La Polynésie ne va pas bien actuellement ?
On me disait ceci récemment.
Pour ma part j’ai constaté que les Polynésiens vont bien eux, qu’ils sont dans l’ensemble satisfaits de vivre dans un Pays béni des Dieux, tout prés du Paradis. Ils voient tous l’immense richesse qu’ils portent en eux et que leur Pays leur dispense encore. Mais c’est vrai qu’ils sont critiques et qu’ils aimeraient aussi que ce qui ne va pas change.
Ils veulent des emplois stables au pays, un développement économique, un avenir pour leurs enfants.
Ce qui ne va pas?
Bien sûr c’est parce qu’il y a des privilégiés et des riches qu’il y a aussi des pauvres!
Je ne crois pas que la richesse soit une absurdité en elle même, elle est nécessaire pour apporter le développement. Encore faut il que la puissance publique fasse son travail qui est de distribuer les rôles et de faire de l’activité économique son cheval de bataille. On sait bien que ce n’est pas le cas actuellement.
Que les hommes politiques se mettent donc au travail au lieu de comploter pour savoir qui sera le chef!
D’abord il faut élargir et péréniser le domaine public.
Créer les infrastructures de demain. Il faut un plan pour acquérir le foncier nécessaire aux routes et aux travaux publics, et même pour installer les industries nécessaires. Il n’y a pas d’industrie du bois sur le territoire par exemple, elle ne peut exister dans les conditions actuelles il faut organiser cette installation pour qu’elle profite à toute la population, pas à une petite meute d’investisseurs fortunés.
Mais faut il réformer? qui le peut ? pourquoi le faire?
D’abord et surtout à Tahiti. L’accaparement par certains particuliers de ce qui devrait être le domaine public est évident. La France n’a jamais su régler les accès aux biens collectifs dans le sens de l’ordre juste et équitable.
Autrefois ici les domaines des tribus, des chefs plus exactement allaient des vallées aux crêtes des montagnes et se prolongeaient dans les lagons jusqu’à la barrière de récifs et même parfois au delà.
L’accaparement commence lorsqu’on prend comme sien un bien essentiel qu’on n’exploite pas correctement et qui ne rapporte rien à la collectivité dont on est membre. Dans toute société évoluée les accapareurs sont des nuisibles qu’il convient de mettre hors d’état de nuire. Ceci est même vrai lorsqu’on a des titres de propriété en bonne et due forme. Même les Princes et les Rois les plus stupides exigeaient que leurs terres soient mises en valeur par des fermages ou des colonies. La République actuelle ferme les yeux sur les domaines qui sont laissés à l’abandon par leurs possesseurs. Et qui de ce fait cessent d’être des possesseurs légitimes.
L’accès de tous à ce qui appartient à tout le monde doit être préservé contre les intérêts privés, c’est une des tâches essentielle d’un gouvernement. Avec la sécurité des biens et des personnes qui va avec bien sûr.
Ici il y a des chiens en abondance. Des chiens errants par dizaines. Et dans les propriétés jouxtant les accès à la mer ou à la montagne des chiens qui sont là pour dissuader le passant d’aller par là.
Puis un peu partout des terrains vagues avec une clôture de barbelés ou autre et la pancarte « TABU » , des chaines sur les routes, des pancartes « terrain privé sur les seules voies d’accès à des vallées…triste comportement de gens qui ne sont pas bien dans leur tête, sans doute inspirés par une idéologie qui est de toute manière quelle qu’elle soit contraire aux droits fondamentaux de l’homme. Dans ces droits il y a celui imprescriptible de l’hospitalité, de l’humanité toute simple.
La loi littorale notamment est une stupidité confondante car elle met à la disposition de tout le monde ce que l’enclavement du domaine public ne permet pas. Le code civil prévoit bien le désenclavement des propriétés qui deviennent inexploitables, ou sont soumises à des chantages constants du fait de leur enclavement. Les particuliers ont dans ce Pays le droit d’ériger des clôtures sans respecter le droit des autres citoyens de se rendre dans les lieux publics de manière aisée et naturelle, soit d’accéder au domaine public. Ainsi voit on des barrières continues de murs de propriétés privées, et quelquefois publiques aussi, empêcher les citoyens d’accéder à la plage publique qui de fait devient une plage privée.
La Polynésie est paralysée par son système de biens privés et publics. Il serait temps de mettre à bas les privilèges exorbitants de ceux qui s’arrogent le droit de bloquer l’accès des citoyens aux différents domaines privés et publics qui les entourent. Il y a bien ici comme partout des « servitudes » qui traversant les propriétés des mitoyens permettent aux particuliers d’accéder à leurs propriétés, et notamment à leur logement. Ces servitudes permettent généralement d’accéder à la mer et à la plage, mais souvent il est impossible d’y arriver car une propriété en barre l’accès délibérément. Ceci devrait être amendé par l’obligation pour toute propriété ou groupe de propriétés qui occupe plus d’une centaine de mètres de large de littoral d’établir un passage suffisant pour les citoyens qui veulent se rendre à la plage.
A Tahiti les terres sont la richesse la plus crédible et ceux qui monopolisent les biens fonciers sont les vrais riches. Ce sont eux qui détiennent l’essentiel du capital de l’île. Une réforme des biens fonciers est inévitable car leur usage n’est pas laissé à l’arbitraire, n’est pas et ne doit pas être un privilège de quelques uns. Il est nécessaire et souhaitable que chaque Tahitien ait facilement accès à un terrain qui lui permette de vivre bien. Donc il faut casser la structure actuelle du marché du foncier bâti, et mettre sur le marché de grand nombre de lots de terrains constructibles. La puissance publique doit s’y confronter, c’est un défi important à relever.
Le développement du littoral est une chose importante. Encore beaucoup reste à faire. Les communes sont toutes confrontées à des problèmes insurmontables du fait de la géographie, des conditions climatiques, du manque de moyens financiers. Le simple entretien des routes communales n’est pas assuré partout avec un minimum de sérieux. Y a t’il des cantonniers ? pourquoi y a t’il donc tellement d’ornières et de routes qui sont des pistes mal entretenues, pourquoi ne prévoie t’on pas de bétonner et d’asphalter les indispensables jonctions entre les différents points de vie de la population. Certains sont bien lotis ; la plus part doivent se contenter des ornières et des pierres des routes délabrées.
Les services publics eau et électricité notamment sont confrontés à ces stupides considérations locales. Car pour équiper l’hydroélectricité qui devrait être généralisée car non polluante, créant des réserves d’eau non polluée, économisant les ressources rares pétrolières et minérales diverses…Cet équipement de la montagne en canaux de captage, en retenues petites et moyennes bien construites pour pouvoir être des accumulateurs d’énergie aussi entre deux retenues c’est possible et utile dans un pays qui devra un jour ou l’autre utiliser l’énergie électrique solaire gratuite et abondante…
Tout ceci ne peut se faire parce que la montagne n’est pas pourvue d’accès valables, et ceci est un frein absolu au développement.
On voit aussi que des plateaux entiers qui irrigués pourraient produire des biens agricoles très diversifiés sont impossibles à atteindre facilement alors qu’il suffirait de faire établir des routes comme il se fait partout dans le monde. Et pour ceci la puissance publique est seule capable de mettre en œuvre cette indispensable équipement collectif, et elle doit le financer prioritairement. Car avec cet équipement de l’intérieur de l’île elle donnera du travail et créera des emplois qui manquent cruellement. Et ces équipements ne sont pas ceux qui se traduisent par un déficit commercial accru, bien au contraire. Ils contribueront à l’augmentation du P.N.B. de manière importante.
La mise en culture des magnifiques terres situées en zone de montagne permettrait de développer la production agricole dans un premier temps par des cultures de défrichement, destinées à mettre en place les champs, puis ensuite par des cultures arboricoles pour l’essentiel car c’est dans ce domaine que la nature locale est la plus productive. Elle devrait aller de paire avec une gestion des stocks forestiers. On constate qu’il n’y a pas de filière du bois localement implantée, or ici tout pousse, on peut planter toutes les espèces à forte valeur comme les acajous et le teck. Les ressources locales sont actuellement assez limitées parce que la forêt naturelle n’est pas exploitable dans l’état actuel. Les accès par des routes permettant aux camions grutiers de convoyer les billes sont un préalable.
Ceci doit aller avec la fin de l’immense gâchis qui consiste pour les municipalités et les particuliers à brûler les immenses quantités de végétaux qui sont coupés dans la bande littorale simplement pour élaguer ou nettoyer les terrains autour des habitations. Ces végétaux devraient être plutôt mis à contribution pour l’élaboration de l’électricité, on pourrait aussi développer, et même proposer un compostage public local aux différents particuliers qui jettent des tonnes de végétaux qui encombrent les poubelles. Ce compostage lorsqu’il est fait avec des règles précises ne produit pas de désagréments et crée aussi un produit utilisable en agriculture nécessaire au bon entretien des sols de culture.
Les plages et les littoraux sont encombrés d’objets qui n’ont rien à y faire. Ce sont souvent de vraies poubelles. Et tout le monde semble s’en accommoder, et les dirigeants politiques ne font pas d’effort pour faire nettoyer la plage et le lagon. Pas d’équipes chargées de faire ce travail. Pas d’objectif sur ce domaine. Pas de mention même de ce problème dans les programmes électoraux.
Là aussi les accès sont la principale cause du laisser aller public, et de la non responsabilisation des particuliers qui jettent tout à la mer. La mer est un poubelle un peu partout et ceci est une absurdité.
Autre service public qui frise souvent l’incurie, le ramassage des cadavres d’animaux qui sont écrasés par les voitures notamment. On en voit trop souvent sur le bord de la chaussée ou sur celle ci qui restent pendant des jours, quand ce n’est pas dans le canal latéral des voies publiques qui bien souvent n’est pas curé et qui développe donc sa pourriture jusqu’à la prochaine pluie pour finir ensuite dans le lagon. Quand au lagon certains trouvent plaisant de balancer des chiens ou des chats morts dans un sac en plastique lesté d’une pierre. En plein au milieu des coraux. Ce manque de respect de l’environnement est choquant.
Que proposer ?
Le régime actuel de la Polynésie est tel qu’aucune majorité sérieuse ne semble possible. Ceci conforte et impose l’immobilisme, car faire quelque chose, n’importe quoi en fait mécontentera toujours une minorité qui passant à l’opposition fera tout capoter immédiatement.
Il est important que la Polynésie est un vrai souverain. En théorie c’est le Peuple et lui seul ! mais en théorie seulement. Il faut un chef dans cette galère et il est urgent de faire en sorte qu’il puisse gouverner sur le long terme et engager les équipements lourds du pays en infrastructures permettant le développement.
L’idéal serait qu’il y ait un Prince qui ne doivent pas son élection à un programme politique quelconque, qui ne tienne pas compte des idéologies partisanes, qui soit neutre en ce qui concerne la politique politicienne, et surtout qui ne soit pas inféodé ou responsable d’un parti quelconque. Je ne sais pas si le système démocratique permet l’élection d’un tel monarque. On voit bien qu’en France ce n’est pas le cas, même si le régime présidentiel voulu par De Gaulle est encore en place, le Président n’est que le jouet des partis qui l’on amené au pouvoir, et des forces diverses qui permettront sa prochaine réélection. Donc ce serait une stupidité de mettre ce système en place en Polynésie. Le système américain des U.S.A. est adapté au fait qu’il s’agit de faire cohabiter dans un ensemble plus d’une centaine d’îles, et ceci n’est pas une mince affaire.
D’abord la Polynésie devrait arrêter d’imiter le modèle français de la Capitale qui attire tous les moyens, et qui dispense toutes les subventions. Il est important que les groupes d’îles qui peuvent s’autogérer le fassent, et même si Mooréa par exemple qui est toute proche de Tahiti a les moyens d’une politique particulière qu’elle puisse entreprendre ses travaux publics et ses équipements sans tenir compte du Centre Papeete.
Papeete devrait uniquement coordonner les politiques locales et surtout s’occuper de son domaine qui est d’abord de mettre en œuvre des moyens inter-insulaires suffisants.
Il est important de développer les îles, de les autonomiser, pas de faire venir à Papeete les femmes pour leur accouchement, et les enfants pour leurs études secondaires et supérieures, alors qu’ils n’en auront pas besoin pour leur implantation dans leur patrie, on en fait des déracinés, on prive les îles de leurs forces vives, la jeunesse doit s’exprimer et s’implanter dans ces îles où il y a beaucoup à faire si on veut bien s’en donner les moyens.
L’hypertrophie du centre est une hérésie dans toute Nation, c’est la forme la plus confortable pour les dirigeants, mais c’est la forme la plus dommageable. La Polynésie est un Territoire annexe de la France, en ce sens elle est une exception. Politiquement elle montre plusieurs choses qu’il ne faut jamais faire. La principale est de laisser filer les coûts et les salaires, ici la vie est très chère, les perdants sont ceux qui doivent chaque jour trouver de quoi , les gagnants ceux qui ont des revenus indexés sur le coût de la vie. Le franc CFP devrait être dévalué au moins de 50% pour qu’on arrive à un niveau raisonnable, ce qui bien sûr ne durerait qu’un très petit temps. Le plus simple serait de le laisser flotter et s’apprécier par le marché. L’Etat actuellement n’en tire aucun profit, et c’est un frein au développement local. Les marchandises importées sont généralement taxées assez lourdement, pour alimenter les budgets locaux, et protéger les productions locales, ceci peut se comprendre dans une phase inconsistante de l’autorité publique. Il n’y a pas de vraie imposition des gens fortunés ici, et ceci se comprend. Donc c’est le consommateur de base qui paie tout, et consommer est assez difficile, puisqu’en même temps on paie surtout pour les privilégiés qui arrondissent leurs revenus et augmentent leurs biens. La spéculation et l’usure sont gagnants dans un système qui repose pour une part essentielle sur les taxes à l’importation, et sur les transferts d’argent frais de la métropole. Tout le monde sait bien que ce système est vicié à la base, mais il est tellement commode ! qui voudrait en changer finalement ?
La politique à Papeete est la caricature de la politique française ; et la politique française est déjà la caricature de la politique raisonnable classique. Tout le monde sait que l’immobilisme et le conservatisme sont tellement faciles à maintenir. Que flatter les égos des petites gens pour les entraîner dans des tribulations pas possibles c’est vraiment tellement facile. Diviser pour régner.
Sur les grands sujets et les grands travaux nécessaires il faut un consensus général de la population et des élus. Et ce consensus ne doit jamais être remis en question. Aux hommes politiques responsables de trouver ces grandes lignes de développement. Après cette phase de délimitation des objectifs priorisés que reste t’il à décider et à mettre en œuvre ? des broutilles, de l’intendance.
Nous savons que les réalisations de Gaston Flosse et de son équipe ont été faites dans des conditions souvent « locales », mais elles sont là, et elles ont été en leur temps une décision globale de tous. Ce sont ces décisions globales de tous les élus réunis et de toute la population qu’il convient de mettre en avant. Et si ça coince il faut utiliser le référendum local, car redonner la parole aux citoyens lorsqu’il y a un blocage c’est bien ce qu’il convient de faire.
Pour la Polynésie et pour les Polynésiens de toutes origines confondues il est important que ce Pays soit bien gouverné dans les années qui vont venir.
Ce n’est pas le cas actuellement.
Une autorité indiscutable est nécessaire. Il faut un conseil permanent et stable de gestionnaires intègres des intérêts publics qui soit plus responsable. Le blocage de la politique quelle qu’elle soit est toujours une absurdité. Mieux vaut un ordre injuste qu’un désordre qui peut paraître juste. L’ordre juste c’est celui qui met à contribution tout le monde selon ses moyens et ses compétences, qui ne laisse personne au bord de la route, dans un squat ou dans un conteneur…C’est celui qui empêche les particuliers et les entreprises, du public et du privé de détruire la nature, de polluer, de perturber la vie économique, de réaliser des bénéfices indus, d’escroquer, d’interrompre les services publics, de faire n’importe quoi, n’importe quand, sans se soucier des droits légitimes des autres. Lorsque le droit d’une personne ou d’une famille s’oppose aux droits légitimes de la collectivité il est nécessaire que la loi intervienne sérieusement. Qu’elle soit comme un scalpel. Que la décision soit prise rapidement. Que l’éventuelle indemnisation puisse être ensuite amendée ceci paraît normal. La loi doit prévoir ceci et ceci doit aller de soi. A quoi sert donc tous ces procès sans fin pour départager les parties qui s’accrochent à leur bout de gras alors même que la puissance publique est concernée ?
Tout homme de bon sens comprendra que la chose publique, le domaine public ne se marchande pas. Beaucoup d’usuriers et de trafiquants se sont enrichis ignoblement en jouant avec le domaine public, ils ont utilisé la corruption et la collaboration des dirigeants politiques. Ils sont tous là autour du pouvoir à agiter leurs marionnettes. L’ordre juste consiste à mettre fin à ces agissements. Il faudra bien un jour que les profiteurs rendent gorge, eux ou leurs héritiers.
Si l’Etat veut faire une route ou un ouvrage d’art. La population locale concernée doit être impliquée dans la prise de décision bien sûr, mais ce qui importe avant tout c’est bien que ceci n’empêche pas le projet d’aboutir.