressées, tendue entre la coque principale et le flotteur. Ce matin là il prit d’abord une bonite pratiquement à la surface dans son sillage à vingt mètres, et au moment ou il la dépeçait il aperçut la voile d’un marlin émerger à cinquante mètres. Le poisson naviguait sur une route pratiquement parallèle. En s’approchant de lui en obliquant sa direction, il admirait la voile bleue avec des ocelles rouges. Ayant récupéré ses lignes, il se munit de sa plus longue perche à laquelle il adapta le noeud coulant plombé d’une boule de corail . Il amarra la corde du nœud coulant et gouvernant de la main gauche atteignit le poisson par l’arrière. Il savait bien qu’il n’aurait qu’une très petite chance de réussite , le nœud coulant filait dans l’eau transparente. La queue du marlin y rentra, il n’eut qu’à tirer pour refermer le piège. Il avait abattu sa voile. Le grand poisson réagit aussitôt sortant de sa somnolence en sondant brusquement puis en effectuant une série de sauts suivi de cabrioles. La ligne résista aux sauts, le marlin fit alors une pirouette tournant sur lui même, sonda et en remontant presque verticalement se jeta sur l’embarcation le rostre en avant. Son épée traversa la coque, le bois éclata, l’espadon fut alors immobilisé. Teagi se retrouva projeté en arrière et faillit passer par dessus bord. L’ayant harponné prés du cœur, il réussit à le tuer. Celui ci dans ses derniers soubresauts brisa son rostre qui éclata. Après avoir réparé ses avaries, bouché et calfaté la coque Teagi écopa l’eau embarquée. Puis il découpa sa proie. Il avait taillé plus de la moitié de la chair lorsque l’attaque du grand requin se produisit. L’île fumante n’était plus qu’à deux milles, conique et noire. Elle vomissait un torrent de fumées aussi sombres que celles provenant d’un feu de feuillages verts. L’air sentait la pierre brisée et l’œuf pourri, l’âcreté de la pluie qui s’était mise à tomber piquait ses yeux et le faisait pleurer. Un museau conique noirâtre émergea, une formidable gueule s’ouvrit sur des dizaines de dents étincelantes, taillées en triangles équilatéraux. Le grand requin blanc prit dans sa gueule l’espadon, puis secouant sa tête il entrepris de couper une bouchée énorme. Prenant son aviron à pleines mains Teagi frappa de toute ses forces le museau pointu, puis visa l’œil qu’il manqua .La terrible mâchoire s’était refermée sur la carcasse de l’espadon et avait tranché une bouchée concave large d’une coudée . Frénétiquement le poisson géant engloutissait en se dandinant surveillant le pêcheur de son œil sombre et rond ses grandes narines palpitaient et sa gigantesque queue produisait un remous formidable. Teagi saisit le harpon et frappa de biais au niveau de l’aileron latéral droit. Alors le requin délaissa le poisson, il prit la coque du bateau entre ses mâchoires et l’écrasa, il la fit craquer comme une noix. Teagi saisit son deuxième harpon à la pointe de dents de squale et frappa le ventre blanc qu’il pénétra, puis tirant à lui son arme il fendit le ventre sur plus d’un mètre de long. Les tripes du monstre s’échappèrent et la mer se teinta de rouge sale. Malgré cette blessure le grand requin sonda subitement et disparut. Quelques temps s’écoulèrent alors pendant lesquels Teagi se remit de ses émotions. Il prit le vent et échoua son navire sur une plage de sable noirâtre qui formait une presqu’île prolongeant une falaise . L île était partout abrupte, entourée de falaises ou de pentes raides, sauf à cet endroit, qui s’élevait en pente douce jusqu’à un cirque formé de gradins de tuf rougeâtre. Des oiseaux marins de toutes sortes d’espèces nichaient en abondance sur toutes les pentes, et des milliers formaient de grands vols tournoyants autour des tourbillons de fumées que crachaient les foyers volcaniques. La baie ou il aborda était alors protégée du vent face à un petit cône éruptif duquel sortait une fumée rosée et blanche, acre, des gerbes de lave formaient des jaillissements sanguinolents. La terre tremblait et semblait respirer, des grondements sourds se faisaient entendre continuellement.
Un grand monolithe sombre, le cratère principal dominait de sa masse impressionnante. Une colonie d’otaries occupait la courte grève située sous la falaise.
Il n’y avait aucun signe de végétation sur toute la surface du sol.
Mais un élément extraordinaire figurait dans ce paysage vision proche de celle de l’enfer dantesque. Sur la pente du volcan se découpait distinctement une sorte d’œuf rond et chatoyant, qui avait des reflets gris bleutés, et qui prenait aussi des teintes irisées comme la nacre. Il se mit à genoux pour mieux observer ce phénomène, et commença à en étudier les contours et les caractéristiques, tout en traçant des repères sur le sable de la grève, il eut bientôt une image assez précise et nette de cet objet, mais la forme aperçue disparut alors dans un nuage de vapeur. Elle était fort loin à des milliers de pas de marche dans la rocaille.
Sur le sable étaient tracées les informations qu’il avait saisies, pour les conserver il les traça sur sa rame avec un charbon de bois, et il devait les graver ensuite. Cette opération lui était familière comme le relevé des cartes marines que son peuple faisait, et que tous les jeunes maoris apprenaient à réaliser. Une fois tracées ces cartes pouvaient être mémorisées par diverses techniques. Le jeune maori apprenait la science par les cartes et les dessins, il comprenait la nature et la vie par ce même moyen, il éduquait constamment sa mémoire, qui concernant les mots et les textes devait être infaillible. Pour de grandes études il pouvait construire une histoire qui représentait par des images mentales le cheminement de la pensée, et les mots les plus difficiles étaient alors facilement recherchés dans ce dessin, une fois l’image bien intégrée, un poême et un chant pouvait aussi aider à mémoriser cette histoire.
Toute science est faite de dessin, de signes, de mots, de phrases qui sont des enseignements. La science maorie elle même était constituée des résultats des travaux des savants anciens ,les tahungas. Leurs successeurs devaient transmettre les bonnes recettes et les bonnes données. Lorsqu’une technique ou un outil sont créés avec succès, transmettre cette donnée et cet outil devient l’objet de la science.
Teagi savait que cette apparition était magique et qu’il devait en conserver une mémoire précise. Il en tirerait ensuite une description selon les normes des poésies et des généalogies qui transmettaient les savoirs du peuple maori.
La présence des oiseaux qui nichaient en abondance laissait supposer que le volcan n’était pas entré en éruption depuis quelque temps. Il hissa son navire sur la grève, en le faisant glisser sur les rames et les perches jusqu’à des rochers énormes où il l’amarra solidement. Puis il fit du feu avec des bois flottants trouvés sur la plage. Après avoir fait des exercices de danse guerrière (haka) pour fortifier son corps et son cœur, il chanta le chant initiatique de l’homme oiseau et il s’endormit. A son réveil il devrait offrir un sacrifice aux esprits du lieu, à Oro qui habite dans le cratère des volcans. Il fut réveillé par un bruit inhabituel, il vit alors un spectacle extraordinaire.
La lune se levait à l’horizon, lorsqu’un cercle aussi grand qu’elle , au reflets verdâtres et orangés parut au dessus de lui presque à la verticale et se mit à grossir lentement en devenant plus brillant, il entendit une sorte de sifflement très léger. Le mystérieux objet devint subitement ovale vira de bord et se laissa comme tomber, il disparut dans le volcan. Teagi se leva alors et en courant gravit la pente du volcan dans la lumière verdâtre de la lune, arrivant au sommet, il vit juste devant lui, à trente pas en contre bas un grand œuf brillant comme une nacre. Il se jeta sur le sol et observa l’étrange créature, car dans son esprit il n’y avait pas de doute, c’était une sorte d’oiseau, ou la forme prise par un Dieu. Longtemps rien ne se produisit, puis une ouverture circulaire se dessina, un petit homme rouge, chauve et nu apparut, il leva ses bras mains ouvertes vers le ciel, puis, après quelques instants, il se laissa glisser à terre. Couvert de tatouages, il portait un collier fait de boules multicolores, des bracelets chatoyants, et de grosses boucles d’ oreilles. Teagi reconnu Tiki, le dieu fœtus, et se prosternant lui adressa la parole en disant « O Tiki épargne la vie de ton serviteur ! ».
Les grands yeux en soucoupe ovales se tournèrent vers lui, le petit bonhomme se mit à rire et l’ interpella ainsi en maori « Homme redresse toi et approche toi de moi. » Teagi obéit sans crainte et s’approcha assez près pour pouvoir toucher Tiki qui atteignait à peine sa taille. Mais lorsqu’il essaya de le faire, un mur invisible l’ arrêta . Le Dieu lui parla ensuite longuement et Teagi lui répondit tout à fait naturellement et sans crainte. Ils s’étaient assis l’un prés de l’autre. Teagi raconta les épisodes de sa vie à Hiwa, et à Marae Renga , le départ de la migration et son naufrage. Cette discussion dura longtemps le jour se fit, puis la nuit vint.
Le Dieu lui demanda alors de pénétrer dans l’œuf scintillant, lorsqu’il voulut toucher la paroi il fut surpris de ne pouvoir approcher sa main à plus d’une coudée, une sorte de peau froide, souple et dure, mais aussi lisse et sans élasticité et ne produisant aucun frottement se trouvait là. A la suite de Tiki, il pénétra en rampant dans une pièce ronde minuscule, la porte se referma, une lumière bleue douce diffusait dans la pièce. Alors il fut pris d’un vertige soudain, la pièce minuscule se mit à grandir démesurément jusqu’à ce qu’il se trouve dans une vaste salle . Une petite ouverture circulaire se fit alors près de lui et Tiki l’engagea à pénétrer à sa suite dans une vaste salle circulaire qui lui sembla infinie en forme de coupole, mais qui semblait aussi ne mesurer que quelque dizaines de mètres de haut seulement. Des constructions rectangulaires y étaient disposées en cercle à quelque distance, l’ensemble des murs et des poteaux étant couvert de fresques multicolores représentant des animaux, des plantes.
Ayant franchi les limites de ce cercle d’habitations et de constructions ils pénétrèrent dans un jardin. Presque tous les arbres portaient des fruits et des fleurs à la fois, il y avait aussi des bananiers, des cocotiers, des pandanus, des arbres à pain, des cannes à sucre, ainsi que des taros, des ignames, des sortes de calebasses énormes en fait des courges de toutes les tailles et de toutes les formes et couleurs. Au milieu se trouvaient des sources abondantes, régulièrement une pluie douce tombait.
Aucun être vivant n’y paraissait , pourtant l’ensemble donnait l’impression de vivre. L’air y était délicieusement embaumé d’une senteur suave de tiaré.
Tiki lui offrit à manger un fruit délicieux d’une espèce qui lui était inconnue, qui poussait en abondance dans un verger, un seul fruit suffit à apaiser sa faim et sa soif. Puis il l’ entraîna dans une construction proche et il lui montra sur un vaste écran une chose extraordinaire, il se vit chassant et tuant le grand espadon, puis il revit l’attaque du grand requin blanc. Alors ayant raconté en quelques phrases son naufrage, il demanda à Tiki ce qu’était devenu Hotu Matua. Le Dieu ne lui répondit pas. Mais sur l’écran se trouvait désormais la vaste mer sans limite. Après une rapide course dans le ciel, il vit deux navires sur la mer dans le clair de lune. A la barre du premier qu’il reconnut comme étant Te Arawa le navire de son père se tenait un homme pensif ,il reconnut Ira. Plus loin sur la plate forme était assis le roi Hotu Matua tenant dans sa main droite son sceptre. Teagi l’entendit alors dire nettement à plusieurs reprises: « Qu’es-tu devenu mon fils Teagi?». De nouveaux aménagements avaient été réalisés, des sculptures nouvelles ornaient les poupes et les proues. Les guerriers dormaient sur le pont. Le pont était chargé de victuailles et de matériaux divers. Le navire rentrait visiblement d’une expédition d’exploration et de commerce. Le navire qui l’accompagnait lui était inconnu.
Laissant les navires en arrière, ils survolèrent l’océan et arrivèrent à Mataki Terani sur la plage du village royal. Celui ci comprenait trois grandes maisons couvertes de chaumes. Il y avait aussi les cases destinées aux poulets, et une palissade de pieux était érigée autour du bois sacré ou se trouvaient les images des Dieux. Ils pénétrèrent dans la case royale. Sa mère s’éveilla subitement et se levant elle tendit les bras vers lui en disant: « Mon fils Teagi.. » Alors l’écran se brouilla et tout disparut.
Il rêva encore longuement comme s’il avait habité dans cette enceinte pendant cinq jours. Dans ce monde ne se trouvait pas de soleil, mais une douce clarté semblant provenir du plafond, on y trouvait presque toutes les plantes qu’il connaissait, de toutes les tailles, mais bien plus productives, indemnes de maladie. Il n’y rencontra pourtant aucun insecte et aucun animal. Ensuite il fut conduit à une autre porte, qui s’ouvrit sur un autre jardin.
Plus loin à quelques heures de marche se trouvaient une grande surface plantée en arbustes et fleurs de toutes sortes. Pour y pénétrer il fallait passer sous une cascade d’eau qui en délimitait l’entrée. Des oiseaux de toutes les couleurs y chantaient délicieusement. Ailleurs se trouvaient des papillons en grand nombre.
Une sorte de pluie bienfaisante s’échappait parfois aussi du sol pour asperger les plantations. Quelquefois il y avait comme une sorte de brouillard qui faisait disparaître le paysage, de place en place se trouvaient de grands arbres immenses.
Ailleurs des animaux étrangers à Teagi étaient rassemblés dans des cages et des enclos, il y avait aussi les animaux qu’il connaissait des coqs de races différentes, des porcs, des tortues, des casoars et des moas de Nouvelle Zélande…
Chaque jour amenait une nouvelle découverte. Il voyagea dans des mondes inconnus.
Il vit la terre comme jamais il ne l’avait vue très haut dans le ciel. Et descendit dans le cœur de la terre dans la fournaise d’Oro.
Un soir Tiki prit congé de lui en lui donnant une sorte de pierre rouge et brillante, lui ordonnant de partir vers l’est dés son réveil. Lorsqu’il se réveilla, il était sur la grève, à quelques pas de son navire.
Il crut tout d’abord sortir d’un rêve. Aucune chose n’est comparable au sortir de la rencontre avec les Dieux qui viennent sur terre pour voyager et se distraire.
Il se souvint alors des conversations qu’il avait eu avec Tiki sur les Dieux maoris.
Au début avait il dit il y avait PO l ‘obscurité , le vide KORE, la lumière AO, le père du Ciel RANGI, et sa vahiné la Mère Nature PAPA. Ces deux derniers étaient venus dans cette région de l’espace immense des Cieux, et du mariage de ce couple divin primordial proviennent tous les Dieux Issus de la Nuit. Les ATUA FAARE PO. Les Maoris les nomment NGA TAMA A RANGI, ce qui veut dire les fils du Paradis…Tous les enfants du couple primordial étaient mâles ce qui posait un problème pour leur reproduction et leur descendance. Alors TANE connut HINE AHUONE , fille de la terre PAPA, il lui insuffla la vie ; de cette union avec une terrestre naquirent les Dieux de ce monde, et une fille HINE NUI TA PÔ : la déesse de la nuit et de la mort. Mais elle fit sécession et s’installa dans l’enfer, elle se considérait comme étant la fille de TANE qui l’avait créée et rendue immortelle, et elle refusa finalement de revenir sur terre pour s’occuper des enfants qu’elle avait eu avec TANE, elle est la gardienne du lieu situé dans l’espace qui est l’enfer des Maoris. C’est là qu’elle accueillera son descendant le demi Dieu MAUI . C’est en essayant d’acquérir l’immortalité que Maui trouva la mort ensuite , en pénétrant dans son vagin , il devait atteindre cette limite et la dépasser pour lui et pour les humains, comme le feu fut donné aux humains, ainsi l’immortalité leur aurait été apportée en cadeau. Mais lorsqu’il tenta son voyage un oiseau moqueur se mit à rire avec un bruit tellement fort que la Déesse de la Mort se réveilla et Maui mourut…
Alors Tiki prit une tablette et enseigna ainsi.
Il y a autant de mondes semblables à la terre qu’il y a d’eau dans l’océan, et ces innombrables mondes sont tous habités, chacun d’eux comporte des Dieux. Parfois un Dieu vient faire son jardin ici, mais ce qui est certain c’est que l’humain actuel est très primitif, et que son temps est court, il meurt, et de lui ne reste plus rien, son esprit seul part dans la grande fontaine des âmes et là il trouve sa récompense ou son châtiment. A condition d’avoir laissé sur terre un bon souvenir il peut être parfois renvoyé ici pour aider au plan divin. Car il y a un Dieu Principal :Takaroa , substitut et subsidiaire du Créateur de toutes choses existantes et non existantes, venues et à venir, qui dirige tout de l’Univers et qui a voulu que les mortels existent un temps avant de redevenir une fois leurs actes humains accomplis comme les Dieux immortels. Et bien sûr leur corps terrestre de matière vivante ne saurait être conservé dans l’autre monde, juste une image virtuelle de ce corps mortel subsistera, un corps de lumière capable de passer d’un monde à l’autre…c’est du moins ce que moi Tiki croit …
Et Tiki lui dit aussi qu’il n’était pas de cette Terre et qu’une étoile des sept petits yeux était sa dernière patrie, et que les Dieux maori étaient peut être d’autres Dieux provenant d’autres étoiles, que la sienne, mais il ne les connaissait pas.
Sur la question de l’immortalité il lui avait dit que cette question était stupide, rien n’est en effet immortel, mais que vivre longtemps était possible à condition de connaître une magie que seuls les Dieux possèdent, un breuvage magique, et aussi se transformer en se baignant dans une fontaine sacrée.
La nuit finissait. Il vit à la forme de la lune, que le temps écoulé devait être d’une dizaine de jours. Il retrouva dans sa ceinture la pierre donnée par Tiki. Lorsque l’aube apparut il poussa son navire à l’eau, mis en place sa voile et fut entraîné rapidement vers le large. Se retournant il vit le volcan entrer en éruption en projetant des gerbes de feu, un gigantesque panache de suie noire monta dans le ciel, il fut bientôt presque dans le noir. La pluie qui se mit à tomber avait un goût de silex, d’obsidienne et de cendre, et était toute noire. Il obliqua vers le sud puis reprit la direction de l’est ayant retrouvé le courant qui se dirigeait dans cette direction. Il était alors encore très proche de l’équateur, et bientôt il plongerait vers le sud lorsqu’il atteindrait les atolls bordant la grande fosse océane il devrait alors rejoindre une île des Samoa vers le sud est, puis le grand sanctuaire de Raiatea, Tahiti, Oeno (Mangareva) et finalement Rapa nui vers l’est passant prés de deux îles hautes (Pitcairn et Ducie). Il resterait alors moins de dix jours de navigation, et il faudrait obliquer vers le sud pour trouver Mataki Terani. Toutes ces informations il les avait apprises par cœur en étudiant les cartes qu’Ira avait faites lors du voyage de reconnaissance. Comme tous les initiés il avait appris la situation des terres du domaine maori dans l’immensité de l’océan que son peuple traversait et occupait depuis plus de mille ans.
Il savait qu’il ne rencontrerait plus que des maoris dans l’espace maritime situé à l’est. Aucune tribu mélanésienne ne s’y était encore implantée.
Ayant habité les contrées de l’ouest Pacifique, il connaissait bien les autres races humaines locales distinctes de son peuple, qui ne s’exprimaient pas avec des mots connus. Il y avait parmi eux des Mélanésiens, des Australiens, et aussi des Papous, la plus part étaient des guerriers farouches chasseurs de têtes, qui passaient l’essentiel de leur temps à se faire la guerre rituellement. Très peu étaient restés des pêcheurs et des marins. Ils n’avaient pas de royauté et de culte unitaire, leurs communauté ne réalisaient pas de grands vaisseaux de haute mer. A l’origine ils étaient arrivés dans les îles sur de grandes pirogues liées entre elles par des poutres, certaines propulsées par des voiles, la plus part essentiellement par l’énergie des rameurs. Certains sages parlaient de radeaux faits avec des grands bambous, de plus de trente mètres de long pouvant contenir toute une tribu, plus de cent personnes avec tous leurs biens. Les voiles et les rames étant gigantesques comme ces constructions. Teagi ne vit jamais ces embarcations. Les plus grands bambous de Nouvelle Guinée avaient quelques dizaines de mètres de haut seulement, et pouvaient difficilement convenir à la construction de radeaux efficaces permettant de se diriger en haute mer. Ils pourrissaient aussi très vite au contact de l’eau de mer. Les grands navires maoris étaient eux construits à partir d’une quille taillée dans les plus grands et plus gros arbres disponibles. Souvent millénaires ces arbres une fois abattus n’étaient plus disponibles pour les générations futures. Ensuite il était posé des membrures à l’intérieur de cette quille, cousues avec des cordages. Et des planches y étaient enfin fixées pour augmenter la taille. Les navires étaient le plus souvent des catamarans comportant deux coques le plus souvent jumelles. Ils faisaient environ dix mètres de large et une trentaine de long. De tels monstres nécessitaient des soins importants pour leur fabrication, leur entretien et leur remisage. Ils ne pouvaient rester dans l’eau ou les anatifes les perforaient, ni à l’abandon sur une grève ou le soleil et les termites les détruisaient rapidement. Un hangar était généralement confectionné avant leur création pour les contenir. Il fallait une grande équipe pour seulement les mettre à l’eau et les sortir de l’eau. Seuls les rois les plus puissants pouvaient supporter les dépenses énormes nécessaires à la construction de ces navires. Toute la tribu participait en fait à cette tâche sous la conduite des experts. Plusieurs chantiers étaient ouverts dans les forêts, les quilles étaient fabriquées sur place après la coupe des arbres nécessaires, elles étaient ensuite déplacées jusque sur le chantier de construction, les différentes membrures étaient faites à partir de modèles tracés sur des tapas grossièrement taillées puis ajustées avec précision.
Ces grands navires étaient généralement pontés environ à deux mètres au dessus de la ligne de flottaison se trouvait généralement une vaste terrasse prolongée par des échelles latérales pour y établir les cordes soutenant les mâts et les voiles. La poupe et la proue étant le plus souvent surmontées d’un poste d’observation situé parfois jusqu’à dix mètres de haut. La case du roi se trouvait au centre. Tout autour se trouvaient d’autres constructions protégeant les autres passagers et leurs biens. Teagi avait assisté à la construction de la flotte de Hotu Matua, et y avait participé comme élève charpentier, élève constructeur, et comme voilier, fabriquant de nombreux carrés de voiles avec des fibres de pandanus et de cocotier. Il avait aussi participé aux travaux des cordiers qui assemblaient leurs productions dans de vastes ateliers. Les cordages étaient l’élément essentiel des voiliers, ils permettaient de tenir les voiles en forme d’aile d’oiseau, de les régler. Sans eux aucun navigation au long cours n’était possible. Ils servaient aussi à lier tous les éléments du navire entre eux. L’étanchéité était assurée par des calfatages de fibres et de différentes gommes et liants naturels, qu’il fallait chauffer le plus souvent. La sève de l’arbre à pain était préférée le plus souvent. Voilà comment étaient faits ces navires qui permirent la conquête des îles polynésiennes, et celle de la Nouvelle Zélande par des peuples qui ne possédaient que des outils en pierre et en nacre. Les mêmes techniques que celles du néolithique. Et leurs navires étaient efficaces, solides et rapides, capables de durer plusieurs vies humaines si ils étaient bien entretenus. Ils étaient généralement tirés au sec après chaque voyage et soigneusement calfatés et enduits d’encaustique divers et de diverses mixtures repoussantes pour les termites et autres insectes xylophages chaque fois que c’était possible.
Ces peuples avaient aussi appris à survivre en pleine mer, en pêchant et en utilisant une cargaison de fruits, de légumes et autres victuailles. Ils savaient conserver l’eau douce dans des outres, et toutes sortes de récipients très étanches et recueillir l’eau de pluie.
Ce que nous savons d’eux est peu assuré. Tous ces hommes de l’âge de pierre sont des hommes modernes, ils ne sont pas une race bien distincte de l’européen blanc défini comme caucasique ou aryen, de la forme mongoloïde qu’on trouve en Asie de l’est. Mais ils sont profondément différents. ils sont arrivés au centre de l’Australie bien avant que l’homme moderne n’aborde en Europe en passant par la Mésopotamie, l’Egypte, l’Afrique du nord et l’Espagne, d’autres viennent ensuite du centre de l’Europe, et leur foyer semble être le Caucase et les plaines de la mer noire. L’homme moderne se signale presque en même temps aux quatre coins du monde. En Europe, en Asie, en Afrique du nord surtout en Egypte et même en Amérique ce qui est fort étonnant, d’autant plus que l’homme ancien de l’Eurasie, dit de Neandertal semble n’avoir jamais mis les pieds en Amérique, alors qu’il vivait lui en harmonie dans des zones glaciaires, et que le passage de Behring si souvent cité comme voie de communication lui était donc forcément ouvert. Ceci laisse à penser que l’homme moderne naviguait au bord des mers sans doute sur des kayaks fait de peaux d’animaux tendues sur des charpentes en bois. Ou quand c’était possible sur des pirogues, pour ceci il fallait nécessairement des grands arbres. Et que la voie de Behring si elle a été utilisée n’est sans doute pas la plus féconde . A cette période une grande partie du désert du Sahara était couvert d’une savane presque continue, où la vie était facile pour un groupe de chasseurs qui devinrent rapidement des nomades possédant des troupeaux de bœufs domestiqués, puis sans doute des cultivateurs de céréales. L’homme moderne sous sa forme austronésienne arriva semble t’il presque en même temps en Australie et au Brésil, ce qui laisse penser qu’il était déjà marin, car il y avait des glaciers qui empêchait le passage par l’Amérique du Nord, mais certainement il ne traversa pas l’Atlantique, ni le Pacifique directement il se contenta de suivre les côtes en chassant les mammifères marins. Ce rameau racial de l’homme occidental que nous appelons parfois de Cro-Magnon venait probablement d’une petite patrie très isolée, peut être d’une île, ou d’une vallée perdue bordée de déserts. On conjecture qu’il serait venu se mêler aux formes anciennes donc à de Neandertal et à la forme asiatique pour former les deux races eurasiennes, et on prétend qu’il était Africain et sans doute fortement pigmenté. Tout ceci repose sur le fait que les populations les plus anciennes d’Asie, ou considérées telles sont négroïdes. Ce seraient les Papous en Nouvelle Zélande, qui seraient même les plus anciens cultivateurs et arboriculteurs, les Négritos de l’Inde et les ancêtres divers des Australiens. Bien sûr on ne peut donner raison à cette théorie que si elle est confirmée par des données génétiques, ce qui ne semble pas tout à fait le cas. Les Africains sont fort différents des populations négroïdes asiatiques. L’Afrique a été fort peu peuplée parce que les maladies limitaient la présence humaine. La malaria y est endémique, la maladie du sommeil, le sida, les virus rendent ce continent fort dangereux pour les communautés humaines. Ce n’est que depuis l’invention d’une médecine moderne, que sa démographie s’est emballée.
Tous les Peuples du monde ont une origine commune, mais des rameaux différents, et des fusions de Peuples et surtout de tribus et clans de chasseurs se sont produites dans le passé entre plusieurs formes nordiques de l’humanité et la forme africanisée retournée en Afrique. Ce que les chercheurs ont refusé de reconnaître pendant longtemps. L’homme moderne semble être né subitement. Les légende de toutes les ethnies du monde entier parlent de la création de l’homme par les Dieux. Souvent à partir de la boue, de la terre rouge qu’on trouve dans les zones tropicales prés des sources. Dieu y aurait créé l’humain actuel. La réalité sans doute c’est que des êtres venu d’ailleurs, des extra terrestres ont utilisé une race de singe pour en faire un être intelligent dominateur qui se croit l’égal de Dieu et qui sans doute un jour prochain se rendra même immortel en dominant la Nature. Il y a dans ces mythes le récit de la naissance de la lignée humaine. Avant cette création Dieu se donne le temps de créer tout l’Univers, les différentes formes de vie, et toutes les règles physiques et biologiques. Il crée aussi des êtres merveilleux à son image, donc immortels, et omniscients les Anges qu’il appelle fils de Dieu. Sans doute sur une autre planète, ou dans une autre galaxie, ou encore dans un monde parallèle, l’Autre Monde, celui dans lequel nos âmes vont lorsque nous mourrons sur cette terre. Tout ceci est une spéculation, et on dit pour simplifier qu’il s’agit d’une Religion et qu’il faut avoir la foi pour y croire, pour y simplement songer. Ou que c’est un conte à dormir debout qui ne tient pas, ce qui revient au même. Donc il y a un berceau de l’humanité quelque part sur la surface de la terre. Une terre merveilleuse qui comporte en son sein la source de vie, la fontaine de jouvence des contes à dormir debout, c’est dans cet oasis que l’homme aurait été créé par un Dieu extraterrestre qui l’aurait sorti d’emblée de l’animalité. Et cet homme aurait ensuite, après avoir été chassé de ce paradis, subi le déluge, et se serait mêlé aux singes à figure humaine qui vivaient déjà depuis fort longtemps sur notre planète. Ceci peut sembler être une réalité. Dans ce cas ce qui nous différencie des singes proches c’est ce que les Dieux nous ont fait comme cadeau. Et en comparant notre ADN au leur nous pouvons savoir de quoi il retourne, bien sûr ils auraient pu nous faire moins mortels et nous laisser une part de leur science infinie. Considérons la création de l’humain actuel dans un endroit unique situé à l’est d’Eden.
Si cet endroit n’a pas été englouti il en reste forcément une trace. Appelons ce lieu Eden, et rappelons ce qu’en dit la Bible. « El le Seigneur Suprême et Eternel planta un jardin à Eden » (ce nom du paradis originel patrie de l’homme moderne vient du vocable plaine du sumérien qui se prononce edinu) , la Bible continue sa parabole légendaire par les mots suivants « situé à l’Orient (Eden) et y plaça l’homme qu’il avait façonné de la terre (Adam). De Eden sortait une source qui peut être un fleuve qui se séparait en quatre. Les deux premiers Pishon de Hawilah, le second Gihon ne sont pas reconnus, les deux autres sont le Tigre et l’Euphrate. Il y a peu de chance que le Paradis où l’homme actuel a pris naissance soit à la source du Tigre et de l’Euphrate qui n’a rien d’une plaine, c’est plutôt un plateau assez aride car situé dans le massif du mont Ararat qui culmine à plus de cinq mille mètres. Selon toute vraisemblance la Bible situe Eden dans la zone ou se trouve actuellement Bagdad, la plaine alluviale du Tigre et de l’Euphrate. Le Paradis terrestre fut perdu d’après la bible lorsqu’un volcan en activité en empêcha l’accès. Dieu voulait éviter que l’homme ne prenne de l’arbre de vie situé à portée de main, peut être constitué d’une source de jouvence, car c’est ainsi qu’il pourrait vivre à jamais si il en prenait possession. Nous voyons aussi que les premiers humains descendant d’Adam vivent des existence très longues par rapport au maximum d’années dévolues à l’homme actuel par son génome.
Nous apprenons aussi qu’un déluge se produisit ensuite, et que très peu d’humains issus de la création divine survécurent alors, du moins ceux qui vivaient alors dans cette région. La plus part furent noyés. Or dans la tradition de presque tous les peuples du monde il y a ce déluge, qui a été conservé et il existe aussi pour les maoris. Lorsque les Dieux nés de la nuit sortirent de la caverne primordiale, il n’y avait que de la matière inorganisée dans tout notre Univers. Nous verrons qu’un groupe de Dieux investit la terre pour créer toutes les formes de vies d’après la tradition. Cette longue création qui a duré plusieurs milliards d’années n’est pas traduite dans le mythe polynésien, qui ne parle que de la création du premier homme Make Make. Généralement il se nomme ailleurs Tiki. Et de la première femme dont le nom peut être Awa. Ils sont créés comme dans le mythe biblique de la terre rouge pour l’homme, d’une partie de l’homme pour la femme, dans le mythe maori le Dieu créateur prend une bouture de bananier et utilise pour la transformation en femme du sang du premier homme. Vahiné est le terme générique de la femme qui enfante dans une généalogie. Et Tane celui du géniteur mâle.
Nous verrons que dans un mythe maori Eden est transposé dans une île et que la source de vie est aussi un arbre, l’arbre de vie. L’Eden maori se trouve aussi à l’orient, ou se lève le soleil, mais c’est sans doute une allégorie ;et de fait le soleil se couche à l’ouest dans le Pacifique. Beaucoup de choses sont renversées, ainsi dans l’hémisphère sud les tourbillons se font dans le sens contraire que dans l’hémisphère nord, le soleil se trouve au nord à midi et non au sud et des étoiles nouvelles sont visibles, d’autres invisibles. Le premier homme se prétend aussi fils de la divinité qui dirige le Soleil. Un des noms maori du grand esprit universel qui gouverne l’entité Soleil est Raa, d’où vient Raatira, qu’on peut rapprocher de Ra l’Egyptien, et de Ra engendreur de Rama, l’avatara de la Personne Suprême (Visnu) dans les mythes de l’Inde. Dans les mythes maori c’est Tangaroa qui crée le premier homme dans l’île d’Hiwa (Eden) avec de la terre rouge, Adam lui aussi vient de la terre rouge, El son créateur lui souffle dans les narines pour l’éveiller, il lui donne une âme et lui transmet une partie de son mana. La présence de l’entité de la lune est aussi nécessaire. Pour les Aryens et les Indoeuropéens en général l’homme premier est créé par la glace léchée par une vache Ahumblia qui personnifie elle aussi l’être suprême, la voie lactée, la déesse mère universelle. Mais ce premier homme Imir est détruit et démembré pour construire le monde par trois de ses fils ou de ses descendants plus exactement. Et un nouvel homme mortel est ensuite créé par un Dieu accessoire Prométhée qui volera pour eux le feu divin et qui sera pour cette compromission indigne condamné à avoir le foie dévoré par une aigle, et pour ce châtiment il sera enchaîné sur une haute montagne. Ceci peut faire penser qu’il y a deux mythes différents. L’un qui vient de Sumer donc de Oanes qui sans doute venait des citées de l’Indus ou d’une île paradisiaque. L’autre vient des peuples européens, aryens ou indoeuropéens. Dans ces mythes c’est soit un Titan (un Asura) qui crée la race humaine à partir de matière vulgaire, soit pour les Germains les trois meurtriers (des Deva) d’Imir l’homme primordial leur ancêtre géniteur (le Purusha des Vedas, ou Saturne pour les Romains et les Grecs) .
C’est l’origine de Vladimir bien sûr.
Ces trois dieux sont dans les mythes nordiques, Odin, et deux de ses frères, ou selon certaines autres sources Loki (le diable de la mythologie germanique, qui est aussi le Dieu du feu) qui façonnent les premiers hommes vulgaires ; à leur image, à partir de troncs échoués sur la grève. On oublie de dire souvent qu’ils créent les humains non par jeu mais pour avoir des référents sur cette planètes. Car eux ils sont bien sûr et toujours considérés comme extraterrestres.
Dans toutes les religions les Dieux sont immortels parce qu’ils disposent habituellement ou ont bu la liqueur d’immortalité, cette dernière est issue d’une source, la source de jouvence, ou d’un élixir le Kvass qui est formé magiquement par un sacrifice. Il y a aussi l’arbre de la connaissance du bien et du mal qui selon le Serpent Satanique de la Bible qui instruit Eve rend immortel et omniscient. Son fruit est le fruit défendu par excellence. Ensuite Dieu qui règne sur l’humanité décide de détruire les humains parce qu’ils insultent la divinité qui est inscrite dans l’œuvre divine représentée par la Nature.
Les Dieux sont immortels parce qu’ils boivent l’ambroisie, ou l’hydromel, breuvage particulier, magique qui devrait aussi rendre l’homme qui en boirait immortel. Ou est cette source d’immortalité ? dans quelle contrée terrestre ou extraterrestre ? Il s’agit d’un secret bien gardé semble t’il. Une source de jouvence est mentionnée comme terrestre se trouvant dans le jardin d’Eden. Existe t’elle encore de nos jours ? Mais les mythes parlent aussi
d’une coupe magique qui contient l’hydromel ou le kvas et qui ne se vide jamais même si on boit tout ce qu’elle contient. Les Dieux sont nombreux, ils sont une grande famille diversifiée, ils sont distincts de l’Entité Suprême, qu’on peut nommer le Super Créateur, celui qui mit en marche la roue de la création actuelle et présente. Les Dieux, tous y compris celui des Juifs, sont des créatures, générés par l’Entité Suprême, issus de ses pensées, de sa parole.
Le Dieu des Juifs seul prétend paraît il qu’il est un être unique et universel, il a bien sûr lui aussi des Anges et des Archanges qui font le travail à sa place sur la terre, et il y délègue même son propre fils qui vient au monde dans la Palestine actuelle, dans une étable, à Bethléhem. Jésus fils de Joseph, le Nazaréen car habitant de Nazareth en Gallilée.
Pour les Aryens de l’Inde le premier homme est Manu, ce qui se rapporte à la racine man qui signifie penser. L’homme moderne est appelé sapiens sapiens par la science , ceci fait rire bien sûr tous ceux qui ont un peu de mana spirituel. Manu n’est pas unique. Il y a quatorze Manu pour chaque Kalpa commençant par la naissance de l’Univers et finissant par la destruction de cet Univers. Or nous sommes au milieu du processus puisque notre Manu est le septième et qu’il en reste sept à venir. En Inde se trouvaient des connaissances mystiques très développées que les Aryens trouvèrent ou apportèrent avec eux, il est plus probable d’ailleurs qu’ils intégrèrent à leurs connaissances les mythes avancés que la civilisation qu’ils détruisirent dans leur conquête de l’Inde avaient développés au contact de voyants ou d’envoyés des Dieux immortels. C’était une grande civilisation parente de celle des Sumériens dont nous ne savons aujourd’hui presque rien de certain. Pour ceux qui croient les humains incapables de progresser si vite dans tellement de domaines différents c’est sûr il y a eu contact. Ces connaissances viennent visiblement d’une civilisation extérieure à notre système solaire qui est venue un temps faire du tourisme sur la terre, et y produire des mutations. Il y a dans la Bible un passage qui le prétend. Avant la décimation de l’humanité présente par le déluge, les « fils d’Elohim » s’unirent avec des terriennes et il en résulta des métissages. Tous les mythes indiquent que les Dieux proviennent d’une civilisation extraterrestre et qu’ils fondèrent l’humanité présente avec des éléments pris sur la terre et une petite partie provenant aussi d’eux, de leurs gènes peut être même. Si nous trouvons dans notre génome des gènes extraterrestres ce sera plus que certain, nous sommes le résultat d’une manipulation génétique. Dans ce cas la vie est bien universelle, elle existe ailleurs et en grande quantité et qualité. Et la terre est une expérience parmi des millions de ce que la vie peut produire comme complexité structurelle à partir de la matière vivante.
Revenons aux humains actuels ayant subi la présence des Dieux, et étant sans doute en partie les créatures de ces humanoïdes venus de l’espace. Ils conquièrent la terre toute entière longtemps avant que la première civilisation laisse un message écrit.
Venant aussi de l’Inde et sans doute pour partie de l’Afrique ils étaient présent en Australie au centre du continent il y a plus de trente mille ans. En Nouvelle Guinée vers cette période des Négritos de petites taille ressemblant au Pygmées vivaient essentiellement dans les plaines côtières. L’arrivée d’Austronésiens les repoussa dans les montagnes. Vers la même période l’Amérique du sud fut atteinte semble t’il par des Austronésiens aussi provenant sans doute aussi de l’Inde mais ayant contourné l’Afrique à partir de cette base de départ. Il y a trois mille kilomètres entre la côte de l’Afrique et celle de l’Amérique du sud. Un courant maritime et des vents réguliers poussent les embarcations. Même des pirogues primitives dotées d’une voilure peu efficace peuvent rejoindre les côtes du Brésil en un peu plus d’un mois, sans jamais manquer ni de poisson frais, ni d’eau douce. A l’époque le continent nord américain était couvert de glace jusqu’ au 38ème parallèle. Et aucun peuple même connaissant la civilisation arctique ne pouvait progresser aisément le long des fronts de glaciers, vastes falaises de glaces qui s’étendaient entre l’Asie et l’Amérique. Ce peuple de chasseurs pêcheurs était sans doute munis de grandes pirogues collectives et se déplaçait le long des côtes pour chasser les mammifères marins et pêcher. Leurs prêtres (chamanes) connaissaient les évènements et les autres mondes par des voyages rituels dans l’autre monde (le monde du rêve). Ils observaient aussi les animaux et les indices naturels. En trouvant des vents réguliers et des courants les portant vers l’Amérique ils parvinrent au Brésil actuel sans passer par le détroit de Behring. Pourquoi penser que c’est improbable ?
Ces expéditions assez rares sans doute semblent avoir eu lieu alors que l’isthme reliant les deux Amériques n’était pas constitué et donc que subsistait un fort courant entre l’Océan Pacifique et l’Océan Atlantique empruntant cette passe. Or la réunion des deux Amériques serait intervenue il y a plus de 50 000 ans d’après les connaissances actuelles. Les Austronésiens dont le type ethnique actuel dit australoïde se rapproche fortement sont semble t’il les hommes modernes (sapiens sapiens) les plus anciens. Ils comportent dans leurs gènes l’essentiel du patrimoine génétique des trois grands rameaux de l’espèce humaine actuelle (jaune, blanc, noir). Leur type ethnique fut sans doute préservé en Australie alors que partout ailleurs il fut changé par le métissage avec les formes de l’espèce humaine qui se trouvaient localement implantées, ceux qu’on a appelés Néanderthaliens en Europe par exemple. L’homme moderne ne provient pas directement d’Afrique, mais bien d’Asie pour l’essentiel, et il est sans doute le résultat d’une civilisation maritime, vivant de la pèche, construisant des navires, possédant une civilisation née de l’arboriculture.
Cette civilisation émergea en Occident à Sumer. D’après les légendes de Sumer qui subsistent le civilisateur Oanes (d’où vient Johannes, Jean…) débarqua un jour dans le delta et il instruisit les autochtones de toutes les techniques, y compris celle de l’écriture. Il est considéré comme amphibie dans les mythes, un homme poisson. Ce Sage issu de la mer, mi homme, mi poisson est le premier de 7 sages ayant apportés la connaissance des savoirs humains à l’humanité. Il est aussi connu sous le nom d’Adapa. Les anciennes civilisations de l’Indus que l’on trouve à Mohenjo Daho par exemple qu’on peut traduire par « la ville morte » étaient florissantes bien avant l’arrivée des Aryens en Inde.
Les Polynésiens sont peut être pour partie un rameau détaché de cette civilisation. Ils semblent venir dans les îles du Pacifique à partir de Taïvan mais c’est sans doute aussi des zones côtières de toute l’Asie. Leur écriture conservée dans les bois parlants trouvés à l’île de Pâques ont une grande similitude avec l’écriture des sceaux et des inscriptions trouvées en Inde. Ils comportent aussi dans leurs cultures des éléments les rattachant aux chasseurs arctiques de la Sibérie, aux Aïnous, ainsi que des éléments qui les rapprochent des peuples non aryens de l’Inde, qu’on nomme généralement aborigènes (Tamils, Dravidiens, Veddas…). Enfin ils sont aussi fortement apparentés aux populations négroïdes mélanésiennes, avec lesquelles ils ont été en contact pendant des siècles.
L’érection de l’ isthme reliant les deux Amériques semble être un des éléments principal du changement climatique qui se produisit alors qui conduisit à la disparition des calottes glaciaires qui couvraient alors tout le nord de l’Europe, la Sibérie, et la plus grande partie de l’Amérique du nord. Le courant du gulf stream est la résultante la plus probable de la fermeture de l’isthme entre les deux Amérique, et c’est lui qui a aussi dégelé l’Europe et la Scandinavie, ce qui a sans doute entraîné aussi le réchauffement climatique actuel, bien que nous soyons à nouveau dans un âge glaciaire qui s’est interrompu parce que l’homme consomme trop de carbone fossile. La terre face au soleil se penche plus ou moins selon un cycle connu. Lorsqu’elle est peu penchée sur son axe c’est la chaleur qui s’installe, car les périodes hivernales extrêmes sont atténués sur tout le globe. Si elle n’était pas penchée sur son axe de rotation par rapport au soleil, il ferait la même température partout sur le globe et il n’y aurait pas de neige et de glace sur toute la terre. Il n’y aurait pas de saisons !
Il semble que la fonte des glaciers ait été catastrophique à une période donnée, ou que de grandes masses d’hydrates de méthane contenues dans les océans ou les terres toujours gelées ont pu transformer le climat si rapidement que le déluge s’est produit. Au moins parce qu’il y eut cette montée rapide des eaux océanes ce qui engendra le déluge dont la Bible rapporte les méfaits, peut être s’agit il de l’envahissement par l’eau océanique de la mer Noire, jusque là devenue un lac d’eau douce autour duquel une civilisation s’était créée, une fois un détroit pris par les glaces ouvert, ou à la suite de l’ouverture d’un détroit par un bouleversement tellurique, ou encore l’impact d’un météore géant.
On sait aussi que la rupture de la moraine glaciaire de la mer du nord conduisit en Europe à une catastrophe séparant depuis l’Angleterre par un chenal creusé par cette vague formidable et redessinant l’hydrographie de cette région.
On sait aussi que la mer méditerranée s’est aussi asséchée à plusieurs reprises. Lorsque la mer s’y engouffra à nouveau ce dut être un cataclysme violent soudain. L’isthme de Tanger Gibraltar se trouva bloqué en moins en partie, puis s’ouvrit à nouveau ? Ceci s’est passé il y a plus de 5 millions d’années.
Les hommes se sont dispersés par des migrations diffuses. Les chasseurs suivant les migrations des animaux, les pécheurs en suivant les bancs de poissons. Toutes ces aventures finirent par peupler la terre. La colonisation brutale des Européens dans les zones encore néolithiques montrent aussi comment les peuples agriculteurs se sont aussi précipités vers les terres cultivables, en détruisant le plus souvent les civilisations précédentes. Il en est de même des peuples vivant d’une économie pastorale. Les nomades des steppes et des déserts se sont emparés des territoires cultivés et les ont le plus souvent stérilisés durablement avec leurs troupeaux et leurs exploitations à courte vue. Les troupeaux des humains sont les vecteurs essentiels de la destruction de l’environnement dans bien des régions.
Les monocultures de céréales et autres denrées peuvent aussi détruire l’environnement durablement.
Le climat de la terre dépend toujours de la fermeture des zones équatoriales par la liaison de l’Amérique du Sud et du Nord, sans cette suture il n’y aurait pas de gulf stream, et ce courant n’existe que depuis que cette suture s’est réalisée. Il y a trois millions d’années. Mais au début il ne pouvait pas réaliser le tapis roulant , les eaux de surface étant remplacées par un courant profond. Il fallait que les banquises et surtout le Groenland produise de l’eau peu salée pour que l’eau du gulf stream puisse s’enfoncer sous elle. Les ères glaciaires du quaternaire sont sans doute nées de la suture entre les deux Amériques. Le gulf stream sera bloqué lorsqu’il n’y aura plus assez d’eau douce froide se déversant dans les contrées arctiques proches du Groenland, et ceci reproduira la glaciation en Europe.
Une grande catastrophe climatique se produit régulièrement sur la terre.
Les anciens pensaient que ceci s’était produit il y a moins de 50 000 ans, et que de là provenait l’arrivée de l’homme moderne qui sortit d’Eden devenu une zone volcanique envahit tout le monde. Or l’homme moderne se mit bien en marche vers cette période. Il atteint l’Amérique et conquit toutes les terres australes. Et la seule explication valable est qu’il était capable de se déplacer sur la mer, qu’il construisait des embarcations avec lesquelles il suivait les rivages, vivant de la chasse des animaux marins qui est assez facile et de la pèche. C’est du moins mon hypothèse pour l’arrivée des austronésiens en Amérique du Sud. Il est même possible qu’ils soient partis du continent africain alors pour aborder au Brésil. Les australiens à la même époque arrivèrent sans doute de l’Inde qui est fort éloignée du continent Australien.
D’après les hypothèses actuelles c’est l’arrivée d’un astéroïde qui aurait entraîné la fin des dinosaures. L’impact principal serait d’ailleurs situé au Yucatan la presqu’île du Mexique. Il est fort probable aussi que la bascule de l’axe de la terre par rapport au plan écliptique est du aussi à l’impact de météorites dans la zone Limoges en France, avant ce basculement il n’y avait pas de saisons, et les calottes glaciaires étaient inexistantes d’autant plus qu’aucune terre émergée ne se trouvait proche des pôles. A l’origine un seul continent s’était formé, un seul océan existait. Pourquoi ce continent fut-il dépecé ? Pourquoi les Continents actuels furent ils éloignés ? L’ Inde détachée de l’Afrique finit par accoster l’Asie et de leur impact naquit la plus haute chaîne montagneuse continentale : l’Himalaya.
Un singe humanoïde africain peut très bien avoir voyagé sur l’Inde insulaire et avoir abordé en Asie à ce moment seulement. Or il semble qu’il n’y a aucun primate proche de la lignée humaine dans les fossiles de l’Inde, il y en a par contre à Java, Sumatra, Bornéo. Or la continuité de la zone tropicale n’est jamais réalisée entre l’Afrique qui serait base de départ et l’Asie. Lorsque l’Amérique du sud quitte l’Afrique elle emporte avec elle plusieurs types de singes tous ayant de longues queues. Les singes sans queue sont soit africains, soit asiatiques, on en trouve semble t’il aussi des fossiles en Europe, il n’y en a jamais eu en Amérique et pas plus semble t’il en Inde. Or il s’est passé quelque chose qui a fait d’un animal primitif un homme et ceci ne s’est pas produit à beaucoup d’endroits à la fois. Une toute petite patrie est à l’origine des races humaines actuelles, qui ont évoluées ensuite surtout en assimilant ou détruisant systématiquement les races anciennes. Cette patrie n’est sans doute pas africaine.
(bien que les gibbons de l’indochine et des îles de la Sonde ont le poil laineux) et que les Papous et les Négritos ont les poils laineux, la peau sombre , et ressemblent beaucoup aux Africains modernes. Ils en sont par contre très éloignés par leur génétique et proches d’un ancêtre humain habitant l’Asie longtemps avant l’arrivée de l’homme moderne que l’on nomme Denissovien, Denissova étant le lieu où les premiers fossiles le concernant ont été découvert
Et d’ailleurs l’homme africain actuel est souvent décrit comme étant le plus récent, il n’existait pas avant le déluge d’après la Bible.
L’homme moderne est retourné en Afrique et y a apporté sa culture. Le nord du continent d’ailleurs protégé par le sahara est resté peu africain, c’est l’Afrique blanche. La couleur de peau très foncée qui domine actuellement en Afrique noire est une mutation récente qui s’est imposée par la sélection naturelle, elle n’existait pas à l’origine de l’homme moderne, et c’est une mutation bénéfique sous les climats et les environnements de l’Afrique noire. Les autres populations très foncées aux cheveux crépus sont bien arrivées en Asie dans les temps anciens toutefois.
La plus part des ethnies africaines cultivant la terre et élevant des animaux semblent s’être constituées sur les hauts plateaux du Soudan, et de l’Ethiopie. Avant leur arrivée il n’y avait que des chasseurs cueilleurs Boschimans en brousse, et Pygmées dans les forêts denses. Les populations du sahel étaient elles des leucodermes, comme celles de l’Egypte. Les cheveux crépus et l’abondance de mélanine dans la peau qui sont des adaptations très avantageuses pour survivre dans les contrées tropicales sont semble t’il alors typiquement africaines et existent sans doute dans ce continent depuis toujours. Nos ancêtres pongidés africains n’ont jamais les poils laineux, ils ont toujours des poils raides. Aucun singe de savane n’a cette adaptation, aucun singe africain. Les seuls singes qui ont un pelage laineux vivent en Amérique du sud et en Asie. Il semble que l’Amérique du nord n’ait jamais eu de lignées de singes sans queue.
Il est possible que les gènes à cheveux crépus soient arrivés d’Asie ou même d’Amérique en Afrique par la voie maritime, car la forme crépue n’est pas avantagée dans les climats froids, et l’excès de mélanine est très désavantageux pour les populations vivant dans les zones climatiques peu ensoleillées. Les premiers hommes modernes n’avaient sans doute pas les cheveux crépus, et pas la peau noire. D’ailleurs le fait que les paumes et les plantes de pied des noirs sont visiblement dépourvues de pigmentation foncée le prouve implicitement. Cette adaptation protégeant du soleil est très utile pour survivre au climat local lorsqu’il y a souvent un soleil brûlant.
Si nous appelons ce type nègre, caractérisé par une chevelure et des poils tortillés et crépus, une abondance de mélanine dans le derme de la peau, et sans doute aussi par des lèvres épaisses sa répartition est très sommairement limitée à la zone Indo-Pacifique d’une part et à l’Afrique d’autre part. Dans la zone Pacifique il ne subsiste plus que la Nouvelle Guinée, les Adamans, et les différentes zones mélanésiennes. On suppose avec beaucoup d’indices que partout en Asie ce sont les formes négroïdes qui furent les premières à s’installer, puis que d’autres formes non négroïdes arrivèrent ensuite. Sauf en Australie ou la forme négroïde semble très minoritaire, du moins chez les quelques survivants des populations ancestrales toujours dénommés aborigènes. Par contre tous les Papous sont identifiés comme négroïdes, y compris ceux qui ont des formes qui les rapprochent des Sémites. Les Sémites seraient d’ailleurs le résultat de la fusion d’éléments européens dit caucasiques (aryens en fait, ce terme a été banni parce qu’utilisé par les idéologues racistes de l’hitlérisme) avec d’autres qui sont hamitiques (égyptiens eux même fusion d’éléments africains en faible proportion avec des éléments dit caucasiques ou aryens), l’élément mongoloïde semble aussi présent dans la formation de ce groupe humain, de cette race humaine. L’élément dit mongoloïde n’étant pas affirmé autrement que par la face souvent très plate, les yeux bridés, le crane généralement plus important brachycéphale ou mésocéphale. En fait ces caractéristiques semble provenir d’ un héritage des populations de préhumains asiatiques lorsque l’homme moderne les supplanta en se métissant avec eux. Il y avait des humains primitifs de grande taille en Chine notamment. Le cheveu des asiatique est plus gros que celui des européens et des africains, celui des africains est aplati ce qui lui permet de vriller facilement lorsque son gainage est lui même courbé. Les cheveux ondulés sont intermédiaires entre la forme africaine vrillée et la forme raide asiatique.
Comme la forme très occidentale blonde aux yeux bleus est vraisemblablement la forme que prirent les humains lorsqu’ils se mélangèrent aux populations dites néanderthaliennes occidentales qui semble t’il étaient souvent roux et fort dépigmentés. On en a fait des êtres assez stupides, mais tout porte à penser en fait qu’ils étaient plus forts et plus intelligents que les hommes modernes. Par contre leur génétique semble avoir été faible du fait de mutations désavantageuses et de la faible fertilité de leurs femmes. Les enfants de ces humains étaient fragiles, aucun eugénisme sérieux ne semble avoir été pratiqué. Ils furent éliminés par l’homme moderne. Leur civilisation a été détruite radicalement par une autre plus efficace, et ils furent éliminés biologiquement par les arrivants, bien plus féconds et mieux organisés. Lorsque le climat a changé subitement les glaciers ont fondu et la mer est monté rapidement.
Cette invasion de la mer fit que les côtes furent submergées à plusieurs reprises et les peuples de pêcheurs qui y vivaient se réfugièrent généralement alors dans les montagnes.
Lorsque l’isthme de Panama se constitua par volcanisme semble t’il, le courant équatorial nord fut dévié et renforça le gulf steam qui réchauffe les côtes de l’Europe du Nord.
Depuis une période intermédiaire pour diverses raisons géographiques le contre courant équatorial qui va d’ouest en est ne traverse plus l’Atlantique depuis on peut même dire qu’il a disparu de cet océan à une période assez proche de nous, peut être celle de la remontée des océans. Les bois flottés provenant de l’Amazone n’arrivèrent plus en Afrique comme au par avant. Les indices de la terre d’en face disparurent des côtes africaines. Et les Austronésiens qui se trouvaient sur les côtes africaines disparurent aussi à cette période semble t’il, sans doute fondus dans les populations africaines.
En Asie l’Australie et la Nouvelle Guinée étaient occupées depuis des millénaires par des populations très anciennes scindées en de nombreuses tribus, parlant de nombreuses langues différentes assez peu apparentées. Sur les côtes se trouvaient des populations vivant encore assez souvent de la mer, qui avaient colonisées toutes les îles de la zone qui sont d’une nature tropicale riche, qu’ils savaient utiliser par l’agriculture, et l’arboriculture. Les populations de ces côtes sont souvent très claires de peau et ont même les cheveux bloncs dans l’enfance
Les grandes îles de l’ouest étaient toutes occupée par eux bien avant que les maoris arrivent dans les parages. Ils en restèrent les maîtres. Quelques éléments maoris furent intégrés à ces tribus, quelques groupes survirent même lorsqu’ils purent s’établir dans des îlots proches, la plus part furent exterminés à la suite de guerres incessantes. Les survivants s’expatrièrent le plus souvent vers le centre de la Polynésie. Ces peuples ne devaient pas alors se mêler harmonieusement, étant trop différents culturellement. Beaucoup d’analystes du passé pensent que les mélanésiens sont souvent le résultat de la fusion d’éléments maoris et autres austronésiens et d’éléments de populations plus sédentaires qui s’étaient aventurés dans les îles et notamment pour la constitution des différentes ethnies des îles Fidji.
Les mélanésiens avaient l’avantage du nombre, leur civilisation agricole était déjà essentiellement basée sur une agriculture et un élevage des porcs asiatiques performants. Presque toujours en guerre, chasseurs de têtes et mangeur d’hommes, ils avaient aussi développé des stratégies d’ensemble qui leurs assuraient un avantage certain contre les faibles colonies maories.
Il y eut d’abord une fusion entre les indigènes et les maori, surtout par l’échange des femmes indigènes, mais les mâles issus de ces mariages retournaient le plus souvent dans les tribus de leurs mères où ils n’étaient pas les bien venus le plus souvent , car dans les sociétés papous ce sont les vieux, les grands hommes qui monopolisent les femmes fécondes, et une forme de racisme empêchait que les demis deviennent de grands hommes le plus souvent. Se formèrent donc en bordure des côtes des tribus distinctes mélanésiennes par les femmes, mais parlant maori, avec une organisation sociale mixte elle aussi moins démocratique que celle des Papous, mais finissant par prendre la culture locale.
Les établissements très anciens des maoris aux Fidji furent la proie de plusieurs invasions de peuples mélanésiens pendant plusieurs générations, malgré l’immensité des terres qui aurait permis l’établissement des deux groupes humains en bonne harmonie, il y eut dés le début des conflits portant sur le respect des tabous et des affaires d’honneur provenant de rapts et de tueries isolées. Les guerres furent presque toutes finalement perdues dans ce cas par les clans maoris, les survivants quittèrent massivement cette terre pour la Polynésie centrale, ils recueillirent là sans doute plusieurs expéditions anciennes qui ayant abordé l’Amérique revinrent apportant le kumara, et sans doute d’autres plantes et animaux.
Bien des générations passèrent ensuite. Les Maoris formèrent les civilisations de la Polynésie, autour du centre culturel de Raiatea. Chaque Prince maori avait dans son marae une pierre provenant du grand marae de cette île, nommé Taputapuatua. Ceci lui permettait de remonter à la généalogie des Dieux, car dans cette île les Dieux, Oro et Hiro notamment prirent femmes humaines et ainsi commença la généalogie des Ariki, les nobles descendants des Dieux nés de la nuit.(Atua faare po)
Lorsqu’ils arrivèrent à Ao Tea Roa (Nlle Zélande) les maoris trouvèrent l’île occupée par une faible population de mélanésiens et d’ austronésiens, ils les déportèrent aux îles Chatham pour la plus part et les nommaient Mori Huti (les gens de la terre) cette émigration forcée est rapportée dans les légendes. La plus part des tribus comportait toutefois des éléments provenant de toutes les régions de l’Océanie, le rapt de femmes et d’esclaves étant assez généralisé. Les éléments qui proviennent de l’Inde sont le coq qui a été introduit en Polynésie très tôt. Les mélanésiens élèvent des porcs d’une race asiatique, sans doute provenant de Chine méridionale, les Australiens n’ont importé que le Dingo, chien dont l’origine est aussi indienne. Les chiens polynésiens semblent peu nombreux et se rattachent à cette race australienne essentiellement et pas aux chiens de la Chine, du Tibet. Les porcs sont sans doute essentiellement ceux des mélanésiens, qui étaient dans les îles avant l’arrivée des maoris, mais il est possible qu’ils soient les introducteurs de ces animaux dans les zones mélanésiennes. . Il ne semble pas que les maoris aient eu d’autres animaux domestiques parmi ceux qui se trouvaient en occident et au moyen orient, ce qui s’explique par leur départ alors qu’ils n’étaient pas domestiqués dans leur aire de départ. Avec eux ils emportaient aussi le rat polynésien , celui qui détruisit en les rongeant les palmiers de l’île de Pâques
Les maoris domestiquaient aussi les animaux présents dans leur environnement.
L’utilisation des oiseaux et particulièrement des frégates par les navigateurs anciens est connue. Cette habitude s’est d’ailleurs conservée dans quelques îles jusqu’à nos jours et c’est très facile de réaliser cette alliance, dans le but d’avoir un auxiliaire pouvant voler à grande altitude et de là voir et ainsi indiquer aux navigateurs la direction des terres visibles à cette altitude. D’autres maoris ont su domestiquer un temps les cormorans ou les fous, mais aucune expérience de domestication des moas par exemple n’eut lieu lorsque la Nouvelle Zélande fut conquise, alors que ces animaux étaient peu farouches et facilement apprivoisables. Ils furent détruits jusqu’au dernier.
Tout ceci pour préciser que Teagi aurait pu aller vers Ao Tea Roa et qu’il aurait trouvé les moas dans l’île du nord, à son époque elle était très peu peuplée.
Après la rencontre de Tiki la vie de Teagi ne fut plus jamais comme avant. Il avait acquis par une sorte de conscience mystérieuse un savoir indescriptible. En lui se trouvait une grande joie, et ses yeux étaient souvent pleins de larmes lorsqu’il pensait à son ami Tiki, alors même qu’il ne l’avait connu que quelques jours, il lui semblait l’avoir connu de tout temps.
Teagi doutait bien de la réalité de ce qu’il avait vécu, il pensa souvent qu’il avait fait une sorte de rêve éveillé et le lecteur en doutera aussi car personne n’a pu exposer les preuves matérielles scientifiques de la présence d’extraterrestre sur terre jusqu’à ce jour. Tiki devait rester présent dans son souvenir, comme un ami, et un magicien incomparable. Jusqu’à sa mort. Sur les tablettes qu’il laissa à sa mort il précise qu’ il ne le revit jamais ensuite dans sa vie, mais que ses pensées étaient tournées vers lui, et que son aide lui permit de faire le grand voyage qu’il accomplit après que son père Hotu Matua mourut. Il savait que Tiki pouvait le voir, le comprendre si il s’exprimait verbalement, et même comprendre ses pensées.
Poursuivons le récit
CHAPITRE QUATRIEME
Comment Maui fut abandonné sur un esquif par ses frères.
Une expédition vers le sud, l’arrivée dans une grande zone de pêche, une grande pêche. Les frères de Maui sont jaloux de lui, ils décident de l’abandonner dans la nuit.
Abandonné sur un îlot désert il va survivre avec le produit de ses pêches et grâce aux éléphants de mer qui viennent se reproduire sur cette côte.
Grâce aux os des animaux il formera une embarcation qui lui permettra de se rendre au nord et de découvrir la côte de la Nouvelle Zélande. Il n’y a pas de bois sur cette île. Il est donc nécessaire qu’il usine les os des animaux qu’il peut trouver, et qu’il utilise leurs peaux.
CHAPITRE CINQUIEME
ARRIVEE A RAIATEA
Plusieurs jours passèrent sur l’océan. Très éprouvantes, les vents et les orages ne cessèrent que lorsque l’île de Raiatea fut atteinte. Les phases de la lune rythmaient le temps, l’une de ces périodes est appelée période du sexe de l’homme, le premier croissant, c’est alors que la terre sacrée de Raiatéa, celle du grand marae apparut vers la fin de la nuit à l’horizon au milieu de formes nuageuses confuses, se découpèrent les hautes terres et les mornes. Ce premier signe fut suivi des odeurs apportées par le vent.
Elle était éclairée par l’argent de la clarté lunaire qui traçait une vaste route miroitante et atteignait la lisière des vagues avec leur blancheur caractéristique. Bientôt, il put entendre le déferlement contre le récif . Au matin Teagi aborda. Il y fut accueilli avec respect et admiration par les jeunes gens de son âge qui participaient à une grande pèche collective dans le lagon. Après avoir été accueilli dans de nombreux clans et raconté son aventure on lui annonça qu’ une des autres principautés avait accueilli une migration constituée de deux grand navires sans doute ses parents l’année dernière.
Il quitta donc son mouillage et se rendit, avec deux jeunes hommes liés à son clan, dans ce village situé à Vaitoare.
Teagi y retrouva la trace de son père. Une année avait passé depuis que le roi de Hiwa avait abordé d’abord à Bora Bora puis dans cette région où plusieurs de ses parents vivaient depuis des générations. La longue liste des généalogies permettait à chaque prince (Ariki descendant de la lignée des aînés, de Maui, et des Atuas(les Dieux)) de trouver pratiquement partout dans tout le monde polynésien des parents proches ou lointains. Tous les Arikis provenaient des mêmes familles légendaires qui avaient conquis le grand océan, après être passés au milieu des terres des mélanésiens, ces derniers étaient d’ailleurs nés de la fusion des colons Maoris et des tribus des Papous. Ces derniers vivaient en ces lieux depuis des temps immémoriaux, c’étaient les « gens du pays ». Et ceci s’était réalisé en Nouvelle Guinée actuelle dans les îlots proches de la côte et dans la vaste terre des Fidji alors que les polynésiens possédaient encore la science de la céramique, qui subsista pratiquement uniquement dans les zones tribales mélanésiennes établies sur la basse vallée du Sépik. Des Papous nous ne savons presque rien, ils ont des cultures diverses, des langues nombreuses fort diverses les unes des autres. Ce sont de bons chasseurs, mais dans leur territoire il n’y a pas de grands animaux, le plus grand est le casoar un oiseau. Les Papous sont surtout des agriculteurs, qui n’ont pas de classe dominante, qui ont le culte des ancêtres et aussi la passion de la guerre et de l’art.
Ils pratiquent la chasse des têtes, chose que les maoris n’ont jamais fait semble t’il.
D’abord une symbiose assez heureuse se produisit entre les deux cultures, puis il y eut une période de guerres ethniques. A la fin les derniers colons maoris se réfugièrent dans les îles proche, et la plus part émigrèrent vers les Samoas et Hawaïki Raiatea. Il y a beaucoup d’Hawaïki en Polynésie. Chaque grand établissement se fait à partir d’un grand marae, et celui qui compte c’est celui des Arikis. A la fin de la civilisation maorie, juste avant que la civilisation venue de l’Europe en détruise tous les fondements, le marae principal était celui d’Oro à Raïatea dénommé aujourd’hui encore Taputapuatea. A l’époque c’était celui d’Oro dont se réclamaient presque toutes les Chefferies de quelque importance, dans la liste des grands ancêtres importants. Prés de 40 générations souvent étaient mentionnées. Ce qui revient à dire qu’il y a environ 800 années depuis qu’Oro est descendu sur terre pour se faire une famille terrienne en contractant mariage avec les vahinés locales. A l’époque de Teagi une nouvelle colonisation avait été établie, dont il ne restait plus de traces lors de l’arrivée des Européens dans ces parages. Les Fidji étaient essentiellement occupées alors par des colonies mélanésiennes, certaines employant toutefois un dialecte proche du maori qui avaient détruits tous les établissement purement maoris.
Samoa entretenait bien depuis la fin des établissement maoris des liens avec Fidji et continua longtemps de recevoir des navires venant de Fidji et d’en envoyer. Mais ceci ne fut plus que des liens informels entre deux civilisations qui ne se comprenaient pas.
Dans cette période les guildes d’initiés polynésiens faisaient le voyage d’île en île jusqu’à en connaître l’étendue totale. Ceci persista lors de la découverte il y avait autour d’Oro et de Raïatea la secte des Areoï qui transmettait une forme de culture particulière. Quelques siècles plus tard, vers le septième siècle de notre ère sans doute tout ceci finirait lorsque les guerres incessantes auraient détruit la convivialité des communautés peu nombreuses de l’expansion et que la surpopulation quasi générale aurait conduit à des sociétés qui n’acceptaient plus de voir débarquer continuellement des colonies importantes d’immigrants. Les immigrants étaient devenus indésirables à force d’entraîner les guerres inévitables, d’abord sujets obéissants les nouveaux colons ne tardaient pas à s’affranchir de cette charge épuisante et fomentaient des révoltes. Alors les polynésiens perdirent l’habitude de voyager dans tout leur domaine. Une dernière grande flotte parti vers Ao Tea Roa, (actuelle Nouvelle Zélande, le grand nuage blanc, ainsi nommée parce que des nuages y stationnent souvent sur les hautes terres ) venant de Tahiti et des îles qui l’entourent. C’était la fin .
Cette épopée est sans doute légendaire aussi, car la Nouvelle Zélande immense était peu peuplée relativement à sa grandeur, la civilisation polynésienne ne s’y affirma pas trouvant des conditions climatiques qu’elle ne maîtrisait pas. Et curieusement malgré l’immensité des terres à cultiver et entretenir la guerre y était continuelle.
Les affrontements armés, résultats de violents conflits d’honneur le plus souvent, étaient la seule activité régulière de l’élite du peuple, qui imposaient un quasi servage à tout le reste de la population. Lorsque les européens arrivèrent dans ces parages le temps des grandes migrations était fini, et les longues courses dans les vents et les courants cycliques n’étaient plus connus que dans les légendes des ancêtres. Cette histoire avait commencé longtemps avant cette période. Il y a plusieurs millénaires, dés que l’homme sut construire des embarcations de haute mer, il se mit à explorer très vite les océans en suivant les côtes et à l’aide des oiseaux marins, et de la science de la pêche océanique, il entrevit la présence des îles isolées. Alors il s’aventura au large et débarqua très vite sur toutes les terres existantes. Puis une grande civilisation naquit. Elle connaissait le tissus fait de fils tissés, elle se trouvait au milieu de l’océan dans une île, il s’agit peut être de Formose, ou d’une île de l’ensemble indonésien, ceci est lié à la tradition, les coqs viennent de l’Inde, le chien polynésien sans doute aussi. Le bananier fit son apparition dans cette contrée, comme le uru ou arbre à pain qui lui vient de Malaisie ou de Nouvelle Guinée, il y eut aussi le figuier banian qui est un arbre tellement important par son développement et le fait qu’il est l’arbre des Dieux, l’aïto appelé bois de fer ou filao qui est le signe d’Oro, le mape une sorte de châtaignier… Les tubercules provenant des zones papoues, la canne à sucre, furent aussi emportés dans les nouvelles patries océaniennes. Là les premiers hommes civilisés eurent d’après la tradition des contacts fréquents avec les Dieux issus de la Nuit : Tiki, Make’make, le Tangatamanu (l’homme oiseau) d’abord. Puis avec d’autres comme l’envoyé du créateur de l’Univers sur la terre son préposé Tangaroa, la déesse de la mer, Moana, Hiro, Tane et les différents esprits sortis de Tangatamanu.
Hiwa disparut subitement !
Cette société fut détruite en un jour par un cataclysme, n’en subsista plus que les colonies lointaines. Sans doute s’agit il d’une catastrophe volcanique comme celle qui aurait affectée jadis l’île de l’Atlantide. A la fin les colonies des îles n’eurent plus de contact avec leur mère patrie détruite. Il y eut alors une très longue période de formation des peuples polynésiens à partir de Hawaïki, en oubliant Hiwa la terre bénie par la proximité des Dieux immortels. Jusqu’à ce qu’ Oro le Dieu de la guerre, et de la culture établisse sa résidence à Raiatea.
Hotu Matua vivait semble t’il à la période de la fin de l’expansion. Les navigateurs qui initièrent la conquête, produisant une poterie typique, porteurs d’une civilisation néolithique avancée qu’ils emportèrent avec eux vers 3000 ans avant J.C. environ. Cette poterie les suivit et marque leur passage, elle disparaît totalement de la Polynésie vers 800 de notre ère. Alors même qu’il existe toujours des sources d’argile dans les îles hautes. Les Maoris venant d’Hiwa se répandent aux alentour. Ils s’installèrent d’abord en nombre aux Fidji, puis en furent chassés. D’après les indices provenant des strates de la généalogie de Maui on peut penser que Tahiti et Raiatea furent les premiers centres de la conquête de toute la Polynésie. Mais d’après les recherches archéologiques c’est d’abord aux Marquises qu’ils s’installèrent. On suppose qu’il devait y avoir vers 1000 avant J.C. une société de quelques milliers de guerriers qui devinrent les Arikis, et sans doute pas plus d’une vingtaine de lignages nobles, se réclamant tous de l’ascendance de Maui l’ancêtre mythique. De ces ancêtres ne subsistaient plus que des arts adaptés à la vie dans des îles. L’argile qui y est présente ne fut pratiquement jamais utilisée pour réaliser des poteries. Les marmites n’étaient pas utilisées par la civilisation polynésienne, pour réaliser des soupes ils utilisaient des carapaces de tortue, des coquilles de bénitier, des peaux et y plongeaient des pierres chaudes comme les autres peuples chasseurs et pêcheurs. Le four polynésien qui consiste à établir dans la terre une fosse entourée de roches ajustées et de faire aussi chauffer des pierres pour cuire à l’étouffée les mets préparés dans des conditions diverses enveloppées dans des feuilles de bananier se répand partout et correspond à la cuisine collective des grandes familles claniques. La pitance des hommes étant toutefois la plus part du temps produite dans un four à part de celle des femmes et des enfants. La viande était parfois assez rare et semble souvent réservée aux chefs et aux guerriers. Elle était souvent aussi le résultat d’un sacrifice humain, l’homme sacrifié était mangé, surtout dans les moments de pénurie alimentaire, les guerres fournissaient le plus souvent ces occasions de festin. Ici ou là on nommait l’homme sacrifié : « le cochon long », ou « le poisson avec des jambes ». Les tortues étaient aussi réservées aux dirigeants de la société, et aux tahungas les sorciers et les initiés de haut rang.
Le four polynésien communautaire fait d’une fosse creusée dans laquelle on range les mets le plus souvent enveloppés dans des feuilles de bananier, entourés de pierres chauffées et recouvert de feuillages et de terre pour les cuire à l’étouffée était pratiquement généralisé dans toute l’Océanie bien avant l’arrivée des Polynésiens. C’est toujours une des marques essentielles de la culture polynésienne. Les petits groupes isolés utilisaient aussi ce principe pour cuire leurs provisions journalières ce qui est quand même assez difficile à comprendre car ceci représente un travail assez considérable par rapport au foyer simple ou l’on fait cuire les aliments dans les braises ou la cendre chaude. Le plus souvent c’était le uru(fruit de l’arbre à pain) qui était cuit dans de grands fours collectifs lors de sa récolte. D’autres plantes comme le taro, la banane ou l’igname étaient généralement la nourriture de base, la plus fréquente. Venait ensuite le fruit de l’arbre à pain, dont on pouvait faire une conserve assez facilement souvent en les laissant fermenter. Mais on pouvait aussi les sécher comme les bananes par exemple. Une fois préparé il suffisait de délayer le produit sec dans de l’eau et d’en faire des pains mis à cuire dans le four. On utilisait cette bouillie notamment à Tahiti, ceci avec des poissons, et dans les grandes occasions les porcs, les poulets, la viande des dauphins, celle des tortues, et celle des ennemis tués. Le cannibalisme était fréquent sans être systématique. Il sévissait presque exclusivement lors des expéditions guerrières. Dans la période ancienne il était semble t’il pratiquement inconnu lorsque les aliments étant abondants et faciles à se procurer. C’est la guerre et l’apogée de Oro le Dieu de la guerre qui généralisa cette pratique culinaire de la dégustation des humains même dans les périodes de paix et dans les zones les plus fertiles, et poissonneuses lorsque la nourriture disponible était abondante. Etre un guerrier nécessitait alors souvent de tuer un ennemi et de le manger ensuite, en commençant par les yeux réservés dit on aux Grand Chef, deux initiations particulières. Manger un ennemi était une manière de le détruire radicalement et d’ingérer son mana, sa puissance magique. Souvent on lui prenait aussi son nom qu’on s’attribuait s’il était un grand guerrier bien sûr. Revenons au cours de notre histoire. Dans cette période heureuse de l’histoire des peuples maoris tout homme qui abordait était fêté comme un envoyé des divinités. Toute migration qui s’arrêtait était bien accueillie et traitée avec des festivités destinées à affermir les liens de la grande diaspora, la Fenua. Les femmes étaient échangées, des enfants, des hommes passaient d’un groupe à l’autre par adoption mutuelle. Si un ami ou à plus forte raison un parent quelconque pour lequel on avait de l’affection ou du respect n’avait pas d’enfant lui offrir un des siens n’était pas considéré comme déplacé, mais parfaitement naturel et moral. En outre ceci permettait aux jeunes couples d’avoir de longues années libres de charges de famille à assumer, leurs premiers enfants étant le plus souvent adoptés par leurs parents, oncles, ou cousins. Le passage d’Hotu Matua s’était traduit par des échanges entre clans nombreux. Comme le veut la coutume. Il paraît que lors de la découverte par les Européens les Maoris pratiquaient à grande échelle la sélection des enfants à la naissance en faisant une promotion de l’infanticide. Ceci vu la connaissance qu’on peut avoir de la culture maorie et de l’attachement forcené, viscéral qu’ils ont pour leur progéniture semble une chose inimaginable, et pourtant elle était bien réelle. Surtout d’ailleurs en cas de mésalliance ceci se produisait. Mais il y avait aussi la secte des Aréoï qui pratiquait l’élimination totale de leurs enfants, c’était un de leurs principes, et les quelques rescapés connus en ont témoigné. Cette abominable pratique devait être prescrite semble t’il par la surpopulation, avoir trois enfants était déjà une charge énorme pour beaucoup de couple, mais il est probable que ceci n’a commencé que lorsque la surpopulation a produit des guerres et des destructions abominables elles aussi. Les maoris tuaient les vaincus et les mangeaient souvent alors ; il n’est pas sûr qu’ils l’aient toujours fait. Hotu Matua ne pratiquait pas le cannibalisme, semble t’il mais ses descendants le pratiquèrent souvent d’après les légendes de l’île de Pâques.
Des hommes étaient rentrés dans les clans, plusieurs femmes avaient été échangées entre les famille ainsi que de nombreux enfants, plusieurs initiés de la région s’étaient joints à la migration, avec des femmes et des enfants et quelques mois plus tard Hotu Matua était reparti vers l’est et Rapa Nui. Avec un nombre pratiquement équivalent de sujets. Il avait aussi gagné de grands biens sacrés, et laissé une partie des siens auprès des Ahus (les autels des Dieux) ainsi que dans les bois et les grottes sacrées, où les os des ancêtres étaient déposés, protégés des profanations par des tabous implacables. Le marae de Raiatéa est considéré comme étant le marae père de tous les autres qui porte dans ses fondations les pierres venues de Hiwa elle même. Ainsi chaque Roi Ariki qui y a droit peut récupérer lors de son passage une pierre provenant de cet marae pour établir la fondation de son propre marae lorsqu’il aura conquis son domaine. Ainsi avait fait Hotu Matua en échangeant un morceau du marae de son père avec celui concernant sa propre généalogie à Hawaïki. Il avait aussi échangé les images des Dieux qu’il portait avec lui, et tous les présents qui pouvaient faire plaisir à ses ancêtres, et aux Dieux qui visitaient le marae. En effet ce site permettait aux Arikis de faire invoquer les Dieux particuliers par les Tahungas ; les prêtres chargés de l’étude de la liturgie, et capables de lire les intentions des Dieux dans les signes. Le roi Ariki seul était possesseur du mana, mais il avait besoin de l’aide de ses prêtres désignés alors par des signes de possession lors des initiations.
Tunoo: le maléfice
Quelque temps avant l’arrivée de Hotu Matua, Oroï, son demi frère aborda aussi dans l’île de Raiatea la sacrée.
Il venait de Marae Renga ou il avait été un personnage important, mais son parti avait fini par perdre la guerre et l’exil était venu. Quelques guerriers l’accompagnaient avec quelques femmes et enfants.
Cette petite troupe était toutefois très aguerrie, le chef qui l’accueillit lui donna une commandement le temps d’un conflit et fit alliance avec lui en l’adoptant et en lui donnant comme épouse sa fille unique. Il devint un des hommes considérables de la région, comme chef de guerre et époux de la titulaire d’une contrée, dont il eut plusieurs enfants ensuite.
Des personnages importants vinrent le saluer et l’interroger sur les coutumes des terres qu’il avait visitées. Les généalogies ont été récitées, lorsqu’il a déclamé ses origines il a fait reconnaître sa qualité de fils de roi Ariki. Lorsqu’il a chanté les hymnes d’Oro et que le sacrifice a été réalisé il a montré sa science de sorcier inspiré. Lorsqu’ on l’a conduit dans le bois sacré sur le grand Marae sacré, là où gisent les os de ses ancêtres comme le dit la tradition, il a pu approcher des reliques de l’ossuaire, et en capter le mana, la toute puissance qui y réside, car l’homme est fort par la puissance de ses ancêtres, chaque génération est comme une vertèbre, chaque fait glorieux de l’ancêtre est comme un tatouage indélébile. Toute force magique vient de notre lignage, elle se transmet par le sang, par le mana qui réside dans les vestiges et les os de nos pères. Si nous savons traiter les reliques de nos ancêtres avec déférence et respect, nos parents nous aident à progresser et vaincre. Ils nous donnent des moyens particuliers et une conscience plus riche et développée que lorsque nous sommes oublieux de nos origines. Les morts parlent aux vivants qui les aiment, les respectent et entretiennent leur souvenir scrupuleusement. Pour ceci il faut d’abord des rites, et des pratiques répétées. L’initiation des hommes qui n’intègre pas cette dimension est misérable. Oroi était le fils d’une lignée maorie. Il avait le même père qu’Hotu Matua, sa mère était la descendante de Chefs de clans mélanésiens ayant comme ancêtre mythique le requin mako fils de Takaroa. De cette appartenance il avait hérité une part de son aspect physique, ses tatouages, son esprit s’était mêlé avec celui de son ancêtre requin et une partie de sa chair était imprégnée de la chair de squale. Le clan du requin l’a reconnu ici aussi comme un des envoyés du dieu requin.
Ce qui lui donnait prestige et protection. La familiarité des hommes des îles avec les requins était due au fait que les hommes savaient que les grands poissons, fauves de la mer étaient les serviteurs d’un Dieu très puissant et que celui qui serait assez fou pour lutter contre ce Dieu serait aussi saisi par un requin qui lui ferait payer son sacrilège. Pour disputer une vie appartenant au tyran il fallait devenir homme du clan du requin et aussi tuer un grand squale soit un mako, soit un grand requin blanc ,soit encore un requin marteau tout seul et généralement de nuit. Tuer un grand squale était une tâche harassante pour un homme seul. Il lui fallait se purifier et acquérir par l’initiation , les techniques ancestrales, la force magique et mentale qui lui permettraient de vaincre. Beaucoup mourraient ,souvent des suite de leur peur lorsque le Dieu requin leur envoyait son messager et que ce dernier au lieu de se laisser maîtriser par les enchantements se jetait sur la pirogue et la détruisait avec ses mâchoires gigantesques, tuant quelquefois même leur chasseur.
Le principe de base consistait généralement à attirer dans une zone de récifs frangeants un groupe de requin par des sons de calebasses de coco et des offrandes de poisson, de sang et de viande. Lorsque, enfin, au bout d’un temps très long le plus souvent , un grand poisson arrivait il fallait d’abord l’observer et le reconnaître et les hommes du clan lui donnaient un nom secret. C’est ce nom qui deviendrait celui de l’initié lorsque le grand poisson serait mort.
Comment un jeune homme ne disposant que d’instruments qu’il réalisait lui même pourrait il attaquer et détruire un animal pouvant atteindre cinq à six mètres de long et doté d’une force et d’une résistance extraordinaire ? Les outils se composaient de lourdes lances de trois à quatre mètres avec une panoplie de pointes amovibles généralement taillées dans des os. Ces pointes étant reliées à des lignes comportant un flotteur . Deux ou trois rames de nage effilées et garnies de dents de squale ou de nacres taillées pour tenir en respect le monstre lorsqu’il voudrait s’en prendre au bateau et qu’il y frotterait sa peau rugueuse garnie de minuscules dents ,avant de faire un tour sur lui même pour la saisir transversalement dans sa gueule ouverte ,toute sa denture affûtée projetée en avant.
La pirogue utilisée était des plus robuste, deux coques semblables reliées par des arceaux massifs bien chevillés, et attachés solidement avec des cordes de fibres de coco, ou des lanières de cuir. Sur cette partie centrale surélevée se trouvait un plancher formé de lattes de bois, et de nattes de cordes . Le pêcheur s’assurait par des cordages et jetait généralement une ligne avec un appât important cachant un hameçon souple recourbé en arrière et maintenu dans cette position par une petit lien ,lorsque le poisson a avalé l’appât il faut tirer sur ce lien qui libère les deux branches qui se redressent et perforent son estomac. Pour qu’il ne puisse cisailler le lieu principal ce dernier est constitué de filets entortillés de manière lâche.
Une fois le poisson ferré, il fallait rapidement le larder de coups en visant la zone probable du cœur, des yeux avec les lances y ficher les pointes munies de flotteurs et attendre que l’œuvre de la mort se fasse en défendant les coques contre les inévitables agressions à coup de rame de nage . Les chasseurs adroits savaient même avec une petite lance ouvrir le ventre du monstre lorsqu’il venait se frotter aux coques juste avant d’attaquer un flotteur et de le secouer de gauche à droite après y avoir incrusté ses dents. C’était alors le moment ou il fallait atteindre le cœur, ou les yeux avec la lance. . Malheur à celui qui trébuchait ou qui tombait alors dans l’eau. Pour celui qui était vainqueur il y avait un prestige formidable qui dépendait aussi de la taille du requin et des signes de la divinité qui accompagnaient cette victoire. La vie étant magique par nature cette victoire représentait une manifestation visible de la présence du Dieu Requin, et confirmait l’appartenance de l’homme au clan Requin.
Les Maoris savaient que la meilleure manière d’apprendre à combattre les requins était de familiariser leurs enfants avec les monstres par la coutume suivante. Une zone du lagon était généralement transformée en vivier à requin ,en comblant toutes les sorties avec des blocs de corail ou de basalte et des jeunes requins y étaient maintenus en captivité dans quelques brasses d’eau .
Aucun culte ne leur était fait et leur nourriture était faite des surplus de la pèche .
Dans cette piscine les jeunes enfants avaient tous le loisir de se familiariser avec le comportement des poissons et d’acquérir les réflexes qui pourraient les sauver lorsque au cours des dangers de la navigations ils se trouveraient avoir affaire à eux.
Oroï finit par être vaincu dans un combat, et son clan fut anéanti. Il avait alors disparu, et depuis n’ayant pas donné de nouvelles.
Teagi ne connaissait pas Oroï, il en avait entendu parler par sa mère comme d’un homme cruel, détestable. Il avait été banni pour avoir offensé les tabous les plus sacrés et contesté l’autorité de son père. Celui ci l’avait alors frappé, profondément blessé et maudit. Oroï portait la marque de cette blessure et de cette malédiction …Depuis il errait dans les îles maories faisant souvent surtout le mal autour de lui. Si Teagi devait rencontrer son oncle plus tard et le reconnaître, la description des tatouages qu’il portait suffirait. Cette science c’est perdue depuis, alors elle était comme le blason de chaque lignée.
A Raiatea les sectateurs du requin reconnurent Teagi par ses exploits. Il fut admis dans son clan, celui de l’homme oiseau en fonction de ses tatouages rituels.
Dans cette communauté visitée par tous les jeunes nobles des tribus de la Polynésie Teagi fils aîné de Hotu Matua jouissait aussi d’un grand respect malgré son jeune âge. L’île de Raiatea ,est certainement le lieu où les maoris formèrent, développèrent et établirent une grande part de leur culture originale, donc surtout religieuse, magique, et artistique, tout ceci s’est perdu quasiment de nos jours.
Arrivés dans cette île féconde quelques centaines de familles formèrent longtemps un peuple uni gouvernés par des princes Arikis et des initiés aux arts et aux savoirs ancestraux les Tahungas inspirés venus de Hawaiki. Cette île fut celle de Kupe le navigateur, et de son ancêtre Maui, le demi dieu qui découvrit la Nouvelle Zélande (Ao tea roa: le grand nuage blanc, car Maui pécha la terre et la retira de Moana la mer profonde et Kupe son descendant , redécouvrit la terre en voyant au loin de grands nuages blancs ,lors d’une de ses expéditions vers le sud)
Teagi n’eut aucune peine à se faire admettre dans les chefferies de Raiatea. Les anciens l’avaient interrogé sur son passé et sa généalogie, de nombreux ancêtres venaient de Raiatea ou étaient venus en pèlerinage au grand marae lors des fêtes d’initiation des Tahungas. Comme tous les Arikis véritables Teagi portait en lui le mana ,le pouvoir intuitif, spirituel et politique qui naît de la qualité profonde du cœur des hommes initiés, et en fait des fils des Dieux par leurs ancêtres issus de la lignée de Maui, comme aussi de celle d’Oro, lorsque ce dernier descendit sur terre à Raiatea pour l’amour d’une vahiné.
Les hommes qui le rencontrèrent virent cette singularité avec ses tatouages de roi et sa façon de haranguer où de décrire, d’avoir le dessus dans les joutes. Ils virent dans son regard la source de ce pouvoir que ne possédaient ni les mana hune ni les raatira habitués à servir et non à commander. Sa haute taille et sa stature massive en imposait comme la lourde rame effilée de bois de makoi qui ne le quittait jamais prête à fendre le crane d’un importun.
L’arrivée à Raiatea
Lorsqu’il fut en vue de l’île , son navire fut entouré des voiliers de surveillance et de pêche , qui l’escortèrent vers une plage ou se trouvait les hangars des grands navires de guerre. Il accosta et son esquif fut tiré sur la grève. L’Ariki propriétaire du lieu vint le saluer avec son porte parole et ses divers chefs auxiliaires. Le cadeau traditionnel de colliers de fleurs lui fut octroyé, ce qui l’intégrait dans la fenua la grande famille traditionnelle. Un banquet fut organisé à son honneur. Comme le veux la coutume il fit cadeau de toutes les principales richesses qu’il avait accumulées aux princes présents en échange de quoi le chef signifia un tabou sur le reste de ses biens et le considéra bientôt comme un enfant adoptif.
Malgré ce tabou son navire avait été pillé en partie par la famille de son hôte et quelques voisins venus en curieux, mais il n’en tira pas de grief. Il lui aurait fallu surveiller sans cesse ses biens. Quand il fut adopté et qu’il eut une compagne attitrée, il chargea ses deux frères principaux chefs de guerre de la communauté de rechercher ses biens et de les reprendre de force ce qui conduisit à de sévères empoignades tant orales que physique. Mais le prestige obligeait à ne pas déroger et certainement il valait mieux rendre les biens à un hôte de la chefferie qui impressionnait par sa stature et son savoir magique.
Malgré l’envie qui le tenaillait de poursuivre la route de l’est il resta longtemps dans cet établissement. Il dut faire preuve de courage pour quitter cette terre riche où la vie était facile et où il avait acquis une nouvelle famille lui assurant un avenir glorieux. Familier du prince Ariki qui avait hérité de la principauté à sa majorité, compagnon de pèche et de guerre il jouissait de tous les biens de la chefferie, il avait aussi un rôle religieux en l’honneur de ses grands ancêtres.
Les prêtres et les initiés avides d’aventures vinrent s’enquérir des nouvelles de Ao tea roa et de la terre de Hiwa où Teagi avait passé son enfance. Ils lui firent raconter son aventure dans le détail et notaient sur les tapas ce récit. Un chef, celui sur l’aire duquel il avait abordé avait fait de lui son fils adoptif et lui attribua une de ses filles comme épouse légitime. La paix régnait dans l’île gouvernée sagement par l’Ariki Tuu. L’abondance était telle que malgré les périodes de sécheresse et les cyclones qui s’abattaient sur cette région personne ne manquait de rien et le goût de la chair humaine y était inconnu, car les porcs abondaient, ainsi que les coqs, les poules et même des chiens. Les clans étaient organisés en confréries qui partaient pour de longues courses vers les autres îles pour y commerce ou s’établir dans des îles nouvelles. Des migrations suivaient les bancs de bonites, que l’on péchait à la ligne et que l’on faisait sécher au soleil sur des cordes après les avoir imprégnés de sel . Le sel que l’on fabriquait dans les marais salants et dans des étangs creusés sur la côte. Une grande abondance de noix de coco, de kumara (patate douce), d’uru (l’arbre à pain), de taros, de bananes était disponible partout sur cette île cultivée intensivement. Tout ceci fournissait un maa varié et de bonne qualité dans les grands fours communautaires. Peu de personnes étaient réduites à devoir griller eux même leur uru sur un feu de braise. La plus part profitaient des largesses des chefs de familles qui tenaient table ouverte pour tous.
La principale association religieuse avait alors comme patron Tangaroa le pacifique créateur du premier homme Makemake et de la première femme Awa. Les sectateurs de Oro son frère jumeau, le dieu (atua) de la guerre avaient conquis le pouvoir à Tahiti et Moorea, leurs troupes se heurtaient sans cesse, tout prétexte était bon à sacrifier aux Dieux donc à entreprendre une guerre privée où publique à l’issue de laquelle les familles nobles et leurs soldats se livraient à des repas cannibales en mangeant la chair des vaincus et des prisonniers.
Ceci n’était pas encore le cas à Raiatea. L’abondance était alors telle que personne ne voulait perdre son temps à conserver beaucoup de provisions. Les plantations anciennes suffisaient à tous. Les jardins regorgeaient de fruits, de taros, et d’ignames. Chaque famille avait beaucoup d’enfants et les plus pauvres mangeaient à leur faim. Le Roi principal était pacifique. Mais une solide garnison et des milices bien entraînées dissuadaient tout envahisseur, et tous les pillards .La richesse de tous permettait d’entretenir une armée considérable chargée d’assurer la sécurité des abords de l’île et de poursuivre les troupes de guerriers qui y débarqueraient pour y effectuer des pillages. Des fortifications retranchées cerclées de palissades (paa) étaient construits tout autour de l’île pour abriter les troupes des attaques surprise et des guetteurs installés dans des tours sur les hauteurs veillaient de jour et de nuit sans laisser paraître leur présence. Toute approche suspecte était alors considérée comme une intrusion suspecte, les espions étaient alors capturés, interrogés et le plus souvent renvoyés chez eux après une sévère correction. Les conques annonçaient les intrusions, comme d’autres cris, ainsi que différents tambours qui transmettaient aussi le nombre et l’emplacement des agresseurs.
Il advint qu’un contingent de pillards prit pied sur l’île à la faveur d’une tempête. Teagi fut intégré dans la troupe qui fut envoyée par voie de terre pour les arrêter et les mettre hors d’état de nuire. La troupe se munit de provisions, de javelots, d’arcs et de flèches, de casse tètes, et se couvrit de terre rouge sur tout le corps après avoir exécuté le haka (la danse traditionnelle de guerre). Trois chefs de guerre, les plus grands et les plus massifs dirigèrent trois colonnes pour réaliser la manœuvre d’encerclement du campement ennemi, la détection et la neutralisation des sentinelles.
La bataille eut lieu dans la brousse, en pleine nuit. Les pillards furent surpris, entourés de lances, assommés et garrottés. Quelques uns moururent en se jetant sur les lances ou en tentant de s’enfuir, fauchés par les javelots et assommés par les casse têtes.
Ceux qui gardaient les embarcations subirent des pertes importantes et bien peu purent s’enfuir. Arrivés au large prés des passes, ils furent attaqués par les pirogues de guerre qui les cernèrent après avoir tendu des cordes . Il ne resta plus qu’à se rendre maître des quelques hommes qui avaient fui dans la brousse, ou s’étaient dirigés vers les lieux sacrés interdits aux hommes parce qu’on y déposait les morts sur des plate formes de bois, au soleil et à la pluie jusqu’à ce que les os blanchis étaient remis aux héritiers qui les conservaient dans des cachettes secrètes. Des esquilles d’os étaient utilisées pour construire des hameçons , à l’exemple de Maui qui construisit ainsi son hameçon magique avec le fémur de sa grand mère, les musiciens réalisaient des flûtes avec des tibias .Tout ce matériel était soigneusement géré, transformé progressivement en outils, utilisé lors des cérémonies religieuses et emportés lors des migrations. Le crâne des chefs ariki avait une grande importance comme instrument magique et source du pouvoir des princes et des sorciers. Les esprits (tupapau) investissaient ces ossements magiques et ceci permettait d’être en relation avec les mânes des ancêtres, avec leur mana, lui même issu du pouvoir magique des dieux (atua).
C’est dans ce bois sacré que les derniers combats mortels eurent lieu. Les victimes détruisirent avec rage toutes les idoles familiales et mirent le feu aux plate formes et enceintes sacrées. Lorsqu’il furent acculés ils se défendirent avec désespoir. Quelques prisonniers furent faits pour être interrogés et définir d’où venait la menace future puisque ceux qui les avaient envoyé voudraient les venger. Teagi fut surpris de constater que les cadavres des vaincus étaient regroupés sur un tas de bois et brûlés sans qu’un festin fut organisé avec leur viande. Les sorciers même ne purent récolter les macabres instruments de leur art . Toutes les têtes décollées des assaillants du marae sacré furent plantées sur des pieux , autour du jardin sacré. Un seul captif noble survécut, il fut renvoyé dans son île avec comme mission de raconter la défaite. On lui coupa les cheveux , un serviteur l’accompagnait. Les clans vainqueurs se partagèrent le butins des armes ,des parures et des pirogues capturées. Au lieu de fêter leur victoire et de jouir des joies de la victoire les hommes partirent vers les lieux de pèche escortés par les dauphins avec lesquels ils avaient fait alliance les tambours jouaient sourdement s’il y avait quelque troupe en mer ils seraient effrayés et fuiraient.
Les dauphins sont certainement les compagnons habituels les plus communs des clans de pécheurs bien que peu d’hommes aient eu des relations suivies avec eux ; le simple souvenir de Teagi lui rappelait les bandes de dauphins croisant dans les domaines maritimes qu’il avait fréquenté et lui apportant des informations pertinentes sur la présence du poisson. Les bancs importants de dauphins situés au large chassaient les bancs de poissons qui se déplaçaient dans les domaines de Moana la grande mer profonde ou la vie abondait alors.
Les Maoris firent alliance avec les dauphins et avec les autres cétacés qui visitaient ces contrées, les orques, les cachalots, les baleines australes et franches , les otaries. Il existait généralement un tabou sur la chasse des mammifères marins, celle ci n’avait lieu qu’à de rares occasions bien précises. De nombreux objets courants provenaient de la chasse des dauphins et des phoques qui fournissaient des peaux de bonne qualité pour réaliser des cuirs. Ces cuirs étant nécessaires pour réaliser les outres et étancher les jarres de vannerie qui servaient à contenir les réserves d’eau. Pour les conserver et les tanner la fumée et les différents sucs des plantes souvent transformés en poix goudronnée, étaient utilisées. Mais sous ces climats les peaux se conservent souvent mal, bien plus mal que le bois qui était le plus souvent utilisé aussi pour réaliser les récipients les plus courants.
Les dauphins avaient de leur côté pris l’habitude des hommes et accouraient autour des embarcations lorsque les marins partaient vers le large pour capturer les poissons, ils repoussaient alors les bancs de poissons vers les filets collectifs et participaient à la curée, lorsque les filets étaient relevés progressivement les poissons les plus vifs s’échappaient en bondissant et les dauphins à l’affût les cueillaient au vol.
Teagi se souvenait de Ao tea roa où certains clans tuaient les marsouins et les petits dauphins pour leur peau et leur chair, ils tendaient des filets et y repoussaient les bandes de dauphins qui suivaient les migrations des poissons qui venaient se reproduire dans les herbiers des plages ,les dauphins qui s’échouaient et mourraient sur les plages étaient aussi mangés lorsqu’ils étaient trouvés agonisants. La plus part étaient harponnés à l’improviste lorsqu’ils approchaient curieux des embarcations. Aussi les dauphins craignaient ils les pirogues et ne s’en approchaient guère. Les otaries et les phoques qui échouaient sur les plages étaient tuées systématiquement si bien qu’il n’en restait presque plus partout malgré les tabous et les terres sacrées. La guerre continuelle que se livrait les tribus était sans doute la cause principale de ces exterminations.
Ici les dauphins étaient les amis des pêcheurs qui ne les tuaient jamais et qui venaient souvent les rencontrer pour le plaisir. Quand aux cachalots et aux orques qui abondaient, peu de clans avaient osé s’y attaquer ,se contentant de repérer les individus malades et d’utiliser les carcasses de ceux qui venaient s’échouer aux rivages. Dans quelques lagons s’acclimatèrent un temps quelques dauphins qui vivaient au contact des hommes d’un clan et qui étaient si familiers qu’ils semblaient être la réincarnation d’un ancêtre. Ces animaux familiers suivaient les pirogues et avaient appris à utiliser les mouvements des pécheurs lors de leurs pêches collectives , ils rabattaient délibérément les bancs de poissons vers les filets comme des chiens de berger tournant autour du troupeau. Une fois la capture réalisée ils recevaient leur dîme. Les dauphins des lagons étaient rarement en groupe et en famille, ils étaient généralement blessés ou malades lorsqu’ils y arrivaient, ils en partaient un jour pour rejoindre d’autres groupes qui croisaient au large. Il en était de même pour les otaries dans quelques îlots isolés aux pentes souvent abruptes qui les accueillaient en grand nombre . Lorsque le chef principal l’Ariki avait décidé de les protéger par un tabou définitif. Ces animaux ne fuient pas naturellement l’homme et les jeunes sont même apprivoisables. Seules les communautés peu nombreuses disposant de ressources en abondance toléraient cette présence. Les otaries qui abordaient les rivages habitées par les maoris étaient massacrées sans pitié ,pour leur chair et leur peau. Dans les îles de corail, celles qui n’ont pas de hautes terres et de montagnes l’eau manquait, les légumes venaient difficilement mais la maladie y était plus rare qu’ailleurs. Les enfants représentaient un capital toujours renouvelé, et bientôt il fallait qu’une partie du peuple émigre vers d’autres îles parce que la nourriture devenait insuffisante pour tous et qu’il y avait trop de batailles entre les hommes pour les fruits volés et les arbres abattus. Alors les tabous étaient généralement violés et la faune massacrée sans pitié par les combattants. Un jour la migration avait lieu sous la contrainte, ou à la suite d’une négociation entre un père et ses fils. Généralement c’est le père qui partait avec ses plus jeunes fils, laissant le fils aîné régner sur son royaume. Il amenait avec lui une partie de la tribu, les meilleurs guerriers , la part la plus importante des femmes restait sur place avec les vieillards. Une fois la terre conquise, quelques pirogues revenaient chercher des femmes et apporter en contre partie les trésors de l’île conquise. Souvent il y avait avant le grand départ une ou plusieurs expédition de reconnaissance.
Quelques pirogues de pêche suivirent discrètement la pirogue des vaincus. Un groupe de jeunes initiés débarqua et s’enquit de la suite des événements en observant ce qui se passait dans l’île d’où ils venaient .Lorsque qu’ils surent que leurs guerriers avaient trouvé la mort tous les hommes s’assemblèrent dans la case des festins . Le groupe d’origine des assaillants était très minoritaire et visiblement assez misérable à en juger par les constructions et les plantations en ruines sans doute à la suite d’une guerre tribale locale. Les feux étaient peu nombreux et les hommes qui restaient à peine quelques centaines avec une majorité de vieillard et de jeunes hommes. Rien de bien sérieux ne pourrait venir de ce côté avant longtemps. Les espions retournèrent à Raiatea. La conquête de cette île fut discutée par les chefs assistés de leurs porte paroles mais le sentiment général fut qu’il ne fallait pas donner argument aux chefferies de Huahine qui considéraient cette région comme leur protectorat parce qu’ils s’y fournissaient en femmes et qu’ils y avaient des liens de famille. Cette guerre aurait entraîné la guerre contre la ligue de Huahine, Tahaa et Bora-Bora dont les différents Arikis venaient de Moorea et étaient des sectateurs de Oro. Les princes prirent donc des mesures de protection en renforçant la surveillance et les patrouilles de nuit. La paix se maintint pendant toute l’année qui suivit, ce qui était assez exceptionnel dans cette région surpeuplée en proie aux désordre des guerres de clan et des sectes religieuse.
La migration des Arikis.
Les écoles initiatiques apprenaient aux jeunes nobles à connaître le domaine maritime dans toute sa complexité, et à naviguer dans les pires conditions lors des tempêtes et des calmes. Le ciel était un livre ouvert où les différentes planètes avaient un nom. Les saisons étaient connues, bien que sous ces latitudes elles soient peu marquées, des cartes maritimes donnaient l’emplacement des terres découvertes , leurs noms et la lignée des Arikis qui s’en étaient rendus maîtres. Ces cartes étaient dessinées sur des tapas, ou même gravées sur des planches de bois
La vie à Hawaiki raiatea était douce parce qu’un flot continu de guerriers et d’initiés partaient vers les terres du nord est lointain, vers Hawaï, la terre située à soixante journées de navigation vers les sept petits yeux, groupe d’étoiles nordiques. D’autres tribus de la lignée de Kupe et de Maui partaient vers Hiwa ,la grande terre des Matangata les ancêtres des maoris, occupée par les guerriers et cultivateurs mélanésiens arrivés après eux qui les supplantèrent ensuite, d’autre vers Ao tea roa : la Nouvelle Zélande, d’autres encore vers les îlots de corail des Toamutu, vers Tongatapu et vers la Nouvelle Guinée féroce, pour y conquérir un domaine et y retrouver la famille et les clans maoris qui y vivaient. L’arrivée des migrations étaient souvent la cause de guerres ,mais il y avait toujours un parti qui prenait fait et cause pour les nouveaux arrivants et leur offrait une hospitalité intéressée, spécialement lorsqu’il s’agissait d’une forte colonie pouvant aider à rétablir un rapport de forces militaire défavorable.
Les Arikis qui dirigeaient les migrations étaient considérés comme des frères par leurs hôtes surtout lorsque la liste des généalogie faisait reconnaître les ancêtres communs proches. La règle était qu’un prince des terres ou la migration aborde adopte le prince de la migration et qu’il lui donne une partie de son territoire, après partage des biens précieux transportés par les vaisseaux .
L’alliance des peuples se faisait progressivement par le mariage des hommes et des femmes des deux clans ainsi que par les échanges d’enfants qui sont une des coutume constante des règles culturelles des polynésiens. L’épopée de Maui était racontée par les Aréoi les bardes experts en généalogie et en amour. Ces initiés secrets qui jamais ne se mariaient et n’avaient pas d’enfants disposaient d’un prestige extraordinaire, leurs rêves les entraînaient vers les sources de connaissances et les demeures des Atuas, nul n’était propriétaire d’eux et ils ne s’occupaient jamais des guerres et des querelles. Leur filiation était généralement mystérieuse puisqu’ils prenaient des noms nouveaux et quittaient leurs parents dés qu’ils avaient été initiés par leurs maîtres. Le choix des maîtres se portait sur les enfants inspirés par la voix des forces nocturnes, ceux qui voyaient des mirages, qui connaissaient la foi, la loi, sans l’avoir apprise, généralement nés d’un caprice d’une vahiné de haut rang pour un Areoï. Ils se complaisaient dans le voisinage des chefs les plus puissants dont ils contaient les exploits, quelques uns servaient aussi de porte parole d’île en île ils étaient traités avec beaucoup d’égards même si certains servaient d’agents de renseignement lors des conflits.
LE WAIATEA DE MAUI
Te Tangimoko était très jeune, dix huit ans au plus, il venait de Tonga Tapu ou il avait été recruté par les Aéroïs qui l’avaient entrainés vers le sanctuaire de Raiatea ,le grand marae de pierres qui voyait les rites toujours recommencés de l’initiation des adolescents et des rites des tahungas. Ces derniers qui se confondent avec la classe des prêtres et qui sortent généralement des classes nobles étaient destinés à établir les règles sociales et à juger des différents entre les clans au sujet des affaires privées qui n’enfreignaient pas les directives du roi et ne touchaient pas à l’honneur sourcilleux des nobles.
Leur enseignement dispensé aux enfants des nobles, comme à ceux des cultivateurs (vaikas) comprenait les différents arts de la culture maorie. L’art oratoire était l’art principal, la connaissance des mythes venait ensuite. Le tahunga devait connaître toutes les versions des histoires participant au culte des ancêtres, la science de la navigation, les danses, le travail du bois, la construction de maisons et de pirogues, l’art du feu, la pèche, la manière de servir les dieux, la manière de procréer et de s’y prendre avec les femmes. On apprenait aussi à mieux se battre ,à survivre sans boire, sans manger, jusqu’à devenir une sorte de squelette sans conscience et sans peur, à résister à la douleur. Puis l’homme initié devenait roi si son père avait le sceptre, ou s’exilait pour affermir son caractère et vivre son temps d’aventure, comme guerrier ou comme navigateur, accompagné de quelques amis d’initiation.
Ce jour là c’était un très jeune homme qui chantait les hymnes devant les clans réunis sur l’esplanade du marae, après les danses et l’interminable festin de taros, de bananes, de fruits de l’arbre à pain ,de porc, de poulet, de poissons et de crustacés qui fêtait l’arrivée des familles revenues de Hiwa avec des présents exotiques. De sa belle voix chaude et amoureuse l’adolescent chantait la geste de Maui le demi dieu ancêtre de tous les arikis.
Maui était né à Taranga une localité d’ Hawaiki, c’était le plus jeune (potiki) de toute une famille, en particulier il avait trois autre frères aînés qui ne l’aimaient guère, car il était le préféré de ses parents, bien qu’il soit très laid dans son enfance, et il était le plus habile dans tous les arts, et spécialement en magie et en incantations.
L’hymne commence traditionnellement par la généalogie de Maui. Puis le chanteur fit la liste de ses exploits ,il précisa toutefois qu’il chanterait aujourd’hui la découverte de la terre par Maui.
Maui vivait à Taranga, dans la maison de sa famille, il descendait de Muri Ranga Whehuna, son père se nommait Makea Tutara. Sa naissance miraculeuse nous est contée ainsi. Sa mère le mit au monde alors qu’il n’était qu’un fœtus rouge et grimaçant, elle le crut destiné à la mort et le jeta dans la mer. Mais un Dieu marin s’occupa de Maui, il le cacha dans les algues et le nourrit de la nourriture magique des êtres divins. Lorsqu’il fut assez grand pour sortir de sa retraite Maui rentra chez lui et se fit reconnaître par ses parents. Le fait d’avoir été élevé par un Dieu lui servit ensuite sa vie durant. Grâce aux pouvoirs que lui avaient transmis son protecteur il put découvrir la fabrication du feu avec un bâton frotté, il fut même à quelques instants d’acquérir l’immortalité pour toute l’humanité, mais ceci est une autre histoire. Car c’est ce qui causa sa perte. Lorsqu’il fut initié Maui devint tahunga. Il avait la faculté de changer de forme, de pouvoir se transformer en un animal, ou même un insecte. Il fut surtout un oiseau frégate, il pouvait à volonté se transporter dans le corps d’un autre être vivant, lorsqu’il revint dans son corps d’humain il se dessina lui même l’effigie de l’homme oiseau sur sa poitrine. Avec ce moko magique il parcourut en rêve en devenant un oiseau l’immensité des océans de la mer profonde (moana nui) et vit au fond des flots une grande terre, le poisson de Maui (ika a Maui). Il en nota la direction au soleil couchant puis en fixant les étoiles du chemin dans sa pensée. Lorsqu’il revit les étoiles longtemps après il se souvint de son voyage alors qu’il avait pris la forme d’une frégate mâle dans ses rêves.
Maui se distinguait par ses exploits, il savait rire et chanter, il était gai. Maui était le plus petit ( potiki), Maui tikitiki a Taranga (sans doute Moorea). Ses frères allaient pécher au large les grands poissons sans lui et se moquaient des petits poissons que prenaient Maui dans les récifs du rivage. Maui leur dit alors qu’il prendrait un jour un poisson aussi grand que la terre où ils vivaient ,ses frères se moquaient depuis du jeune homme en lui rappelant sans cesse cette prétention, ce qui le décida alors de réaliser ses trois premiers exploits. Il fit ralentir le soleil, il domestiqua le feu (aii), il rendit l’homme mortel. Après ces trois épreuves réussies par son habilité, sa prescience et ses incantations magiques tout le monde le surnomma nukarau, c’est à dire le fourbe, atamai le spirituel, mohio le rusé et toa le courageux. Maui était devenu un homme fait ,mais en bute à l’hostilité de ses frères, il dut se cacher pour préparer l’ hameçon magique dont il aurait besoin et s’embarquer clandestinement sur la pirogue de ses frères.
La mâchoire sacrée.
L’hymne racontait ensuite l’histoire de la mâchoire sacrée provenant de l’ancêtre de Maui qui se nommait Muri ranga whehuna, les ossements de cette ancêtre étaient sacrés et protégé par un tabou exclusif. Maui se procura la mâchoire de son ancêtre par la ruse et construisit son hameçon magique avec un fragment de cet os. lorsqu’il eut construit son hameçon avec une hampe de nacre d’haliotis, qu’il l’eut percé et lié avec une ficelle faite de toiles d’araignées, il alla chercher les fibres pour faire des cordes imputrescibles dans les cascades, et il les battait et il les filait ,et il les tressait alors que ses frères étaient en mer, lorsqu’ils rentraient il cachait son ouvrage et faisait l’insouciant à jouer du vivo et à courtiser les filles. Lorsqu’il fut prêt il se cacha dans la pirogue de ses frères avec sa ligne magique, une outre d’eau et quelques aliments sous les panneaux de joncs tressés tuku-tuku qui en couvraient le fond, il faisait encore nuit lorsqu’ils poussèrent leur navire à l’eau et qu’ils s’éloignèrent à la rame. Puis une fois au large ils se mirent à chanter et à pagayer pour aller vers leurs lieux de pèche. Alors Maui fit venir une tempête par ses enchantement et celle ci les porta vers le sud ouest pendant des jours .Lorsque la tempête se calma ils étaient tous épuisés et n’avaient plus rien à manger, ils se mirent à pêcher. Alors Maui sorti de sa cachette. Ses frères qui avaient déjà résolu de le faire périr lorsqu’ils reviendraient à Hawaiki le prirent tout d’abord pour un revenant, puis lorsqu’il eut expliqué sa présence et qu’ils l’eurent touché pour vérifier qu’il était bien en chair et en os et non un fantôme, recommencèrent à se moquer de lui, de sa ligne et de son orgueil d’homme supérieur. Ils lui refusèrent un appât et se mirent à pêcher en le contemplant narquois. Maui ne perdit pas contenance, il s’écrasa le nez d’un coup de poing et enduit son hameçon magique de son sang. Lorsque le sang fut bien sec, il jeta sa ligne au loin et attendit. Sa ligne descendit au fond de la mer et se ficha dans la flèche de la maison du génie qui habitait le poisson de Maui, ce génie se mit en colère et fit des incantations pour rompre l’hameçon et la ligne. Mais la magie de la ligne était supérieure à la sienne. Et Maui se mit à tirer sans discontinuité sur sa ligne. La pirogue se remplissait d’eau et ses frères avaient peur de périr. Il les rassura et leur dit qu’il venait de pécher sa terre . Le jour se leva et en même temps ils aperçurent une vaste terre qui émergeait de la mer, au bout de la ligne de Maui. La pèche fut ensuite fructueuse, ils descendirent à terre pour y faire un sacrifice ,Maui prit possession de sa terre et comme il se comportait assez déraisonnablement en voulant tout régenter ses frères mirent leur projet à exécution et l’abandonnèrent sur place, retournant vers leur pays natal.
Mais leur embarcation fut détruite par une tempête et aucun n’en réchappa. Maui se construisit une embarcation avec l’aide du dieu Tane, le dieu de l’initiation et des arbres et regagna son pays natal, où son père ne le reconnut tout d’abord pas. Il prit avec lui tous ceux qui voulaient l’accompagner vers cette nouvelle terre et devint roi de ce domaine. Il y vécut longtemps sans y trouver le repos. Il songeait sans cesse à Hawaiki.
Un jour il retourna aux pays de ses ancêtres pour y mourir. Ses os furent enterrés sous le grand maare qu’il commença de construire. Cela se passait très longtemps avant que Kupe atteignit Ao Téa Roa avec de nombreuses pirogues. Selon la légende les enfants de Maui sont tous partis vers les terres lointaines que leur père leur avait promis.
Lorsqu’il revint dans son pays natal Maui était plein d’expérience et il racontait à tout le monde qu’il avait jadis connu et obtenu l’amitié de Tiki le fils de Tane, celui que l’on nomme le fœtus, qui est le messager des Dieux immortels sur la terre. Personne ne le croyait pensant qu’il voulait se rendre intéressant. Ceux qui se moquaient de lui Maui les défia dans un combat à mains nues et les vainquit (te wero a maui).
Malgré les mythes peu d’hommes croyaient à la présence de Tiki sur la terre, et encore moins que Maui ait pu accomplir tous ses exploits. Bien peu d’hommes croient sans avoir été les témoins particuliers choisis par les avatars des puissances extraordinaires qui gouvernent notre monde et notre univers. Ces messagers sont des extraterrestres venant du cosmos, et ceux qui ne les ont pas rencontrés ne croient pas qu’ils puissent exister. Les mondes d’où ils pourraient venir étant si éloignés qu’on n’imagine pas que ce soit possible.
Teagi avait connu lui aussi Tiki et l’incrédulité du peuple le faisait sourire, mais il ne disait rien. Le temps n’était pas encore venu pour lui de parler de son ami. Souvent il priait sur le Marae en pensant à Tiki. Pour conserver son souvenir il en avait taillé une image qu’il honorait sur l’autel des dieux.
Après l’hymne à Maui, les chants collectifs et les danses reprirent un temps puis tout le monde s’en fut se coucher sur sa natte. Teagi resta avec le barde et l’interrogea sur ses ancêtres de Hawaiki. Il lui raconta ensuite une partie de son histoire en lui demandant le secret, le barde lui demanda quelques détails qui prouvaient qu’il savait presque tout de Tiki, après cela il lui dit : « Si Tiki t’a parlé ainsi tu es un élu de la destinée, tu es désigné pour aller au delà de l’horizon vers les lieux d’où personne ne revient ».
Le panier de la connaissance.
La somme des savoirs connus par le jeune barde était énorme, il possédait en outre la science des généalogies et savait lire et écrire les textes anciens sur des feuilles de bananier (il n’y a pas de feuille plus fragile), des tapas, des peaux d’animaux ou des planchettes de bois dur. Aussi bien sous forme de signes magiques, que sous la dénomination de mots maoris et étrangers dont le sens s’était perdu lors des migrations.
L’histoire de cette connaissance était incertaine, mais remontait à l’époque où les ancêtres des Arikis habitaient un continent, une terre sans limite, où poussait le riz sauvage (Ari) et le coton que les hommes utilisaient pour faire des vêtements et des filets pour la pèche. Le dieu Tane avait donné aux hommes les trois paniers de la connaissance et des lois. Le premier renfermait le savoir sur la création ,les caractéristiques du Dieu suprême Io et toutes les sciences utiles et propices à l’homme.
Le deuxième panier renfermait le savoir relatif aux rituels, chants, invocations magiques.
Le troisième avait trait aux pouvoirs extraordinaires qui ne peuvent être exercés que contrairement à l’ordre naturel.
Ces trois savoirs étaient écrits primitivement sur des peaux d’animaux qui finirent par tomber en poussière. Ils furent recopiés sur des plaquettes de bois et sur des tapas conservés jalousement par les initiés nommés Rongorongo.
C’était la première fois qu’on apprenait à Teagi que Tane avait visité le dieu suprême Io, créateur de l’ensemble des mondes, vivant dans le passé, comme dans l’avenir; dans le présent au fond des espaces infinis comme au fond de la plus petite particule de matière, partout avec la même densité et la même présence. L’esprit infini du monde possèderait donc un domaine où il serait intelligible et deviendrait comme une personne. Tane était venu vers les hommes pour les instruire, comme Takaroa était venu pour créer le premier homme Makemake le démiurge qui apporta la lumière aux hommes. Celui dont le sacrifice primordial recréa toute vie, après qu’elle fut détruite par la forme précédente de l’homme.
C’est cette histoire que le poète maori raconta en langage ancien, l’histoire des Dieux nés de la nuit (Nga Atua faare po).(nga : proche de naga indique le pluriel, peut être considéré comme l’article pluriel les )
Ici se place dans ce récit la légende de Takaroa et de son fils qui est sa propre image matérielle terrestre Makemake.
CHAPITRE SIXIEME
La légende des Dieux nés de la nuit. Ng’Atua faare Po..
Au milieu du désert des mondes infinis, face aux grandes sources de matières et d’esprits se tenait l’Assemblée des Dieux nés de la nuit. Les Dieux avaient acquis le privilège de vivre éternellement et leur principale occupation était de banqueter et de faire l’amour, tout était harmonieux dans leur monde qui était né dans une grande caverne. La nuit : PO enfanta du cosmos, elle expulsa d’abord l’Univers, puis les Dieux qui s’unirent les uns aux autres pour former toutes choses. Le Seigneur des mutations; Takaroa gagna au jeu le pouvoir sur le cercle de matière qui passe par la terre (la voie lactée sans doute). Alors il prit un corps de lumière et vint s’asseoir au milieu de l’infinité des mondes et des translations de mondes en devenir. Il fit son gîte dans notre système. Là il construisit un nid, puis il descendit sur la terre et la mer sous la forme d’un oiseau blanc, et pondit un œuf unique. De cet œuf sortit toute vie. Takaroa se reposa alors, regardant la vie s’étendre sur la poussière du monde comme une moisissure verte et bleue, peu satisfait des formes obtenues. Comme il errait sur la terre d’Hiwa ,à Hawaiki. Il s’arrêta prés d’une source, il en goûta l’eau la trouvant si exquise et douce, il y installa sa demeure.
Alors, il prit de la terre rouge argileuse, la façonna en spirales, avec cette forme, il fit l’homme premier, et il souffla dans ses narines pour l’éveiller. L’homme fait du limon d’Hiwa commença à vivre, son cœur se mit à battre, puis il respira, enfin ses yeux s’ouvrirent en battant comme deux papillons. L’homme émergea de sa gangue de boue gluante, et se baigna, l’eau fut toute rouge dans la vasque de la source.
Puis l’eau devint miroir et le premier homme se regarda sans complaisance, sa peau avait perdu la couleur de la terre, elle était à présent toute blanche, alors Arakea le premier humain éveillé rit en voyant la tête du premier homme qui était pitoyable, une face lunaire, mangée de barbe, avec des yeux immenses où brillaient des désirs hideux, le premier homme rit encore mais eut pitié de lui même, il regarda avec amusement ses mains habitées par dix génies malicieux et incontrôlables. Takaroa avait donné le souffle de vie et son esprit ironique au premier homme.
Une forme de l’entité suprême était venue dans le brouillard du premier jour de l’homme. C’était l’Entité magique responsable de la terre, qui avait senti la venue de l’usurpateur. Elle enveloppa le premier homme dans un brouillard épais. Le Dieu Takaroa , qui veillait à proximité de sa créature, vit la jolie déesse et conçut pour elle un amour infini. Alors il se fit piège et la captura, comme un grand filet tressé de feu et de tiare (une fleur au parfum suave) qui rend amoureux, l’ayant ainsi enlacée, il lui murmura les mots de tendresse qui font affluer la marée de tendresse, gonfler les lèvres, palpiter le cœur, tandis que les larmes montent aux yeux. Jouant de la flûte nasale, le beau Dieu aux yeux profonds ,fit la danse autour de sa captive, il lui présenta un voile d’azur moiré de toutes les irisations des nacres les plus précieuses, des arabesques de fleurs précieuses et odorantes, il fit retentir un tolere d’amour en battant un tambour tout en jouant du vivo, et chantant de sa belle voix pareille au son des trompes et de la conque marine, toute la science de l’amour des Areois, il la mit aux pieds de la souple et grande vierge, qui balançait sa lourde chevelure ouvrant ses bras; souple et luisante de l’onction du parfum de santal. Lentement la belle déesse froide baissa les yeux, rit et rompant le filet magique, ramassa toute la brume et disparut. La nuit se fit et la lune pleine et rouge se leva sur l’horizon. Au bout de quelques temps, la belle déesse nommée Hina revint s’étant parée et parfumée comme une mariée. Le Dieu amoureux la regarda danser sur les eaux et dans l’écrin d’un ciel constellé des étoiles palpitantes. La déesse le rejoignit lorsqu’elle eut mûri son désir; s’asseyant tout contre lui elle lui offrit ses lèvres de miel, la transparence laiteuse et frémissante de sa peau, son odeur suave. S’étant caressés, mêlés, ayant fait tous les gestes de l’amour et en ayant conçu beaucoup de plaisir, les deux amants contemplaient le corps de l’homme et un grand rire leur vint lorsqu’ils virent à quoi l’homme songeait. Takaroa prit une bouture de bananier, il la trempa du sang de l’homme et la caressant suivant les formes d’Hina qu’il avait connue, il créa la première femme. Il la nomma Awa parce qu’elle était belle et qu’elle reliait l’homme aux Dieux, et les Dieux à l’homme.
Quand le premier homme se réveilla au matin, il contempla le monde par les fenêtres de ses sens, se sentit à l’étroit, seul ,angoissé, il découvrait son corps qu’il lui faudrait aimer et diriger. Il prit une calebasse pour boire, et y mira son visage. Voilà ! se dit il, le fils de ce qui est noble et divin.
A cet instant le ciel s’ouvrit et un oiseau blanc en descendit pour se percher familièrement sur son épaule, le Mana du monde s’investit dans l’homme primordial qui prit le nom de MaKemaKe.
Disposant de la source de connaissance, de créativité, de magie, le premier homme se répandit parmi les créatures innommables qui lui ressemblaient, cherchant en vain une partie de son être. La sœur, épouse de Makemake Awa avait été enfermée dans un cocon tissé par la soie d’un papillon de nuit. Et suspendue dans ce linceul dans un arbre. Le jeune Dieu Makemake visita la terre d’Hiwa et rencontrant les créatures à visage humain investit le cœur et l’âme d’un jeune homme nommé Herepa. Dans la caverne où se terrent les innommables, il fit choix d’un femelle et celle-ci devint la jeune femme Uka. Elle attira Herepa sur la plate -forme carrée, elle l’entoura d’un rideau de peaux. Là ils conçurent l’amour et les autres rites .Du ventre d’Uka sortit la lignée des hommes anciens beaux comme les Dieux.
Son cadeau incertain fait, le Dieu Malemake oublieux de sa partie femelle se retira sur une montagne pour voyager en lui même et se désintéressa des larves de l’homme futur.
Alors l’homme se multiplia sans mesure, et développant son pouvoir sur toutes les formes de vies, il s’assit sur un trône en pierre ou en métal venu du ciel, face au soleil, levant son sceptre refusant de baisser les yeux et d’avoir pitié des êtres fragiles et imparfaits. Injuriant les faibles et établissant la servitude ; l’homme prétendait commander aux éléments mêmes. L’orgueil lui fit perdre la protection des Dieux immortels. Vint alors la destruction de toute vie. L’homme ne fut plus à côté de Dieu, comme avant, l’homme nouveau, la race future et actuelle subit le déluge et tout fut comme mort, car la mémoire de la vie avait été effacée.
Une source de vie subsistait néanmoins dans l’île la plus éloignée Matahiwa, la fontaine de jouvence .
Toutes les choses se font et se défont fatalement!
Lorsque l’ombre de la mort eut recouvert de poussière le monde, Makemake sortit de son sommeil, et il vit la terre d’Hiwa où était la tombe prison de sa partie femelle sombrer en s’inclinant dans la mer. La lumière du soleil s’était voilée sur toutes les terres, les volcans jaillirent et illuminèrent la nuit de leurs grondements, des barrières de roches se construisirent, l’axe du monde bascula.
Makemake descendit de la montagne, progressivement le jour se fit, il ne rencontra personne, une épaisse couche de cendres se déposait, lorsqu’il pleuvait la terre se creusait de failles, les océans étaient boueux et gluants, une couche d’écume couvrait les rivages.
Makemake voyagea de l’occident à l’orient avec une baleine envoyée par Takaroa, et par la voie des airs parce qu’il avait le pouvoir de se transformer en animal et en oiseau. Il arriva épuisé dans l’île du Nombril du monde où il avait pris naissance jadis. Là subsistait un arbre unique, l’arbre de vie. Il faisait un pont entre le ciel et la terre. Ses racines exploraient le sol sacré et ses branches ornées d’un feuillage multicolore et bruissant s’enfonçaient dans l’espace vibrant. Cet arbre ne donnait aucun fruit! aucune fleur ne naissait à la saison des pluies. L’arbre primordial s’adressa au démiurge pour ressusciter la vie et l’ordre du monde.
Ceci explique la création du mana.
Toi !
Donnes-moi ton sang, ton essence de vie, sacrifies ton être pour que le cycle sans fin des naissances et des enfantements reprenne !
Le Dieu se rendit à la pierre du sacrifice, là il s’immola face au soleil couchant. L’essence de vie sortit de son corps et fut absorbée et tuée par l’arbre de l’origine. Elle ressuscita un an plus tard. L’arbre se couvrit de fleurs de toutes les espèces, puis de fruits. Les graines et les germes de vie de toutes les espèces furent disséminés par toute la terre.
Les Mânes, les esprits en devenir, de cet univers se saisirent aussi de l’essence de vie, elle ressuscita avec chaque cycle de lune. Le Dieu s’était énucléé de son œil droit celui ci devint l’astre de la nuit. Puis des Dieux eux même qui erraient sur la terre sans but et sans mémoire se saisirent de l’essence de vie qui sourdait du corps gisant, elle se distilla en eux et ressuscita tous les demi-mois, (demi cycle de la lune). Enfin les hommes qui survivaient dans le désespoir s’en saisirent comme d’un gibier, elle s’investit en eux la source de vie, l’essence de vie de Makemake.
Oro aux dents de squale, le Dieu de la guerre, le demi-frère de Makemake sortit de son volcan et vint chercher le cadavre de celui qu’il haïssait pour sa beauté et sa bonté. Pris d’un folie furieuse, il déchiqueta les membres et cacha chaque morceau dans un de ses repaires secrets.
Les hommes avaient volé un peu de l’essence de vie. Par elle ils sortirent de la sauvagerie et ne furent plus tributaires d’un seul esprit commun à l’espèce. Ils devinrent tous gardien d’une âme individuelle. Les âmes se perfectionnaient peu-à-peu et l’homme apprit les langages signifiants et magiques. Alors, il sut construire sa propre trame et adora les Dieux immortels. Mais partout où l’esprit de l’essence de Makemake se développait, partout revenait l’homme ancien avec son maître Oro aux dents aiguës, l’homme méchant peint de sang.
La vie est une source inépuisable de joies, mais survienne l’homme au cœur empoisonné, l’homme de mauvaise structure et la fontaine de joies est empoisonnée, l’eau la plus pure devient poison.
Alors, sous peine de disparaître dans le sang des autres, l’homme pur doit livrer un combat désespéré et implacable, contre l’ autre marqué du signe satanique, qui s’infiltre dans la structure des nations pour y propager la race maudite par les Dieux, de ceux qui s’assirent face au soleil dans le trône de l’homme à Hiwa.
Avec leur maître puissant et rusé, leur fécondité extrême, leur résistance à mourir , leur insistance à survivre, ils colonisent les corps et les âmes par leur magie et leur terreur.
Par leurs désirs immodestes des hommes ont abusé des sources de vie, créant des êtres innombrables et propageant toutes les faiblesses qui gîtent dans l’inconstance et dans l’orgueil de la nature humaine.
Les aliments de tous en sont souillés, ces hommes ont falsifié et violé les tabous, tout a pourri à leur contact, le Kaha est sorti de l’enceinte dévolue, l’initié n’a plus autorité et perd son savoir ancestral pour décider des rites et des fêtes. Les serviteurs des démons de l’homme se sont emparés du pouvoir cultuel d’abord par la ruse, puis ils l’ont profané par la violence fanatique. Ils ont détruit l’édifice spirituel construit par les ancêtres, et installé les esclaves de ton sang à la prêtrise dans les temples.
Ils se sont attaqué à ton fils pour en faire un prolétaire de leurs fabrications, consommateur de leurs produits falsifiés et drogués. Ils l’ont fait cracher sur l’œuvre de tes mains , de tes sens, de ton amour. Il aurait mieux valu que tu n’ ais pas de descendance, car ceux-ci sont esclaves et étrangers dans leur propre Patrie. Ta femme et ta fille, ils en font des filles publiques, ils ont souillé ton sang y puisant leur forme présente. A présent, ils entourent et conseillent les princes leur culte est devenu le seul officiel, c’est à dire que le tien est interdit, on a brûlé les effigies sacrées, et coupé les bois divins. Toute noblesse a fui , le Maori a perdu sa noblesse ancienne, il est devenu un indigène.
Lorsque les haines brisèrent l’étreinte, ils firent venir des esclaves étrangers qu’ils ont installés dans les villages et les cités, de manière à ce que ta haine se dirige vers eux .Le feu a été troublé et s’est incliné en gémissant, les fruits sont devenus aigres. Tu dois aller à leur messe, écouter la bonne parole. Lorsque que ta soif de connaissance te poussera à rechercher l’enseignement des anciens, tu sauras de la bouche de leurs valets que les arts et les paroles des anciens, sont interdits, néfastes, qu’il faut respecter les censures qui les stérilisent. La partie formelle de ta culture, ils en font un assemblage creux qui leur permet de cracher sur les os des ancêtres, et qui meuble leurs musées, trophées de leurs conquêtes tes objets cultuels les plus sacrés. Toi tu apprends à être humble, à courber la tête, à respecter leur commerce, et leur titre de propriété sur la terre qui te vient de tes ancêtres. Tu mendieras une place de serviteur, ils te feront plier l’échine, te l’assoupliront, achèteront les femmes de ton sang.
Aujourd’hui ta vie se déroule dans un univers non conforme à la volonté de tes pères, mais prochainement un homme éveillé se dressera parmi vous pour rendre la justice, selon l’esprit des Tahungas inspirés. La société maorie reprendra sa force , le sac placentaire se déchirera et la puissance du Mâna rentrera à nouveau en nous. Ainsi parlait les signes sur les tablettes magiques, les bois parlants pascuans. Ainsi parlait Teagi lorsqu’il écrivit ces derniers mots avant de rendre l’âme et d’appeler à son secours Tiki son ami.
Avec ma main desséchée et bientôt désincarnée, je refais ce dessin symbolique de la lutte commune des peuples soumis, le signe de Hiwa, cette double spirale symbole de Makemake le Démiurge qui apporta la semence de l’homme sur le champ du monde.
Dans l’espace convexe comme une coupole sont piqués les poissons solaires, les cinq planètes au milieu des étoiles dispersées comme du sable. Engloutie dans les abîmes repose notre terre mère détruite. Ce sol où nous naquîmes étrangers à nos pères avec ce masque factice d’une hérédité mensongère est à nous , et aucune inquisition, aucune loi de fer ou scélérate , ne pourra empêcher le rétablissement de nos droit après la résistance et la destitution des donneurs d’ordres Pakehas et Popaa.
La déesse ne fut pas engloutie dors de la destruction des terres. Sa prison se détacha et flotta sur les eaux, un jour elle aborda une grande terre à l’embouchure d’un fleuve. Là le crabe fit une ouverture dans sa prison de soie . Se réveillant elle sortit de sa gangue et s’enquit des malheurs de son époux et frère. Elle rassembla tous les morceaux du premier homme, avec l’aide d’un chien rouge, celui-ci attirait l’attention des chiens de feu de Oro gardant les tombes dispersées. Lorsqu’ils eurent volés les morceaux de chairs sacrée, la déesse les assembla et par son amour et sa magie merveilleuse redonna la vie à Makemake, de lui bien qu’il fut mort à jamais elle eut même un fils. Par cette magie elle fit revivre le premier homme et lui redonna l’immortalité.
Ici se replace une autre version de la légende de Maui
On y fait mention de sa naissance magique. Il est expulsé sous la forme d’un fœtus par sa mère, qui le jette dans le lagon. Un Dieu son ancêtre le sauve et lui donne ses pouvoirs magiques avec la connaissance ultime des initiés. Après quoi il retourne chez ses parents et se fait reconnaître par sa famille. Bien sûr il est laid comparé aux autres enfants du couple, mais c’est lui qui réalisera tous les exploits de la lignée. Il y a eu beaucoup de Maui et chaque Ariki a comme ancêtre un parent de cette lignée qui remonte jusqu’aux Dieux immortels, nés de la nuit par Maui tiki tiki, ou potiki.
De cette lignée naquit Maui l’intrépide. Il n’était pas le fils aîné de son père le roi Ariki de Taputapua Tonga à Hawaïki ( Tonga ou peut être Bora Bora car Hawaïki semble être surtout Raiatea) . Et comme tel il devait obéir à ses frères aînés tous nommés eux aussi Maui avec un sobriquet différent, et surtout il devait respecter et faire ce que le premier né qui devait succéder au roi lui ordonnait. Maui était un enfant agile et rusé, qui observait attentivement les formes de la Nature et écoutait l’enseignement des Tahungas. Il apprit à sculpter et offrit une phalange de son petit doigt pour avoir un conseil du Dieu Hiro. Celui ci lui dit: Déterre le crane de ta grand-ancêtre Morimuti ,et avec un morceau de la mâchoire fabrique une hampe d’hameçon, complète l’ensemble avec une pointe d’haliotis (ormeau fournissant de la nacre) et assemble ton hameçon avec la corde tissée des herbes des cascades. Ensuite, cache cette ligne magique au fond de la pirogue de tes frères et cache toi y aussi. Lorsque que les frères de Maori furent sur leur lieu de pèche Maori sortit de sa cachette et leur demanda la permission de pêcher avec eux, mais aucun ne voulu lui fournir d’appât et ils se moquèrent de lui. Sortant sa ligne de son panier Maui s’écrasa le nez d’un coup de poing et enduisit son hameçon du sang qui coulait. Il lança sa ligne et déroula sa corde. Par la magie de son hameçon celle ci vint se ficher dans une terre sous-marine, lorsqu’il se mit en devoir de haler sa prise, l’embarcation se remplit d’eau et fut attirée vers le fond de la mer, les frères de Maui eurent peur et voulaient couper la corde qui était reliée à l’embarcation. Mais Maui leur dit, n’en faites rien une grande surprise vous attend. Après de nombreuses journées passées à lutter contre le monstrueux poisson qui les remorquait à sa suite un matin celui-ci apparut à la surface des eaux, sous la forme d’une grande terre nouvelle en forme de poisson . Les quatre frères de Maui se mirent à pêcher et une fois leur repas attrapé descendirent à terre pour explorer la terre et faire cuire leur poisson. Maui leur dit « cette terre est mienne c’est le poisson de Maui » .Ses frères l’abandonnèrent donc par dérision sur cette terre et revinrent chez eux, mais ils furent engloutis par une tempête qui brisa leur embarcation. Longtemps après Maui revint dans son île et conduisit son peuple dans l’île montagneuse. C’est dans cette île que Maui mourut. Ao tea roa c’est la grande terre de Nouvelle Zélande constituée de deux îles principales couvertes de volcans, de forêts vierges et de pâturages. Comme animaux gibiers ils n’y trouvèrent que des oiseaux gigantesques, les moas (les poulets étaient aussi appelés moas) aussi grands que des hommes. Il y faisait froid et aucune culture d’ Hawaiki n’y prospéra, ni les taros, ni les cocotiers, ni les arbre à pain, ni les pandanus, seuls devaient s’y acclimater les kumaras des tubercules ramenés à Hawaiki par les explorateurs des terres lointaines de l’est. Ces tubercules n’existent pas en Asie, ils proviennent des Andes péruviennes. Le kawa lui survécut un temps au moins, tout comme le santalier et la canne à sucre. Les bananiers finirent par dégénérer. Les hommes pêchaient et chassaient les mammifères marins, les femmes cultivant les jardins.
Puis vint la description de l’origine des maoris et des Arikis.
Pour raconter cette fable on utilisa alors des mots anciens tellement différents que presque personnes ne comprenait.
Les ancêtres des Arikis habitèrent d’abord une grande terre entre deux grands fleuves. Sans doute l’Inde de l’ouest. Il connaissaient la vannerie, la poterie, tressaient et tissaient des vêtements, taillaient et polissaient la pierre. Ils vivaient de miel, de fruits et surtout de céréales. Ils étaient déjà pêcheurs et navigateurs. Ils vivaient déjà là au voisinage d’une autre race élancée, noire de peau, crépue et poilue.
Ces hommes cultivaient la terre à Uru ou Ourouk, ce pays devint trop étroit pour les deux peuples. Les Maori qui furent rejetés s’enfuirent à Irikia. Ceci se passa lorsque les Dravidiens prirent le contrôle de l’Inde du nord avant l’arrivée massive des Aryens dans le pays des deux fleuves, vers le quatrième millénaire, lors de l’érection des métropoles de l’Indus connues aujourd’hui sous le nom de Cités harappéennes, comme Mohenjo Daro (la ville morte des rives de l’Indus). L’exemple de Mohenjo Daro est significatif du haut degré de culture des Dravidiens ,et des divers peuples qui vivaient avec eux alors dans ces terres propices à la culture des céréales et à l’élevage du zébu. A Irikia qui était une grande île au sud, sans doute Ceylan, les populations non dravidiennes cultivaient une céréale d’eau ,sans doute une variété de riz nommé ari dans la tradition. Cette période heureuse de la tradition se termina par le départ pour l’Indonésie vers le troisième millénaire. Havaïki pourrait aussi être Java, c’est de cette île que partirent des grande migrations vers le Pacifique et vers l’Afrique. Ce serait même la patrie de Maui le demi-dieu. La technique des grandes traversées a permis de conquérir Tonga, puis les îles de la Socièté, Raïatea la sacrée, Tahiti et Hawaï. Lors de ces traversées qui furent souvent des reconnaissances lointaines menées par des petits groupes d’initiés suivies d’expéditions de peuplement, les Maori rencontrèrent les différentes races primitives de l’Australie et de la Nouvelle Guinée. Les primitifs de petite taille avaient été envahis par des peuplades de chasseurs nomades de type Aïnous qui furent aussi les premiers occupants du Japon et de la Micronésie venues des terres arctiques en quelques générations. De cette fusion naquit les différentes ethnies papoues et mélanésiennes. Les Maori se mélangèrent notablement aux gens des pays traversés qui leur fournirent chacun une part de leur culture.
A l’origine plusieurs tribus se mêlèrent pour former le premier peuple des nomades de la mer. Les Arikis et leurs alliés Matangs, les mélanésiens de Hiwa, de Mataina, les hommes de toutes les grandes terres rencontrées qui avaient tous une civilisation millénaire d’arboriculteurs, et qui élevaient des porcs. Bien sûr les Arikis eux prétendaient être les Princes car ils descendaient directement des Dieux et ne se mariaient pas avec des intouchables « mana hune » ou même avec des esclaves travaillant la terre.
Sur l’esplanade du marae de Raïatea face aux hôtels des clans de l’oiseau ,du soleil, des requins, des sectateurs de Oro et de Tangaroa ,dans la nuit étoilée ,au clair de la lune ,deux hommes d’aspect sauvages, tatoués de la tête aux pieds, se parlaient avec des phrases exquises ,l’un récitait la geste des exploits millénaires ,l’autre racontait son expérience unique ,son voyage initiatique, sa rencontre de Tiki ,et tous ces mystères étranges ne dérangeaient pas les Tupapau ; ces esprits vagabonds des anciens qui descendent à la nuit des dômes volcaniques, ces grandes falaises abruptes qui dominent les îles, guettant la forme de chair ou de matière qu’ils pourraient habiter pour redevenir des un temps des êtres, des entités réelles et savourer le suc ardent de la vie et des offrandes offertes aux idoles. Ni les brigades de guerriers chargés de veiller dans les tours de bois, ou autour des enclos ne se souciaient des phrases qui s’envolaient .
Tetangi Mateatea devint l’ami et le confident de Teagi, il lui apprit la lecture des textes anciens, la science des gravures sur bois à l’aide d’une dent de requin emmanchée. Ils formèrent la base d’une société de savants initiés, maîtres d’œuvre des maisons, des navires, des statues et des temples (ahus) qui se souciaient de la réalité du pouvoir. Les Dieux en sont les vrais maîtres, il convient avec l’aide des ancêtres de faire les chose comme ils le décident. Le Roi est le représentant des Dieux sur terre, il dispose du pouvoir ultime le mana.
D’où vient le pouvoir du roi ?
Le mana est l’essence divine par excellence celle que Makemake répartit venant de sa substance divine, lorsque son sacrifice indispensable permit la renaissance du monde dans l’île de Matakiterani :le nombril du monde.
Makemake avait obtenu cette essence de Tangaroa (Takaroa) lui même lorsque ce dernier souffla l’âme primordiale en lui, alors qu’il n’était qu’une forme de terre rouge.
Les Atuas créateurs ont conservé une partie du mana du monde, mais ils répugnent à s’en servir pour modifier le cours des événements que l’homme et toutes les autres formes de vies doivent accomplir. Il y a toujours dans l’île où Makemake s’immola une source qui confère l’immortalité la source de jouvence qui supprime l’emprise de la mort et rend la jeunesse même au vieillard le plus décadi.
Io réalisa la première transgression de l’Univers présent, mais surtout au niveau de la conception spirituelle d’esprits, donc de structures internes de la matière et de la vie qui emplit l’Univers.
Takaroa réalisa la création de Makemake le premier homme, mais il faut comprendre que la terre existait déjà presque sous la forme actuelle. Tane le père des arbres et Tiki le fœtus furent des initiateurs de l’homme aux arts techniques du feu. Maui apporta cette science du feu à sa famille terrestre, il la vola à une géante. Tou et Roko complètent la liste des Fanau po ,nés de la nuit. Tous sont aussi des créateurs qui possèdent chacun un domaine non exclusif puisqu’ils ont une parenté ,ils sont aussi tous les cinq l’expression du principe créateur originel, les cinq éléments primordiaux. A l’origine ils habitaient une vaste caverne. Puis ils passèrent une porte et entrèrent dans le domaine des neufs mondes. En face de ces personnalités considérable se trouvent les esprits des passions humaines où limités à la sphère de l’homme: Hina ,la lune qui est aussi l’épousée de Takaroa, Aii le dieu soleil, Pélé ou Péré le dieu qui habite dans les volcans et dans les hautes terres, Oro le dieu de la guerre. Il y a dans l’histoire de tous ces dieux un message qui fortifie la conscience et explicite la mission de l’Ariki et du Maori dans le vaste champ du monde. Sa patrie véritable est la mer, c’est en devenant un homme d’eau salé, vivant comme une otarie, ou comme un oiseau pécheur du large, ou encore comme un cétacé qu’il peut s’accomplir. Le régime des îles ,et de la guerre et de la famille n’est qu’une affaire de manahune, (ceux qui ne possèdent pas le droit au mana, le peuple ou les descendants abâtardis des Maoris et des Arikis)
Les nobles doivent conquérir l’essentiel, qui est : la transmigration du mana du monde dans leur conscience et dans leur âme, c’est à cette seule condition qu’ils pourront en faire cadeau à leurs successeurs. Pour réaliser cette quête, il n’y a qu’un moyen, la méditation, l’initiation qui nécessite la médiation d’un immortel, la quête aventureuse sur l’océan étant la règle des grands initiés, car les transgressions des Dieux ne se présentent qu’à ceux qui sont allés au plus profond de leurs ressources, près de la mort physique avec des corps intacts pleins de vitalité, mais aussi mis à mal par le jeûne, les éléments déchaînés et la navigation du grand large sans limite, dans la mer sans fond , et surtout aux quatre coins de l’espace, et même dans les grottes les plus sacrées des montagnes les plus difficiles à gravir.
C’est face aux statues de bois sculptées dans les poteaux du grand marae sur les estrades sacrées réservées aux nobles et aux prêtres que Teagi fut initié aux légendes anciennes des maoris et qu’il entra dans la confrérie des hommes oiseaux qui se disent les fils de Makemake. Les prêtres inspirés l’avaient reconnu comme l’un des leurs … Il devint aussi arae po , raconteur de légendes et même conducteur de chants des jeunes guerriers.
Il visita les principales terres du voisinage Bora Bora (porapora), Tahaa et Huahine avec les délégations des principaux Tahungas lors des échanges culturels entre familles, enfants, femmes, fruits de l’arbre à pain, colliers et tapas reçu et donnés par des guerriers en armes sur un îlot désolé ,ou dans une grande prairie dégagée pour exclure autant que possible les difficultés qui ne manquent pas de se produire lorsqu’on conclut une affaire dans une zone qui appartient à des divinités qu’on n’a pas invitées, et qui n’ont pas donné leur accord. Partout se trouvait des bois sacrés tabous que tout le monde devait respecter. Il y avait aussi les demeures des revenants et des esprits des morts qui se trouvaient près des esplanades où les cadavres étaient exposés aux intempéries. Le plus souvent dans une litière située sur des pieux. Lorsque les os avaient blanchis ils étaient alors rangés dans l’ahu familial.
L’autorité du roi de Raiatea s’étendait en partie sur ces îles où se trouvaient sa famille proche, oncles, enfants et alliés par le sang. L’initiation des enfants avait lieu à Raiatea et dans les îlots désertiques, de grandes fêtes collectives marquaient la période du passage au terme adulte et généralement à la constitution de la famille privée du jeune homme.
L’essentiel de l’initiation était contenue dans des actes difficile et douloureux à réaliser, dans une gymnastique du corps et de l’esprit, dans la connaissance des textes sacrés, des légendes et des savoirs techniques à posséder avec perfection aussi bien pour le jeune homme que pour la fille pubère. L’inclination et la nécessité de respecter les classes sociales et les termes d’eugénisme imposés par les Arikis et les Tahungas faisait qu’il était inutile de rechercher longuement sa compagne puisqu’il suffisait de prendre la fille libre qui passait à portée et de l’installer dans sa case. Les femmes passaient d’ailleurs alors le plus souvent d’une case à l’autre au gré de leur humeur ou de leurs inclinaisons tout en observant strictement les différents tabous, comme l’inceste, et le respect des règles de préséance.
Les mariages qui signifiaient des alliances sociales, économiques et politiques étaient respectés comme l’étaient les biens familiaux. La mise à mort de ceux qui trahissaient et volaient suffisait à créer une certaine harmonie que l’Ariki renforçait périodiquement en tenant un conseil public dans lequel les affaires en suspens étaient jugées toujours à l’unanimité. Lorsqu’il y avait débat le plus fort prenait la décision, et le moins fort se trouvait acculé à se battre ou faire retraite piteusement.
Les enfants étaient chez eux partout, caressés et aimés sans réticence. On se les prêtait, on en donnait à qui en manquait, ils étaient les compagnons, les serviteurs des vieillards isolés, la joie de tous. Les grands hommes avaient de grandes femmes qui réunissaient plusieurs princes dans une même alliance, elles avaient aussi le mana et souvent succédaient à leur père, même lorsque celui ci avait par ailleurs plusieurs fils d’origine plus modeste.
Que faisaient les femmes de la noblesse ?
Le rôle des femmes était principalement celui de la communion sexuelle comme partout. Elles s’occupaient des enfants et péchaient dans les ruisseaux et dans le lagon, elles nourrissaient les cochons, les poulets et s’occupaient de la cuisine ordinaire. Elles avaient des secrets qui échappaient aux hommes , comme le tannage des peaux de requin et de mammifères marins. Elles tressaient les corbeilles et les nattes en fibres de pandanus et de coco; elles martelaient sans cesse les écorces de mahute, de uru et de mûrier pour obtenir le tapa des capes et des chapeaux. Elles étaient des possessions bien définies des clans données par des Arikis à d’autres Arikis. Les innombrables concubines qui voisinaient dans les maisons étaient toutes ses servantes plus que ses rivales. En cas de mauvais traitement elle pouvait retourner chez ses parents et ceci déclenchait souvent alors une vendetta. La pratique de l’adoption systématique des enfants faisait qu’il y avait peu de consanguinité. Même si il arrivait souvent que les oncles vivent avec les jeunes filles pubères pour les initier avant de les vendre ou de les troquer à d’autres clans. De toutes façon l’amour physique n’était pas tabou et la jalousie très rare. Un mari officiel obtenait des présents des amants de sa femme. La plus part des enfants mourraient très jeunes, ne survivaient que les plus résistants et les plus chanceux. Les femmes vivaient entre elles le plus souvent sauf la nuit où elles recevaient leur amant du moment. Rare étaient celles même âgées qui n’avaient pas un amant de cœur. Mais il faut reconnaître que le viol existait aussi et que souvent une femme était traîtreusement enlevée par l’homme auquel elle se refusait et enfermée par lui contrainte à vivre comme une esclave. Les prises de guerre devenaient des servantes et des bordels existaient dans toutes les grandes tribus où des femmes qui faisaient métier de chanter et de danser se rassemblaient jusqu’ à ce qu’elles trouvent un amant fortuné. Elles accumulaient les parures et les biens précieux que leur possesseur conservaient jalousement et dont ils étaient très fiers. Une femme qui avait eu de beaux enfants avait plus de valeur qu’une vierge ou qu’une femme très belle dont la fécondité était moindre. Enfin il y avait des romans d’amour pur entre jeunes hommes et jeunes filles et souvent ils devaient s’enfuir de leur pays natal pour fonder leur famille, car le mariage était l’affaire des clans.
Des femmes vient toute la magie de la vie. Elles honorent de leur corps et de leur sexe le Dieu de l’amour.. Tout Ariki de haut rang avait dans sa famille une femme choisie comme incarnation de l’esprit familial. Elle devait chanter et danser pour les hôtes important, et devait aussi rester vierge, ce qui est assez difficile à imaginer. Au bout de quelques années de service elle était destinée à épouser un chef important et ainsi pouvait conforter les alliances claniques. Les autres vahinés, de moindre rang social, de tout temps ont eu des aventures bien avant de se marier avec de nombreux prétendants le plus souvent. Seules les filles issues de familles de haut rang destinées à servir lors des fêtes et cérémonies sont réputées rester vierges tant que leur rôle de prêtresse du clan leur était dévolu.
Les femmes maories étaient pourtant malgré ceci généralement traitées comme quantité négligeable, et devaient respecter une foule de tabous que les hommes ne respectaient pas. Mais elles s’en accommodaient le plus souvent sans mal et dirigeaient en fait leurs amants et leurs maris avec la finesse classique du sexe dit faible. Souvent la femme était prêtée ou vendue sans qu’on lui demande son avis. Elle appartenait au clan de son mari, mais conservait sa dote et le droit de revenir s’installer dans la case familiale ce qu’elle faisait généralement lorsqu’elle mettait au monde son premier enfant. Cet enfant elle ne le quittait jamais pendant de longues années parfois et il dormait le plus souvent à ses côtés jusqu’à ce qu’il entre dans la catégorie des adolescents. Il y avait une case des femmes, et une autre pour les hommes.
La femme maorie était aussi initiée aux sciences magiques.
Hiro le jeune dieu beau comme une femme était leur maître principal. Il éveillait les sorcières à chevaucher le vent et à reconnaître les herbes magiques.
Hiro le voleur, le diable maori.
Elles s’identifiaient aussi à Moana la vaste mer profonde et à Hina la belle au corps souple à la senteur de santal et de de tiare. Dans la légende elles devenaient toutes Uka la femme enfantée par une pousse de bananier et le sang de Makemake par Takaroa. Certains disent que c’est aussi ou plutôt le dénommé Tane qui a construit le premier homme, et ceci en créant une femme et en ayant avec elle une fille, ceci est notamment rapporté comme une tradition de Nouvelle Zélande. Mais ce n’est pas incompatible avec la version pascuane de la genèse. Faut il y voir une autre face du même mythe ? ceci est encore à vérifier. Il n’empêche qu’ici comme chez les Grecs d’Homère les Dieux viennent sur terre pour enfanter avec des femmes locales et leur progéniture est celle des Arikis, les souverains.
Ce que faisaient les groupes de jeunes hommes prédestinés pour acquérir le mana, la puissance magique du cosmos. Ils étaient d’abord informés sur les moyens et les techniques utilisables pour survivre et pour acquérir la connaissance ultime. Ensuite isolés dans des lieux fermés, ou pendant trois ou quatre cycles de lune sur un motu (îlot) isolé, nus et dépourvus de tout outil. Ils devaient devenir pierre, roc, oiseau , pour finalement chevaucher les vents et aller dans l’espace infini du ciel en rêve. Mais ils n’avaient comme ressource que de pêcher, d’attraper les oiseaux, de boire l’eau dans des coquillages et le jus des poissons, de recueillir la pluie, d’attraper des crabes, de boire même de l’eau de mer. Car ils n’avaient aucune eau douce à leur portée, et il pouvait se passer des semaines avant qu’il pleuve .Vivre une telle mission exigeait que l’on soit sûr de son corps, qu’on connaisse tous les trucs des animaux pour récolter la substance vivante dans le milieu océanique et qu’on puisse en tirer assez d’eau pour survivre malgré le soleil accablant dont il fallait se protéger.
Lorsque les effets de la souffrance physique se produisaient, dans le délire qui survenait le postulant voyait s’ouvrir la terre et les cieux, cette partie se nommait le partage et survenait avant la petite mort, période de délire qui permettait à l’âme de s’envoler et de revenir avec force pour habiter la coquille fragile de l’homme ancien. Alors généralement la vie revenait par magie, il pleuvait, une tortue abordait pour pondre ses œufs, la mer déposait des épaves nutritives, l’initié retrouvait ses techniques, son savoir, sa magie, les Dieux même se manifestaient dans le vent, dans la mer, dans les nuages dans le scintillement des étoiles.
De Hiwa l’intemporelle venait alors des chants, des odeurs, des pensées, le mana ,ces forces emplissaient progressivement le cerveau des garçons… Ils devenaient terrifiants échevelés, les yeux hagards, leurs côtes saillaient, leur ventre se creusait. Ils se traînaient lamentables au coucher du soleil sur les grèves, leur odorat se développait jusqu’à reconnaître l’odeur des oiseaux au milieu des embruns. Ils marchaient sans bruit se jetant sauvagement sur tout butin , toute proie qu’ils mâchonnaient ensuite longuement pour en tirer tout le suc .
Puis venait leur délivrance. Ils étaient visités par leurs maîtres qui vérifiaient si ils méritaient de poursuivre l’épreuve. Seuls ceux qui étaient prédestinés par l’horoscope arrivaient généralement à poursuivre l’épreuve jusqu’à l’arrivée du mana. Les Arikis destinés à commander les Clans ne passaient pas ces épreuves. Ils recevaient le mana par transmission directe de leur père qui leur donnait tous ses pouvoirs et abdiquait en fait en leur faveur dés leur entrée dans la vie sortant de la tutelle de leur mère. Le père devenait leur conseiller, et régent. Mais il devait montrer alors une déférence et une soumission à son fils investi de la puissance ultime du mana.
Les princes envoyaient toujours un de leur proche, un jeune toa guerrier, ou un serviteur pour réussir cette épreuve à leur place, car il y avait une compétition entre tous les postulants. Celui qui avait réussi un contact réel avec la divinité et qui avait reçu un indice profond de l’arrivée du mana dans son corps était investi de pouvoirs quasi royaux et considéré comme le dépositaire de la volonté divine pendant une année. Mais bien sûr c’était le maître et non le serviteur qui était ainsi désigné. On lui rasait le crane aussitôt.
Il ne devait plus travailler ni produire, il était consulté comme juge de paix et dirigeant du peuple à l’égal des princes et des prêtres réels. Il était pourtant le plus souvent à peine sorti de l’adolescence sous la coupe de sa famille qui généralement le manœuvrait. Le pouvoir des enfants dieux était assez considérable pour conduire à des exécutions capitales des hommes ou des femmes qui avaient faillis à leurs yeux. Ils étaient rasés assez souvent et ne devaient avoir aucun rapport physique avec quiconque. Leur pied ne devait toucher aucune partie du sol et ils étaient donc constamment portés par leurs serviteurs dans une sorte de brancard. Ils vivaient généralement dans une case située sur ou proche d’ un ahu spécifique, près des demeures des Dieux de passage ou appelés lors des cérémonies dans les effigies de bois, de chiffons ou de pierre dénommées tiki. Ils mangeaient aussi des parties les plus délectables des diverses offrandes destinées aux esprits et bénissaient les malades.
Une fois leur tâche d’un année effectuée ils gardaient à vie des privilèges attachés à leur fonction . Un profond respect religieux les entourait car ils avaient reçu et conservé le mana dans leur corps et leur âme pendant une année pleine. En général ils devenaient prêtre professionnel ou artiste s’ils n’aimaient pas la société des hommes. On les voyait souvent rêver tout haut, parler comme des fous, hanté par leur voyage tout vivant dans le domaine des dieux. Ceux qui avaient côtoyé des esprits et conçu des secrets les livraient rarement, à leur lit de mort ,à ceux qu’ils savaient les plus proches de leur cœur. Leur pensée était souvent belle purifée,inspirée par Makemake. La dernière pensée de Tuukee le maitre de Teagi fut :<<Tout initié commence par privilégier son désir et non le savoir, ensuite l’inverse se produit inévitablement. L’adepte accompli devra prendre un chemin d’équilibre entre ses sentiments et la vérité. Il devra rechercher la vérité sans défaillance même celle qu’il cache au dedans de lui , se purifier c’est avant tout avoir le respect du mana, des tabou et des grandes règles. Ne pas succomber à sa violence, au cafard, respecter la part d’immortel qu’il y a dans chaque créature ,chaque essence de vie, chaque élément matériel du monde, dont la destruction sans objet peut avoir de redoutables conséquences en déchaînant les forces du mal (les Tupapau étant les esprits des morts qui n’ont pas trouvé le chemin pour quitter ce monde « oromatua »).
Teagi lui ayant demandé la vérité sur l’initiation ultime ,le prêtre mourant lui dit: Crois-tu que l’homme puisse connaître ses propres yeux et si il connaissait cette vérité ,crois-tu qu’il pourrait avouer même à celui qu’il aimerait le plus ,seuls les dieux peuvent apporter cette révélation, et l’homme la construire individuellement.
Ainsi parlait Tuuke Maeke l’initiateur de Teagi aux arts magiques.
L’homme ancien que Teagi avait rencontré en Nouvelle Zélande disposait aussi d’une forme de mana, mais d’une qualité bien inférieure. A l’origine des Moriotis furent des maoris qui s’étaient aventurés dans les terres des autres hommes de cette région les Papous et les Mélanésiens qui sont de type négroïde. Ils étaient surtout des chasseurs de moas. Ces hommes parlaient une langue compréhensible pour les maoris, mais ils n’étaient pas aussi intelligents et aussi habiles dans les arts et les techniques. Ils n’avaient ni taro, ni kumara, juste des chiens et des rats. Pour savoir quand l’homme est arrivé dans une île il suffit de rechercher l’arrivée des rats. La destruction systématique de toute une partie de la flore et de la faune peut généralement aussi leur être imputée.
Les hommes les plus anciens sont les moins sensibles et les moins sensitifs. Leurs arts sont rudes et n’ont pas la finesse des sculptures achevées et des chants des peuples qui disposent d’un corps plus spécialisé de prêtres et de savants chargés d’enseigner et de perpétuer les savoirs. L’homme nature ,le prophète , le sage est encore un joueur qui joue avec l’essence du monde mais il doit avoir reçu au préalable le fardeau de la connaissance de toute la chaîne d’hommes qui l’on précédé depuis l’émergence de l’homme d’une lignée d’innommables, qui ne possédaient pas d’âme individuelle et n’avaient pas fait alliance avec les Dieux. L’homme vient de la nuit animale, c’est Dieu qui l’a sorti de la terre rouge d’Iwa. Il l’a créé en lui donnant l’esprit et les mots qui le peuplent.
La pensée est la principale expression du mana .C’est le propre de l’homme retiré du groupe vivant, de la tribu ,c’est par elle que l’initié communique avec la vérité du monde, c’est en connaissant cette vérité qu’il devient plus libre des forces qui l’aspirent vers la condition humaine ordinaire et qu’il s’imprègne de la puissance véritable qui elle vient des Dieux immortels . Par cette force il apprend à résister aux instincts, aux pulsions qui naissent du groupement des hommes échauffés par leurs appétits, leur goût du sexe, de la nourriture chaude et riche, de la guerre et du sang .
A l’époque Raiatea s’appelait Hawaiki nui. Ceci est confirmé par beaucoup de légendes concernant cette île. C’est dans cette île que serait né ensuite la secte des Aréoï qui dominait la vie festive des tribus lors de l’arrivée des Européens dans ces parages. Ce mouvement existait bien avant que la secte ne se consacre à Oro, le Dieu de la guerre maori. Mais il fut changé dans ses buts et dans ses mobiles par cette révolution. Avant ceci c’était plutôt Tangaroa le Dieu de la mer, des rochers, de la terre qui était concerné. Teagi restait en lui même l’homme oiseau celui qui pouvait transgresser et monter dans le ciel pour voir plus loin à l’horizon. Tout comme Maui il pouvait être ainsi un voyant et un grand initié.
A Raiatea Teagi apprit à vivre dans un groupe d’initiés, à parfaire ses connaissances ésotériques. Les autres initiés étaient principalement des sculpteurs et des maître de construction de navires et de maisons. Un grand respect leur était porté. Ils s’intéressaient aux formes sculptées de Marae Renga que Teagi leur dessinait avec un charbon de bois sur des pierres.
Hiro le dieu androgyne ,d’une beauté merveilleuse qui possédait les deux pouvoirs :mâle et femelle était représenté par un monolite sculpté de vulves et de seins. Il se trouvait sur une estrade de bois devant l’esplanade des danses et des chants, il était rare qu’il n’y ait pas une manifestation collective qui s’y déroulait ,ou qui s’y préparait souvent plusieurs jours à l’avance . Souvent les danses n’avaient d’autre but que de préparer aux plaisirs sexuels après les occupations grises du jour. L’ambiance devenait alors rapidement électrique ,les tambours (toolere) et les flûtes doubles (vivo) se faisaient obsédants, le désir emplissait les corps et transparaissait dans le ton des voix graves et aiguës des hommes et des femmes au milieu des ballets rituels. Alors le privilège de la séduction par la beauté opérait, la femme et l’homme paradaient , ondulant du corps ,les gestes se faisaient doux et toute ces sensations s’incrustaient dans le cœur de Teagi lorsqu’il était repris dans les filets de la tendresse et de l’amour . Les fours collectifs des familles étaient creusés près de la limite des grèves et les agapes se prolongeaient longtemps dans nuit. Ensuite chaque clan ,ou groupe d’hommes et de femmes regagnait les grandes cases communes pour pratiquer leur étreintes sexuelles, et souvent l’homme retournait coucher dans la case de sa mère où il jouissait d’une tranquillité supérieure, n’ayant pas à subir les assauts discourtois des autres membre de la famille surtout s’il participait à la mise en valeur du domaine de sa famille ou à une expédition de pèche .Il apporterait des présents pour dédommager la famille de sa compagne, et s’il était suffisamment riche, il pourrait prendre cette femme chez lui et lui assigner de s’y tenir désormais comme chez elle c’est à dire de prendre en charge toutes les tâches et tous les devoirs qui lui revenaient. Cet enlèvement était généralement très mal pris par les clans qui perdaient une main d’œuvre et la possibilité d’agrandir la famille par les enfants qui naitraient de cette femme. Aussi devait on des compensations en biens équitables, ou devait on pratiquer l’échange de femmes pour qu’il ne se déclenche aucune vendetta interminable qui terminaient souvent dans le sang. Le roi chargeait ses conseillers de régler ces litiges en commandant les paiements et les échéances et en surveillant l’exécution des contrats qui devenaient des affaires juteuses pour ceux qui avaient beaucoup de filles avenantes à placer et qui se trouvaient de plus en plus riches. Naturellement les Ariki ne pouvaient épouser que des filles de chefs et devaient même limiter leurs faveurs aux autres femmes sous peine de perdre leur pouvoir réel par la jalousie qui en naissait immanquablement. L’amour est incomparable et nait où bon lui semble.
Aussi se trouvait il un certain nombre d’enfants du roi qui étaient nés de femmes de basse classe et qui formaient une classe moyenne souvent attirée par les fonctions de guerre et de prêtres. Ces bâtards étaient considérés plus que leur famille et parvenaient quelquefois à se faire accepter comme serviteur dans le clan de leur père. Ils devaient préalablement s’illustrer à la guerre et acquérir au moins un serviteur qui puisse parler en leur nom. Car aucun Ariki n’aurait failli à intervenir dans les palabres de son propre chef. Il déléguait cette tâche à son serviteur. La noblesse avait une grande occupation qui était le conseil .Tous les problèmes y étaient débattus et toutes les décisions y étaient prises. Hors ce conseil privé concernant les différents hommes et chefs des clans ,le roi pratiquait assidument la pêche et visitait ses propriétés. Il assistait aux fêtes, recevait les visiteurs de marque et concluait les traités défensifs avec ses voisins.
Dans cette société le divorce était une chose toute naturelle. Mais quelquefois il se traduisait par une sanglante vendetta lorsqu’il y avait blessure d’amour propre et qu’il n’était pas possible de se satisfaire du paiement d’une amende. La femme qui trompait sciemment son mari à son insu, l’homme de basse classe qui s’approchait d’une fille de haute naissance convoitée par un noble, ou soumise à la prêtrise pouvaient être mis à mort s’ils restaient sur place. Ils fuyaient donc dans la brousse ou dans une île lointaine où bien souvent le premier acte des familles était de séparer ce couple dans deux clans différents. Lorsque les deux conjoints étaient lassés l’un de l’autre ou avaient trouvé un autre attachement, la femme regagnait sa famille ; les contrats disparaissaient, mais ses enfants restaient propriété de la famille où ils étaient nés. Il y avait des règles différentes pour les arikis et le mana hune, les nobles recevaient les épouses comme des dons et avaient droit à des résidences dans les maisons du roi, le droit d’ainesse était souvent généralisé, mais lorsqu’il y avait la possibilité de répartir équitablement le domaine chaque fils recevait sa partie, et le titre de roi donné au plus jeune fils du roi ou même à sa fille, selon les volontés du père ou celle des prêtres principaux.
Les hommes conduits à habiter avec la famille de leur épouse étaient souvent considérés comme des serviteurs même s’ils étaient des chefs de guerre. Ils pouvaient si ils étaient exceptionnellement doués et qu’ils apportent la victoire ,ou une nouvelle terre devenir prince ,mais le fait était exceptionnel. Les terres de la famille étaient inaliénable, souvent conquises de haute lutte, elles étaient surveillées avec attention ,malheur à celui qui se serait permis de s’y installer sans permission. La vie des maoris était donc soumise à des interdits nombreux provenant du droit de propriété exclusif des clans sur un territoire. L’honneur exigeait qu’on ne lèse ni physiquement ,ni moralement, ni religieusement ces droits… Le roi avait le privilège d’annexer toute terre et tout objet qu’il touchait, aussi était il porté lorsqu’il voyageait hors de ses terres et sa visite n’était elle pas toujours très bien vue lorsque par suite de maladies , de morts à la guerre ,de tempête et de sécheresse la pénurie s’installait. Les familles alliées se devaient alors secours et souvent les femmes du clan revenaient s’installer chez elles pour obliger leur famille adoptive à apporter une aide à leurs parents. Lorsque la cellule clanique n’était plus à même de survivre elle était adoptée par une autre famille qui s’appropriait tous ses biens.
De ces règles découle l’organisation générale de la société des maoris de Raiatea et des autres îles, ces règles se modifiaient quelque fois violemment lorsqu’un nouveau pouvoir spirituel et religieux s’installait venant de terre où de nouvelles coutumes avaient été expérimentées en relation avec l’osmose des populations mélanésiennes en particulier ,où la forme de gouvernement était plus démocratique mais où les vieillards accaparaient tous les biens et les femmes disponibles . Ces groupes obligeaient le roi lors de leur arrivée à partager son royaume avec eux . Dans le cas contraire ils lui faisaient la guerre, l’hospitalité qui leur était offerte était donc souvent temporaire, lorsque le groupe étranger devenait trop puissant ou menaçant il devait partir aussitôt, non sans laisser sur place ,tout ce qui pouvait avoir de la valeur ,quelquefois c’était au groupe hôte de s’exiler devant les menaces précises du clan qu’il avait laissé s’installer sur son territoire .
Passage de Hotu Matua à Tahiti.
Un homme venant de Tahiti lui apprit que son père était passé à Tahiti une année environ avant son arrivée et qu’il avait retrouvé la trace de Oroï son demi frère ennemi qui vivait alors dans une tribu de cette région. Une guerre avait eu lieu et Oroï s’était enfuit avec les rescapés de ses troupes vers les atolls des Tuamotu, semant la désolation sur leur passage, le parti d’Hotu Matua les poursuivit jusqu’à la limite des terres connues . Lorsque Teagi arriva à Raiatea ,Hotu Matua était reparti vers cette terre mystérieuse que ses envoyés avaient appelés le nombril du monde .
Arrivée de Hotu Matua à Matakiterani .
C’est dans cet île que devait finir le périple d’Hotu Matua. Lorsqu’il aborda à la côte un enfant mâle naquit dans la pirogue du roi; et un autre dans la pirogue de la Reine. Cette coïncidence fut jugée de bon augure par les Tahungas Ira et Waikemata pu (kenaora) La plage qui fut abordée devint la résidence du Roi.
Etablissement à Ranga nui. La fin d’Oroï.
Oroï vivait lui aussi sur cette île, il était malade et avait perdu ses pouvoirs magiques, il vécu dans une caverne pendant quelque temps, puis il se mit à piller les établissements du peuple d’Hotu Matua, lorsqu’il se vit rejoint par son frère ,il comprit qu’il devait désormais accepter son destin. Les pirogues avaient été tirées sur la plage d’Akaena renversées et elles servaient d’habitations provisoires.
Les arbres disponibles permirent de construire quelques cases, le sol fut défriché, les taros, les ignames ,tous les arbres fruitiers furent plantés, ainsi que les bananiers et les patates douces les kumaras. Bientôt il fallut se rendre à l’évidence, les cocotiers ne poussaient pas sur cette terre, pas plus que les urus (arbre à pain) , les survivants étaient faibles et débiles, l’île manquait d’eau aussi pendant des périodes importantes, un vent violent la traversait régulièrement, desséchant toutes les plantations. Il fallait rechercher les cuvettes dans lesquelles se trouvait des réserves d’eau et d’humus et protéger les plantations par des murs de pierres sèches. Jamais cette terre ne serait un jardin luxuriant. Les arbres locaux se composaient de peu d’espèces. Un grand palmier produisant des petites noix de deux centimètres de diamètre, son tronc était plus large au milieu qu’à chacune de ses extrémités. Les rats polynésiens (kiore) venus avec cette migration qui s’étaient évadés des cages et multipliés détruisaient ces graines ce qui empêcha sa régénération naturelle. Personne ne s’en ému, et personne ne fit des plantations pour remplacer les arbres coupés pour les différents usages, la construction des cases, les pirogues, et surtout les activités liées aux transport des statues. Il y avait partout de petits arbustes les toromiro. Divers arbres disparurent par les défrichements anarchiques. Les tabous ne furent pas imposés ce qui les aurait protégés.
Au contraire la mer était riche, mais il fallait toujours plus de pirogues pour aller pêcher sur les bancs de poissons pélagiques, surtout de bonites au large. Et ceci détruisit très vite les grand arbres. Les jeunes arbres peu nombreux furent détruits par les feux fréquents qui se répandirent au fur et à mesure de l’occupation.
Les charpentiers apprirent à le débiter en planches et à le fixer sur des montants de diverse origine, utilisant même pour ceci les os des cachalots échoués sur les côtes.
Certains construisirent alors des pirogues avec les peaux des otaries qui abondaient alors. Mais les otaries furent massacrées et les survivantes ne revinrent plus.
La mort d’Oroï.
Le frère du roi vivait dans des cavernes situées au nord de l’île. Il vivait de pèche et de chasse, de vols effectués de nuit dans les plantations. Un jeune homme l’aperçut et le reconnut. Il en avertit le roi qui se mit en route pour le traquer et le tuer. Les hommes de la troupe du roi pénétrèrent dans la caverne mais celui ci put s’enfuir en plongeant dans l’océan et en rejoignant une grotte secrète dont l’orifice était situé sous le niveau de la mer. Toutefois il était grièvement blessé et désormais incapable de se déplacer. Il guérit mais très diminué il n’avait plus de provisions et ses forces lui manquaient ; alors il finit par sortir de sa cachette. Les gens qui le virent le prirent pour un revenant et s’enfuirent épouvantés. Mais un homme le tua une nuit qu’il s’était introduit dans son champ pour voler de la nourriture, en lui lançant une pierre qui lui fracassa le crâne. Il courut pour prévenir le roi, mais le cadavre avait disparu lorsqu’ils revinrent.
L’arrivée de Teagi.
Lorsque Teagi arriva dans l’ïle ou vivait son père il fut accueilli par toute la population de l’île qui se massait sur la plage. Depuis leur arrivée, il y avait presque quatre ans, aucun navire n’avait abordé et voici qu’une embarcation provenait du pays des ancêtres. Personne ne le reconnut tout d’abord. Puis il se mit à parler à tous les anciens en leur donnant leur nom et en demandant des nouvelles de personnes de leur famille. Alors on lui demanda qui il était et lorsqu’enfin il fut reconnu on le conduisit devant le roi. Celui ci en le voyant entrer le reconnu aussitôt et se mit debout pour aller vers lui mais son cœur se brisa et il resta immobile les larmes aux yeux à le contempler. Sa mère aussi se tenait là sans pouvoir parler. Ils finirent par se serrer dans les bras et s’embrasser en se disant leur joie. Sa mère dit : « je peux mourir car j’ai revu mon fils Teagi vivant ». Le roi le prit prés de lui et en fit son principal conseiller. Toute la terre avait déjà été distribuée entre les enfants nés sur cette terre. Teagi s’occupa des plantations du roi et de son plus jeune frère. Il fut bientôt le principal prêtre de toute la communauté, le créateur du culte de l’homme oiseau. Il devait demeurer dans cette île tant que son père vivrait.
Testament et mort de Hotu Matua.
Vingt ans après l’arrivée du peuple d’Hotu Matua, ,toutes les terres cultivables étaient occupées et la population s’était multipliée. Car il n’y avait plus de maladies dans cette île et la nourriture y était alors fort abondante.
Les seules causes de mort violente étaient les tempêtes pour les hommes en mer, et quelques conflits entre les hommes pour la possession des terres et l’amour des femmes. Lorsque ce temp eut passé Hotu Matua transmit le pouvoir à son fils Tuuke Maeke, le plus jeune, celui qui était né lors de l’accostage, il partagea l’île entre ses quatre autres garçons, et oublia complètement Teagi. Celui-ci vint alors le trouver et lui demanda la raison de cet oubli.
Hotu Matua lui dit alors: « A toi mon fils est destiné un territoire immense situé au delà de la mer qui s’étend au soleil levant. Tu me fus ravi par Tane lors de notre départ d’Hiwa, tu as survécu et tu as rencontré Tiki, ta mission d’homme est de partir dès les jours de ma mort et de voyager jusqu’à ta mort. Jamais tu ne pourras goûter plus d’une année le fruit des arbres que tu auras plantés.
Mais ceci n’est pas une malédiction ,au contraire tu es marqué du sceau des descendants de Maui le demi dieu, qui était ton ancêtre.»
Dés que son père mourut, Teagi participa à ses funérailles. Dix coqs noirs aux longues plumes aux reflets verts furent liés à ses doigts de pieds. Revêtu de ses plus beaux habits il fut porté sur les falaises depuis Hanga Roa tout le peuple s’assembla autour de son cadavre.
Alors Teagi saisit une jeune frégate apprivoisée et attacha un rouleau de tapa à sa patte, sur lequel il était écrit :Hotu Matua est mort, ses os restent ici, son esprit retourne vers Hiwa.
Et il lança l’oiseau de la falaise, en disant « Retourne à Hiwa ! »
L’oiseau fit sept tours autour du peuple assemblé, il monta très haut jusqu’à ne plus être qu’un point minuscule, puis brusquement il prit la direction de l’ouest à tire d’ailes et disparut en un instant.
Tout le peuple hurla sa joie. Les poulets furent sacrifiés et le cadavre du roi fut porté sur la plate forme de son Ahu ou il fut exposé en plein soleil. Pour que les forces qui résidaient en lui et qui venaient du soleil, ne soient pas détruites mais se régénèrent dans les corps des hommes et des femmes, dans l’esprit de son peuple. Les prêtres vinrent enduire sa momie de matières odorantes et préservatrices. Une fumée continuelle était entretenue pour éloigner tous les insectes et déposer la fumée sur le catafalque.
Le Mana du roi était tel qu’une lumière verte semblait luire la nuit de son cadavre. Personne en dehors des prêtres n’approchait de cette place sacrée et taboue, jusqu’à ce qu’il fut réduit à l’état de squelette. Longtemps après ; les Tahungas vinrent en procession chercher sa momie pour procéder à l’enfouissement dans l’Ahu royal à Hanga Roa où il se trouve toujours selon la légende.
Après la mort du roi son fils Teagi quitta définitivement l’île de Pâques.
Et Teagi prit la route de l’est avec un seul serviteur. Son navire qu’il avait construit jadis lors de son naufrage et qu’il avait conservé avec beaucoup de soins pendant tout ce temps leur servit d’embarcation.
Il monta dans sa pirogue à la tombée d’une nuit de pleine lune et la dirigea vers l’Est. Avec lui il emportait les outils et les armes. Il avait plusieurs outres d’eau douce. Il partit dans une saison ou les averses étaient fréquentes et il avait des peaux pour recueillir l’eau de pluie. Sa pèche lui permit de se nourrir jusqu’aux côtes de l’Amérique. Ayant abordé un îlot désert, puis le continent qui était un vaste désert, il remonta vers le nord en suivant la côte. Il visita beaucoup de grandes tribus et nations établies dans les vallées des fleuves descendant des cordillères qui en faisaient des oasis dans le désert. Des années plus tard il accosta dans le golfe de Californie. Là il fut ensuite pris dans une tempête et rejeté à la côte. Sauvé par les indigènes, il devint leur prince et il leur apprit à vivre selon des lois morales en reniant la brutalité. Il fut un grand prince et l’histoire en garde le souvenir mais c’est une autre histoire.
Des années plus tard il fut chassé par un ennemi diabolique de cette terre qui était devenue sienne. S’étant fait construire une flotte, il se dirigea vers le soleil couchant vers les îles situées au large. Il y laissa finalement tous ses compagnons et après s’être fait construire une pirogue semblable à celle de sa jeunesse il se dirigea vers Hiva. Il n’y parvint jamais sa pirogue fit naufrage il put aborder après avoir dérivé longuement dans l’atoll actuellement appelé Clipperton. Il y vécut longtemps dans un abri construit de ses mains. Lorsqu’il sentit que le mana l’abandonnait lui aussi il avait plus de quatre-vingts ans, s’il possédait toujours un corps agile et souple qu’aucune maladie n’avait jamais altéré, son temps était venu, il vit l’esprit des morts s’approcher de son corps dans ses rêves. Alors il se souvint de la promesse de Tiki et il souhaita revoir son ami. « Lorsque tu voudras quitter cette terre appelle moi et je viendrai te chercher » lui avait dit Tiki. Il pria et appela sans relâche son ami. Puis un jour, il tomba gravement malade après avoir mangé un kaveu toxique et son esprit s’envola dans l’océan sans limite jusqu’à la demeure de son ami. Il le vit dans sa machine et lui parla par l’entremise d’un albatros qui se trouvait là. Alors Tiki lui répondit qu’il viendrait le chercher. Il suffirait qu’il brise la pierre noire qu’il lui avait donnée autrefois comme gage de son amitié.
Il se réveilla et sortit la pierre de sa cachette. Lorsqu’il eut brisé cette pierre, il s’évanouit. Quelque temps plus tard un œuf brillant descendit du ciel, Tiki en sortit et prenant son ami mourant dans ses bras le porta dans son véhicule. Là il le conserva longtemps en vie et le fit boire à nouveau du breuvage d’immortalité. Il repose depuis dans le volcan où il a rencontré son ami, lieu où habite Tiki depuis toujours. Tiki qui est un visiteur venu de l’espace infini vivant parmi nous, ainsi que parmi tous les êtres terrestres depuis des siècles. Teagi est donc dans une sorte de paradis, il y vit comme serviteur de celui qu’il considère comme un Dieu, qui est son ami. Il soigne les êtres vivants qui sont dans le vaisseau de cet être venu d’une autre galaxie, qui ressemble à un homme et qui n’est pas un homme, mais un être immortel. Un jour Tiki repartira vers le lieu de son origine, pour y retrouver ses semblables. Il emportera avec lui tous les échantillons récoltés sur la terre. Le corps mortel de Téagi sera emporté dans cette lointaine planète.
SEPTIEME CHAPITRE
De l’initiation des chefs.
Les Arikis (nobles fils de chefs) étaient aussi destinés à prendre la parole lors des cérémonies et dans le cas de guerres d'honneur politiques ou religieuses. Les jeunes nobles étaient entrainés par leurs maîtres "rongorongo" aux éléments essentiels de la communication verbale. Pour réaliser la grande communication, ils leur fallait savoir par cœur les chants et les hymnes, qui comportaient tant de passages poétiques faciles à déclamer. Ils devaient apprendre les mythologies et les généalogies des dieux (Atua nui) créateurs et des Dieux issus de la nuit (Atua fare po) ; ceux qui descendent de Taharoa le Créateur du monde terrestre; ils devaient aussi apprendre à saisir la parole magique celle qui est au fond d’eux , sensible au souffle du vent et des esprits qui veillent, une fois dans leur conscience il leur fallait mâcher longuement la formulation pour l’intégrer, la posséder et ne plus la lâcher.
L'éloquence était une vertu première d'un grand chef, elle imposait silence. Le roi choisissait le plus souvent un bon orateur qui avait toute sa confiance, soit un cousin, soit un oncle, soit un prêtre, soit un ami très proche pour prendre la parole en son nom pendant les assemblées. Un Roi se doit d’avoir un porte-parole.
De cette manière, il ne risquait pas d'être désavoué publiquement par un opposant et conservait son prestige lors des joutes oratoires. L’orateur royal devait donc connaître le point de vue du souverain et défendre cette option avec grâce et intelligence. S’il manquait du souffle qui porte l’orateur à faire partager son point de vue et sa magie son destin s’effondrait et il devenait alors le plus souvent un renonçant, qui se rasait la tête et se retirait dans un ermitage. La parole du roi portait la vie, la mort, elle prononçait les sentences et décrétait les tabous (mot provenant du maori tapu), les interdits temporaires ou définitifs, la parole du roi Ariki était sacrée, elle lui était transmise par les Dieux et prise en compte par eux comme si elle provenait d’eux.
Lorsqu'il fallait prendre la parole, le corps et l'esprit devaient participer comme lors des danses pour permettre d'influencer les auditeurs. Le discours devait être précis documenté et reposer sur les vérités généralement admises par la majorité des auditeurs. Toutes les idées devaient être préalablement préparées et confrontées avec les amis et les proches qui pourraient en cas de contestation venir au secours de l'orateur en approuvant et en faisant pression sur les éventuels contradicteurs. Toutes ces manœuvres étaient connues et respectées par tous.
L'orateur se levait ou s'asseyait en hauteur sur une estrade. Il devait parler puissamment pour que chacun l'entende bien et captiver son auditoire en le faisant participer à sa quête de la vérité et en interpellant les principaux chefs présents pour qu'ils se sentent honorés. Le discours devait contenir pour l'essentiel des faits et des idées sur lesquels tout le monde est d'accord . Mais il devait aussi conduire à une décision collective, à une action précise. Les bons orateurs jouissaient d'une grande considération et étaient généralement les confidents et amis des chefs qui les protégeaient.
L'apprentissage de la diction se faisait collectivement sur les Ahus. Un Tahunga (initié de la classe des prêtres) prononçait un discours, puis tous les jeunes hommes devaient successivement reprendre ce discours en le mimant devant l'assemblée des élèves. Celui qui gagnait cette épreuve régulièrement devenait généralement puissant, recherché comme chef religieux ou comme chef de guerre. Car il savait gagner la confiance d'une foule d'hommes et les entraîner dans les actions collectives. Ils étaient régulièrement élus pour réaliser la justice entre les clans et recevaient les attributs du pouvoir exécutif, la couronne de plumes de coq, la courte massue d'ivoire de cachalot, la grande cape de fibres tissées, ornée de plumes rouges.
Lorsqu'il y avait compétition pour l'octroi de cette charge, il pouvait y avoir chaque année une cérémonie comme celle qui présidait à l'intronisation de l'homme oiseau, cérémonie qui se déroulait à Matakiterani (un nom de l’île de Pâques); ou l’homme oiseau était l’ incarnation de Makemake (le premier homme de la mythologie maorie) pendant une année entière et disposant de ce fait de tous les pouvoirs politiques pendant cette période.
Comment se passait le choix et l’intronisation de l’homme oiseau ? (tangata manu)
Les initiés déléguaient alors des serviteurs ou des disciples pour aller observer les oiseaux de mer dans quelque falaise abrupte, ou sur un îlot désolé comme à l'île de Pâques. Le premier œuf pondu par les oiseaux généralement les sternes était le symbole du choix du Dieu. Celui qui s'en emparait récoltait ainsi le mana pour son maître qui devenait l'homme oiseau, c'est-à-dire l'incarnation de Make-make, et par conséquence celui qui dirigeait spirituellement la tribu. Même le roi devait tenir compte de toutes les décisions et des ordres venant de Makemake qui habitait le corps de l'homme oiseau. La migration saisonnière des sternes était généralement le prélude à cet acte magique. Lorsqu'un nouvel homme oiseau était choisi par la méthode habituelle l'ancien homme oiseau perdait ses pouvoirs, mais gardait toutefois un grand prestige car il avait été sanctifié, visité par la divinité. Lorsqu'il finissait par mourir il était étendu sur l'Ahu qui leur était réservé, et dix coqs étaient liés à ses mains et à ses pieds. Lorsque l'âme du mort s'élevait les coqs étaient sacrifiés.
Maui était capable de se transformer en oiseau, ce qu’il fit pour suivre sa mère dans la résidence de son père aux enfers (le lieu de la nuit d’où surgit notre monde). Entre Make Make et Maui il y a une grande analogie, le fils de Tangaroa Make Make (il le construisit avec de la boue) eut une fin tragique qui est rapportée dans les mythes. Il se serait énucléé pour rétablir le mana sur la création terrestre. Maui mourut lui-même en recherchant la vie éternelle pour lui, et pour les humains en général. Il entra dans la déesse de la nuit et de la mort qui en gardait le secret, en pénétrant dans son vagin, ou dans sa bouche dit on parfois, mais lorsqu’il allait en sortir avec le secret de la vie éternelle, un oiseau moqueur, sans doute un martin pêcheur se mit à rire, ce qui éveilla la déesse qui sentant Maui dans sa bouche ou son vagin le mordit et le coupa en deux ce qui conduisit à sa mort. Ses frères seuls survécurent dit on après cette tragédie. Il faut savoir que Maui c’est toute une famille, un clan, et qu’il y a beaucoup de Maui. Le plus connu le seul demi dieu est celui dont la mère avorta et qui le jeta dans le lagon, où il fut recueilli par un dieu marin qui le ramena à la vie et lui transmit tous ses pouvoirs. On le nomme souvent Maui tikitiki pour cette raison.
Les ancêtres avaient laissé des traditions qui parlaient de l'alliance conclue entre les oiseaux et un peuple de Haiwaiki originel, la grande terre de l'ouest où poussait le riz sauvage (arii) Le coq avait été donné par les fils du soleil aux frères de Maui. Ils avaient institué les sacrifices et les premières tablettes parlantes contenant des textes sacrés inscrits d’abord sur des tapas. Les frères de Maui furent aussi par nécessité les premiers hommes oiseaux, alors que le héros Maui fut surtout le découvreur de nouvelles terres. Une de ces îles était celle où Makemake le créateur de la lignée humaine actuelle avait fait le sacrifice de son existence pour que toutes les formes de vie puissent renaître de l'arbre de l'origine. Dans cette île se trouvait la source de toute jouvence, l'élixir de vie, là vivait la sorcière que le premier homme oiseau dut vaincre.
Variante du mythe de make-make et de tiki (le fœtus)
Le Dieu Oro avait surpris Hina la première femme, la jumelle, la compagne de Makemake, créée par Tangaroa avec une pousse de bananier et le sang du premier homme. Il l'avait possédée par force après l'avoir énivré avec le kawa et les sucs des plantes magiques. De cette union naquit un avorton rougeâtre comme son père, beau comme sa mère, aventureux et fantasque. On lui attribua le nom de Tiki, et il serait lui aussi le premier humain véritable. Sa mère le voyant ainsi le rejeta tout ensanglanté dans le lagon, après que la poche des eaux se fut rompue, ceci se passa lorsqu' Oro ivre de drogue se retira dans son volcan en éruption pour se reposer d'avoir donné la vie pour que s'organise la destruction dans l'espace du monde.
Mais Tiki fit alliance avec les oiseaux et ensuite avec Maui qui lui aussi était appelé tikitiki. Il promit de protéger à jamais la famille de ce dernier et de lui donner en partage l'ensemble des îles du vaste océan, ainsi que la grande terre de Ao-tea-roa.
Le clan de l'oiseau avait dans ces temps très ancien comme symbole non le coq, qui n'est qu'un animal domestique, juste apte à fournir ses œufs et sa viande, mais la grande frégate, oiseau prédateur vivant au contact des colonies de fous, de macareux, de paille en queue, auxquels ils dispute leurs proies, tournoyant autour du pêcheur heureux jusqu'à ce que ce dernier laisse tomber sa proie aussitôt attrapée par ce brigand professionnel. Les pêcheurs avaient jadis capturé ces oiseaux au nid, les avaient dressés et s'en servaient pour repérer les bancs de poissons et échanger des messages avec les îles lointaines, comme en occident nous nous servions des pigeons voyageurs. La grande familiarité de ces oiseaux avec les hommes faisait que l'oiseau lâché par son maître en pleine mer revenait vers son domicile où il savait qu’il serait nourri, il portait des messages à son maître et s'élevant à quatre ou cinq mille mètres pouvait découvrir toutes les terres lointaines au-delà de l’horizon lors des expéditions lointaines. Les hommes oiseaux voyageaient donc avec leurs frégates apprivoisées et s'en servaient pour découvrir les nouvelles terres dans le vaste océan et envoyer des messages magiques aux dieux et surtout à Tiki le fils de Makemake, le dieu mystérieux.
Cet oiseau était très rare à Ao tea roa et à Hiwa car il avait été décimé par les Mélanésiens et les autres Aborigènes qui les mangeaient. Les Maoris devaient abandonner leur alliance avec ce superbe animal pour rechercher celle des cormorans et ashingas qui pèchent en plongée et qu'il suffit de tenir en laisse pour récolter de nombreux poissons. Mais ces nouveaux venus ne compensaient pas toute la joie et toute la magie apportée par l'élevage et l'usage des frégates comme messager et animaux domestiques. Toutes les confréries d'hommes oiseaux devaient apprendre à élever les oiseaux à les protéger et ne devaient sous aucun prétexte détruire un de leur animal fétiche. Les frégates volaient haut au dessus des cases des initiés. Lorsque se faisaient entendre les sons annonçant la distribution de poissons elles venaient voleter à l'entour des hommes qui leur jetaient des petits poissons qu'elles attrapaient en vol. Puis elles allaient se percher dans leurs cabanes toutes sculptées, établies sur de hauts pieux devant les cases des initiés. C'est dans ces cabanes que les jeunes étaient élevés jusqu'à ce qu'ils deviennent assez grand pour suivre leur futur maître qui devrait les nourrir, s'en faire reconnaître et les utiliser lors de ses parties de pêche ou ses excursions lointaines. Les frégates les plus belles et les plus rapides étaient très chères à acquérir. Elles étaient bien plus grandes que les oiseaux sauvages, plus agressives, elles avaient conservé la capacité de parasiter les fous et de pécher les poissons volants lorsqu'ils s'élèvent comme des éclairs argentés du sein des vagues souples poursuivis par les dorades et les bonites.
La pariade et la reproduction donnait lieu à des spectacles de toute beauté, les mâles gonflant leur gorge d'un rouge vif pour attirer les femelles convoitées. Un fois le jeune emplumé il fallait l'habituer à la présence de l'homme. Il était sorti du nid et devenait l'unique objet d'attention de son maître qui l'apprivoisait en le nourrissant de petits poissons. Les jeunes frégates venaient se percher familièrement sur l'épaule, ou le bras de leurs maître.
Leur présence explique seule pourquoi les initiés découvraient les îles basses et les lagons situés très loin sans jamais se tromper et passer à côté. Les frégates volent jusqu’à quatre à cinq mille mètres de hauteur en quelques minutes portés par les vents. A cette hauteur au lever du soleil ou à son coucher on peut apercevoir les terres les plus éloignées à des centaines de kilomètres . Pour atteindre ces hauteurs les oiseaux se placent sous les nuages isolés, ou prennent appui sur les tourbillons cycloniques qui naissent parfois au milieu de l’océan. La frégate peut alors repérer le matin et le soir des terres situées à des centaines de kilomètres. Si elle estime qu’il y a là-bas des oiseaux qu’elle peut parasiter elle s’y précipite en ligne droite, il ne reste plus aux marins qu’à suivre la direction prise. La frégate revient d’ailleurs quelques heures ou quelques jours plus tard à l’esquif dont elle est partie, le plus souvent avec le jabot bien rempli. Surtout si elle a un jeune à nourrir. Ainsi en est-il des découvertes des îles lointaines qui ne sont jamais dues au hasard mais sont consécutives à des observations sérieuses. Les frégates sont les plus sûrs messagers car elles ne peuvent pas se reposer sur l’eau, leur plumage est perméable, elles n’ont pas la possibilité de se nourrir dans l’océan en plongeant non plus. Les sternes sont capables de vivre en haute mer pouvant se reposer en flottant sur les vagues. Comme les fous et les albatros, comme les labres.
Il y a des milliers d’années que les frégates sont apparues et qu’elles sont présentes dans toutes les îles du Pacifique. Bien avant que l’homme n’arrive dans ces parages. Les navigateurs utilisaient aussi et concurremment les tortues marines et les requins pour découvrir les îles lointaines. Certaines tortues viennent d’Hiwa la terre ancienne des Arikis, la classe noble, qui descend des Atuas lorsqu’ils sont venu partager la vie des humains, comme Oro, Makemake, Tiki et tant d’autres. Elles se sont ensuite dispersées au fil des générations de tortues dans tout l’océan, allant jusqu’à coloniser les îles basses ou elles déposent généralement leurs œufs, qui devient de ce fait le lieu de naissance de leur espèce. Suivre une tortue dans la vaste mer est une tâche très incertaine et très compliquée. Suivre un requin aussi. Les maoris pensaient pouvoir entrer en communication avec les tortues et les requins qu’ils avaient côtoyés dans leurs pérégrinations ou qu’ils avaient emprisonnés dans des viviers quelque temps. Il est certain que ces animaux se dirigent périodiquement vers les zones qui les ont vu naître, pour se reproduire ou pour y trouver une compagnie qui leur convienne. Et généralement ils tracent leur route en ligne droite alors. Les tortues mâles ne reviennent jamais sur la plage de leur naissance, ne sortant jamais de l’eau, mais elles aussi se dirigent vers leur lieu de naissance pour s’unir aux femelles qui viennent de pondre à une faible distance de la plage. Ils y rencontrent aussi les tortues femelles vierges qui sont en mesure de procréer. Ainsi est la nature ! merveilleuse et complexe. Les autres indices des terres lointaines sont plus étranges encore. De ces terres partent souvent lors des grandes tempêtes, des ouragans, des tsunamis, des épaves importantes, parfois des forêts entières qui sont portées par les courants nombreux, et qui finissent par arriver dans les parages d’une autre terre habitée par des humains. Alors ceux-ci savent qu’en remontant le courant ils trouveront une terre couverte d’arbres, et connaissant la vitesse du courant ils peuvent même en apprécier la distance. Des oiseaux marins passent d’une île à l’autre, emportant avec eux des marques de leur vie dans l’île, des graines parfois. Les oiseaux peuplèrent les îles souvent en grand nombre, sans la contrainte des ravageurs et des prédateurs présents partout dans les zones accessibles à partir des continents. Nous savons que furent rencontré partout dans ces îles des oiseaux particuliers, qui souvent avaient même perdu la capacité de voler, ils furent détruits par les humains et les animaux introduits par les colons. Sur l’île la plus isolée du monde ; Rapa nui, l’île de Pâques, il n’y avait alors que quelques espèces d’ insectes, et uniquement des oiseaux marins, aucun autre mammifère que les amphibies de passage, phoques et otaries. Les humains apportèrent les geckos locaux. Au début il y eut quelques porcs comme partout ailleurs mais ils ne survécurent pas. Le coq était le principal élément de l’élevage dans cette île.
EPILOGUE
Il reste peu de tablettes écrites par les Pascuans ; ils nommaient bois parlant, ces planches de bois gravées de signes mystérieux.
Elles furent brûlées par centaines après la conversion de l’île au christianisme. Parce qu’elles comportaient semble t’il des indications sur la magie et la religion maorie.
Les déchiffrer n’apporte que peu de renseignements sur l’histoire du peuple d’Hotu Matua, les légendes qui ont été consignées sont la seule source de la culture maorie disponible ; elles sont bien sûr comme toutes les légendes diluées et transformées par le temps.
Quelques mots et expressions en maori tahitien actuel
Ahi : santal
Aito : filao, arbre de fer
Aiu : nourrisson petit enfant
Ana opaa : râpe à coco (tu bai)
Anani : orange
Anuanua : arc en ciel
Api : nouveau
Ari : prince, chef
Aue : plainte, lamentation
Auteraa : Badamier
Auti :feuilles de ti (cordyline)
Avae : mois
Avai : pieds (vaevae)
Drum : Bidon
Etene :sauvage paîen
Faapu : jardin potager
Fara : pandanus
Farani : français
Fare : maison (hae)
Faa'amu : adoptif, nourricier (hakai)
Fati : gros
Fei : Banane plantain
Fenua: terre, pays (enua)
Fetia : étoile (hetu)
Feti'i : parents, proches (huaa)
Firifiri : Beignet
Fiu : ennui, lassitude, spleen…..
Haaviti : vite
Hapee : nasse à poissons
Ha'ura : espadon
Heiva : fêtes de juillet
Here : amour (hinenao)
Himene : chant
Hinahina : cheveux gris ou blancs
Hipo : préparation culinaire (farine + noix de coco)
Hoa : chenal, passe
Hoe : rame
Hoi : baiser signe d'affection donné avec le nez.
Honu : tortue de mer
Hora : heure
Hupe :brise nocturne froide
Hura : danse sacrée
Ia ora na : que tu aies la vie, assimilé à Bonjour. (kaoha)
Kaina : local , indigène
Kia ora : bonjour en paumotu ou kura ura
Iti : petit
Kau : canot à moteur
Kahaia : arbre au bois très dur (charpentes)
Kaveu : crabe des cocotiers
Kikiriri : noddi noir (oiseau)
Maa : Nourriture, aliments, repas
Maeva : bienvennue (mave mai)
Maaramu : vent du Sud Est, généralement violent
Mahana : jour
Mahimahi : Dorade coryphène
Mahu : homme éfféminé
Mai oto : chagrin profond
Maiore : fruit de l'arbre à pain (uru) (mei)
Mamu : silence
Mana : esprit, force spirituelle
Manuia : à votre santé (mokai)
Manureva : avion
Mao : requin
Maoa : coquillage
Mape : chataîgne tahitienne
Mata : yeux
Matai : bon, bien
Matapo : aveugle
Matahiti : année
Mauruuru : merci (roa : beaucoup) (kouto nui)
Mautini : Potiron
Miti : Mer (tai)
Miti hue : lait de coco fermenté
Metua : chef, le père
Moana : océan
Mori pata : lampe torche
Motu : îlot de sable
Motu'a : petits enfants
Moua : montagne (tua ivi)
Mutoi : policier
Nana : au revoir (a pae)
Ni'au : palme de cocotier
Nono : insecte (moustique)
Nui : grand
Oata : mamelon d'un sein
Opu : ventre
Ora : vie
Orero : orateur, discoureur
Oti : fini (ua pau)
Pahua : bénitier
Pahu : tambour
Paka lolo : canabis local
Pani : casserole, marmite
Patia : harpon, javelot
Pereoo : voiture
Peue : natte
Pia : amidon, biere
Poe rava : Perle noire
Popa'a : étranger, européen
Pua'a : cochon (puaka)
Punu : fer blanc
Ra : Soleil (oumati)
Raau mana'o : bois sculpté (akau haa tiki)
Raerae : travesti
Raro : sous le vent (ouest ) raromatai : ISLV
Raau Tahiti : médicament traditionnel tahitien
Rouru : cheveux (ouoho)
Ruga : au vent (est)
Taho : tabac
Taioro : sauce fermentée, jeune puceau mais aussi une injure.
Tahua : prêtre
Tahirihiri : éventail
Tamaa Matai : Bon appétit (kai kai meitai)
Tamahine : fille
Tamure : danse traditionnelle
Tane : homme, mari (vahana)
Tapa : étoffe
Taote : docteur en médecine (et dentiste)
Taramea : étoile de mer
Taui : changement
Tavana: le maire (hakaiki)
Taravana : fou
Tapati : Dimanche (atapu)
Tiare : fleur (tià e)
Titi : sein, biberon
Tohora : baleine
Tua : dos
Tupana : ancêtres
Tupa : crabe de terre
Ua : pluie
Uhu : poisson perroquet
Umete : corbeille à fruits
Vaa : pirogue (vaka)
Vahine : femme, épouse (vehine)
Vai : eau
Vana : oursin noir
Vini : perruche (et téléphone mobile en PF)
Vivo : flûte nasale
Les chiffres
0 : aore,
1 : ho'e (tahi)
2 : piti (ua)
3 : toru (tou)
4 : maha (ha)
5 : pae (ima)
6 : ono
7 : hitu
8 : va'u
9 : iva
10 : ahuru (onohuu)
11 : ahuru ma ho'e (onohuu e tahi)
NOMS
Papeete : corbeille d'eau.
Huahine : ile des femmes
Mataiva : neuf yeux
Rangiroa : (ou rairoa) : ciel immense
Raiatea : île sacrée